La Chine, affamée de viande, lève un embargo vieux de 13 ans sur le boeuf américain

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La Chine a annoncé jeudi la levée partielle de l’embargo qu’elle imposait depuis 2003 sur le boeuf américain, ouvrant aux éleveurs des Etats-Unis un marché où s’envole la consommation de viande, en pleine expansion mais très disputé.

Pékin avait entièrement banni il y a 13 ans les importations de boeuf américain après la découverte d’un premier cas d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) aux Etats-Unis.

Mais les cas de “vache folle” paraissent lointains, et Washington assurait depuis des années que la viande américaine était redevenue “sûre”.

Le geste de Pékin intervient au moment où la consommation de viande s’envole dans la deuxième économie mondiale: l’essor de la classe moyenne y a modifié le régime alimentaire traditionnel et la viande importée d’Australie et du Brésil y connaît un grand succès.

Désormais, l’importation en Chine de produits américains de viande de boeuf, désossée ou non, provenant d’animaux de moins de 30 mois, est à nouveau autorisée, a annoncé l’Administration pour le contrôle de la qualité, l’inspection et la quarantaine (AQSIQ).

La décision est applicable immédiatement mais assortie de conditions, les produits carnés devant “répondre aux critères chinois de traçabilité, d’inspection et de quarantaine”.

“Nous reconnaissons tous que les Etats-Unis produisent du boeuf excellent, alors pourquoi en priver les consommateurs chinois?”, s’était d’ailleurs interrogé mardi le Premier ministre Li Keqiang, s’exprimant à New York devant des patrons américains.

Echange de bons procédés: Washington a accordé cette semaine son feu vert à une banque chinoise pour ouvrir une chambre de compensation en yuans à New York.

Envolée des importations

Un assouplissement marginal de l’embargo chinois sur le boeuf américain avait été annoncé dès 2006 par Pékin, mais ne s’était jamais concrétisé.

Pour les éleveurs américains, confrontés à un fort gonflement de l’offre intérieure et à un déclin marqué des prix, la réouverture de marchés à l’export auxquels ils n’avaient plus accès était devenue une nécessité cruciale.

Les Etats-Unis ont salué ce “premier pas” tout en déplorant que “d’autres étapes” soient nécessaires avant que le boeuf américain soit de nouveau en vente en Chine, notamment la publication du rapport final des autorités de Pékin.

“Un accès plein et entier au marché chinois du boeuf (…) est une des plus grandes priorités pour les Etats-Unis”, a commenté le représentant au Commerce extérieur américain (USTR), Michael Froman, dans un communiqué.

Le Brésil, qui avait également maintenu un embargo ancien sur le boeuf américain, a d’ailleurs repris langue avec les Etats-Unis en août pour une levée des interdictions croisées des deux pays sur des produits carnés.

La Chine, elle, constitue un marché prometteur: la consommation annuelle de boeuf dans le pays s’est élevée en 2015 à 3,8 kg par habitant, contre moins de 3 kg en 2005, selon l’OCDE.

D’après des estimations distinctes du ministère américain de l’Agriculture (USDA), la consommation chinoise de boeuf et de veau devrait gonfler cette année de 3,4% à 7,59 millions de tonnes –excédant une production locale de 6,79 millions de tonnes.

D’ici à 2025, il faudra 2,2 millions de tonnes de boeuf supplémentaires, dont 20% importés, pour satisfaire l’accroissement de la demande chinoise, juge de son côté la banque néerlandaise Rabobank.

Déjà, les importations de boeuf explosent: cette année, la Chine devrait en importer 825.000 tonnes, soit un bond de 24% par rapport à 2015, anticipe l’USDA.

Ces importations viennent principalement du Brésil, de l’Uruguay et de l’Australie pour les produits congelés, et quasi-uniquement d’Australie pour les morceaux frais, selon les douanes chinoises.

Le Brésil, autre grand producteur également compromis par des cas d’ESB et objet d’un embargo chinois, avait été autorisé à exporter à nouveau vers la Chine seulement l’an dernier. Il est rapidement parvenu à rogner des parts de marché à l’Australie.

Ces deux pays pourraient pâtir de l’entrée en lice des exportateurs américains. En 2002, environ 70% du boeuf importé par la Chine venait des Etats-Unis, selon Rabobank.

Symptôme d’un appétit plus acéré, “les prix du boeuf se sont envolés en Chine et sont à présent quatre fois plus élevés qu’en l’an 2000”, observe Rabobank, notant toutefois que les Chinois “sont plus tolérants” au renchérissement de la viande.

La Chine est déjà le premier pays consommateur de porc. Elle avait multiplié par deux, sur les quatre premiers mois de 2016, ses importations en provenance d’Europe, selon le Marché du porc breton (MPB).

Le géant asiatique était par ailleurs en 2015 le deuxième importateur de produits agricoles américains, selon l’USDA, avec des importations en hausse de plus de 200% en l’espace d’une décennie.

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