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Quelles conditions pour y croire encore ?

Vivons-nous les derniers jours de l’euro dans sa forme actuelle ? Le mois prochain s’annonce une fois de plus crucial, et même un peu plus que les mois précédents.

Vivons-nous les derniers jours de l’euro dans sa forme actuelle ? Le mois prochain s’annonce une fois de plus crucial, et même un peu plus que les mois précédents. Le référendum en Irlande, mais surtout les élections en Grèce et le prochain sommet européen vont être déterminants. A l’aube de cette période particulièrement chahutée, le but n’est pas ici de dire si oui ou non la zone euro restera unie, ni même de se prononcer sur l’opportunité de le rester, mais simplement de synthétiser (oserais-je dire une dernière fois) quelles sont les conditions indispensables à la survie de la zone euro sous sa forme actuelle. On attirera également l’attention sur la séquence des événements présentés ici : les “étapes” ne peuvent être inversées, sous peine de créer des problèmes de hasard moral.

1. La campagne électorale grecque sera de plus en plus axée sur l’adhésion ou non à la zone euro. Dans ces conditions, si on en croit les enquêtes, les partis qui garantissent le maintien dans la zone euro devraient à tout le moins être en mesure de former une coalition.

2. Dans le même temps, il serait souhaitable que les dirigeants européens, qui ont bien conscience de la gravité de la situation, reviennent dans une logique coopérative et non plus concurrentielle comme on a pu le voir lors du sommet européen du 23 mai. Cela s’adresse particulièrement à l’Allemagne et à la France.

3. Après la formation d’une coalition, la Grèce confirmerait ses engagements en matière de réformes structurelles, mais en échange, elle obtiendrait de la Troïka l’annulation de la plus grande partie de sa dette détenue par le FESF, les partenaires de la zone euro et la BCE (ce qui représente une perte de l’ordre de 150 milliards d’euros pour ces bailleurs de fonds). Sans annulation partielle de la dette, la Grèce est vouée à sortir de la zone euro, ce qui se traduirait également par une restructuration massive de la dette. Dans tous les cas donc, on ne peut qu’acter une perte.

4. Un mécanisme de solidarité devrait également être mis en place au niveau européen. Cela passerait par les fonds structurels, la Banque européenne d’investissement ou des eurobonds. Si 0,5 % du PIB des pays du coeur de la zone euro était destiné à des aides aux pays de la périphérie, en considérant l’Italie dans une position neutre (ni créancier, ni débiteur), cela représente une manne équivalente à 1,8 % du PIB de la périphérie. Ce n’est pas rien. En échange, celle-ci devra néanmoins accepter un abandon d’une part de sa souveraineté, principalement au niveau de l’utilisation des fonds “offerts”, car il est plus qu’indispensable de mieux cibler les investissements publics. La littérature montre en effet que rares sont les transferts fiscaux qui ont, par le passé, permis la moindre convergence entre les bailleurs de fonds et les bénéficiaires. Une approche plus technique et moins politique dans l’utilisation des fonds pourrait peut-être faire mentir les expériences passées.

5. Pour renforcer le rééquilibrage compétitif, il faudrait enfin donner plus de latitude aux pays de la zone euro. C’est pourquoi l’Allemagne accepterait une hausse un peu plus généreuse des salaires que ses partenaires, de manière à ce que ceux-ci ne soient pas contraints de mener des politiques déflationnistes. Parallèlement, il serait nécessaire que l’euro se déprécie sur les marchés des changes. De cette manière, la compétitivité de l’Allemagne se détériorerait par rapport à ses partenaires européens, mais pas par rapport à ses concurrents sur les marchés mondiaux. Faudrait-il aller jusqu’à étendre le mandat de la BCE à une politique de change ?

Cette stratégie est loin d’être facile à accepter, d’autant plus que son succès reste tributaire du contexte économique général et de la réaction des autres zones économiques importantes. On ne peut également nier les conséquences néfastes de cette stratégie, comme la hausse de l’inflation qui n’est rien d’autre qu’un impôt déguisé. Alors faut-il vraiment courir autant de risques ? Les citoyens grecs et les dirigeants européens en décideront dans les prochaines semaines. On retiendra ici simplement que les alternatives (concrètement : la sortie de la Grèce de la zone euro ou continuer à gagner du temps en espérant que les choses s’arrangent d’elles-mêmes) sont encore plus risquées et coûteront davantage. Espérons donc qu’il ne faille pas en faire une chronique dans les prochaines semaines. Rendez-vous le 17 juin en fin de soirée pour l’étape n°1…

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