L’impact des primes énergie sur vos factures ? Pas aussi élevé que vous ne le pensez
Philippe Defeyt, économiste au sein de l’Institut pour un Développement Durable (IDD), a calculé l’impact réel moyen des primes à l’énergie octroyées par la gouvernement fédéral aux citoyens belges. Certains pourraient déchanter.
Afin d’alléger la facture des ménages belges dans le contexte de crise énergétique, la Vivaldi a décidé d’une série d’aides financières à la population. Parmi ces coups de pouce financiers figure une prime mensuelle de 196 euros pour le gaz et l’électricité. Elle est octroyée aux ménages qui ont conclu un contrat d’énergie fixe ou variable après le 1er octobre 2021 et qui ne bénéficient pas du tarif social élargi (avec un plafond de revenus, voir les détails ici). Ces ménages pourront compter sur une réduction de 61 euros par mois pour l’électricité et de 135 euros par mois pour le gaz, pour la période de novembre à mars.
Cette aide couvrirait toutefois moins d’un cinquième de la facture énergétique totale des ménages, selon les estimations réalisées par Philippe Defeyt et présentées dans une note de l’Institut pour un développement durable (IDD).
Dans le cas où les prix observés en octobre pour l’électricité et le gaz devaient rester les mêmes pendant 12 mois, les aides fédérales couvriraient en moyenne 16,4% de la facture énergétique annuelle des Belges, détaille la note. L’augmentation du forfait est donc loin de couvrir l’augmentation des prix intervenue entre août et octobre, constate Philippe Defeyt.
16% de la facture annuelle
Pour réaliser ses calculs, Philippe Defeyt s’est basé sur une consommation moyenne de 3500 kWh d’électricité et de 17.000 kWh de gaz, par an et par ménage. Ces 3500 kWh d’électricité coûteraient au consommateur standard 2.425 euros, auxquels il faut retrancher 305 euros de prime (61 euros x 5 mois), soit 2.210 euros. Pour le gaz, une consommation annuelle de 17.000 kWh coûterait à un consommateur moyen 3.564 euros pour 12 mois. Moins les 675 euros de prime énergétique fédérale (5 x 135 euros), la facture redescendrait à 2.889 euros.
Au total, les aides fédérales atteindraient donc en moyenne 980 euros, sur une facture énergétique annuelle de 5.989 euros. Soit 16,34% de prise en charge par le fédéral.
Comme le rappelle la note de l’économiste, ceci reste une estimation puisque “la part de la facture finale d’un consommateur donné qui sera couverte par ces primes dépendra bien évidemment d’une situation à l’autre, suivant le contrat choisi et son mécanisme d’indexation“.
La note de l’IDD poste aussi ce constat : environ 21-22% des consommateurs d’électricité comme de gaz ne bénéficient ni du tarif social ni des primes énergétiques (parce qu’ils ont conclu un contrat fixe avant le 1er octobre 2021).
Un impact nettement inférieur au tarif social
Selon les conclusions de l’économiste, les aides fédérales ont un impact nettement inférieur à la protection conférée par le tarif social. Sur base de ses calculs, Philippe Defeyt estime en effet qu’un consommateur au tarif social économiserait 3.500 euros par rapport à un consommateur touchant le “paquet énergie à prix réduit”.
Le tableau suivant également réalisé par l’IDD compare, quant à lui, les différences de factures nettes – déduction faite des aides – suivant le recours au gaz ou au mazout pour se chauffer en prenant en compte les 5 mois de primes énergétiques et l’extension à 300 euros du chèque mazout. Le principal constat sur base de ce tableau est le suivant : pour un consommateur “normal“, se chauffer au mazout est plus intéressant que se chauffer au gaz tandis que pour un consommateur social le gaz est plus intéressant.
Des aides pas assez ciblées
Philippe Defeyt a déjà donné son avis ici-même à ce sujet : les aides fédérales ne sont pas suffisamment ciblées. Pour lui, les primes à l’énergie et la réduction de la TVA ne sont pas nécessaires pour une famille de la classe moyenne. Il propose plutôt d’étendre le tarif social pour aider les familles les plus vulnérables.
Les résultats d’une étude récente de l’UGent et de la BNB montrent aussi que l’extension des tarifs sociaux est une mesure efficace pour soutenir les familles. Les familles financièrement vulnérables consacrent en effet la majeure partie de l’allocation à d’autres dépenses de consommation. Une majorité de ce groupe consomme effectivement plus d’énergie avec le tarif social, ce qui implique qu’ils auraient probablement dû réduire plus fortement leur consommation d’énergie sans cette mesure.
500.000 citoyens pourraient ne pas recevoir automatiquement la prime
Comme pour la prime chauffage de 100 euros, il se pourrait qu’une partie des citoyens ne reçoive pas automatiquement la prime énergie à cause notamment d’un échange de données erroné entre le SPF Économie, les fournisseurs d’énergie et le Registre national. “Certaines personnes devront faire une demande de prime mais on essaie que ce soit le plus automatique possible, commente Stéphanie Maquoi, du SPF Energie. On est entre 5.000.000 de primes automatiques et 500.000 citoyens qui devraient en faire la demande. Il est toujours possible que certains consommateurs passent à travers les mailles du filet mais ils pourront toujours demander la prime via un formulaire en ligne.”
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Par ailleurs, le Premier ministre De Croo a annoncé cette semaine que la prime ne sera pas versée en novembre comme prévu, à cause de la lourdeur administrative de la mesure. Le Premier ministre rassure: la somme initialement prévue pour le mois de novembre ne sera pas perdue. Le chèque sera en effet doublé pour la facture du mois de décembre.
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