La confection d’un gouvernement fédéral s’annonce encore plus compliquée que prévu

Magnette (PS) & De Wever (N-VA) - BENOIT DOPPAGNE/Belga/AFP via Getty Images
Baptiste Lambert

Préparez-vous à un combat intense après les élections du 9 juin, au niveau fédéral. Et plus seulement sur le volet communautaire. Car le Bureau du plan est venu confirmer hier ce que tout le monde craignait : un budget qui dérape totalement. Il faudra le corriger, les nouvelles règles budgétaires européennes ne nous laissent plus le choix. Il restera à trancher le difficile équilibre entre réduction des dépenses et nouvelles recettes, en plus de réformes structurelles. La Belgique, et en particulier l’État fédéral, a du pain sur la planche.

Sans ajustement après les élections de juin, le déficit budgétaire belge risque d’atteindre 39 milliards d’euros”, avertit le Bureau fédéral du Plan, dans ses perspectives économiques pour les 5 prochaines années.

À politique inchangée, le BFP s’attend à ce que le déficit augmente de 4,6% du PIB à 5,6% en 2029, soit de 27,7 milliards d’euros à 39,4 milliards d’euros. La dette publique exploserait de 106% en 2024 à 117% en 2029, sous le poids des taux d’intérêt et du coût du vieillissement qui pèsent surtout sur l’entité numéro 1, à savoir l’État fédéral.

Or, les nouvelles règles budgétaires européennes qui viennent de faire l’objet d’un accord – toujours contesté par la gauche et les verts – nous obligent à réaliser un effort de 27 milliards d’euros sur la prochaine législature, a récemment estimé Alexia Bertrand (Open Vld), la secrétaire d’État au Budget, soit 6 à 7 milliards d’euros par an. Vincent Van Peteghem a indiqué la possibilité de lisser l’effort sur les 7 prochaines années à 4 milliards d’euros par an. À titre de comparaison, le gouvernement De Croo a réalisé un effort de 11 milliards d’euros sous cette législature. Ça vous laisse deviner l’ampleur de la tâche, même si cet effort devra être partagé par toutes les entités du pays.

Croissance et inflation

Les nouvelles ne sont pas bien meilleures du côté de la croissance. Si notre pays s’en est bien sorti l’année dernière, avec 1,5% de croissance, contre 0,5% de moyenne dans la zone euro, et fera presque aussi bien cette année avec 1,4%, contre 0,9% dans la zone euro, la tendance s’inversera pour la période 2025-2029 : la croissance devrait atteindre 1,3 ou 1,4 % par an, contre 1,5% en moyenne dans la zone euro. C’est encore la demande intérieure qui sera le principal moteur de notre économie.

Le Bureau du plan est plus optimiste concernant l’inflation : il s’attend à ce que les prix à la consommation augmentent en moyenne de 2,8 % cette année, puis se stabilisent à 1,8 % en 2025. Ce qui interroge, c’est que la Commission n’est pas vraiment du même avis. Elle voit l’inflation à 3,5 % en 2024 et puis à 2,3% l’année suivante, au-dessus de la moyenne européenne.

Sur le terrain de l’emploi, il y aura un ralentissement, mais on sera toujours dans le vert : 253 000 personnes au cours de la période 2024-2029, ce qui ferait augmenter le taux d’emploi à 74,3 % en 2029, contre 72,2% actuellement. On sera toutefois loin des 80% de taux d’emploi à l’horizon 2030, l’objectif avoué de la Vivaldi.

L’accouchement sera long ?

Le prochain gouvernement devra se montrer particulièrement créatif pour déjouer ces prévisions pas très roses. Outre les difficultés habituelles, sur le plan communautaire, s’invite donc une pression budgétaire immense. On pourrait croire à priori qu’elle pourrait jouer un rôle positif : pas le temps de badiner, chaque jour de négociation supplémentaire sera une perte pour les finances publiques.

Mais les choses se corseront quand il faudra mettre sur papier la répartition des efforts. On le voit déjà aujourd’hui, dans les débats. Entre les nouvelles recettes et les réductions des dépenses, les discussions s’annoncent animées. Mais au vu du tableau d’ensemble, il sera bien difficile de respecter la règle budgétaire non écrite des trois tiers : un tiers de recettes, un tiers de réduction des dépenses et un tiers de mesures diverses. Forcément, certains y voient le spectre de l’austérité.

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