La gestion-conseil n’a pas disparu malgré MiFID II

recourir à un service de gestion-conseil nécessite une plus grande implication. © Getty Images

En 2018, les jours de la gestion-conseil semblaient quasiment comptés en raison de l’entrée en vigueur de la réglementation MiFID II. Aujourd’hui, les clients en quête de personnalisation sont prêts à payer pour des conseils en investissements adaptés.

Il existe divers types de mandats de gestion sur le marché de la banque privée, comme le rappelle Frank Claus, director private banking Belgium chez BNP Paribas Fortis. “Nous pouvons considérer trois grandes options pour nos clients: la gestion-conseil, la gestion discrétionnaire (ou déléguée) et l’exécution d’ordres sans conseil ( execution only).” Ce dernier type de gestion est le plus simple puisque la banque n’agit que comme exécutant des ordres du client. Il n’y a donc pas à proprement parler de service de gestion. Ceci étant, selon le mandat, le client peut aussi bénéficier des autres types de services d’une banque privée comme les conseils fiscaux et de structuration, l’accompagnement pour la transmission, les invitations à des événements exclusifs, etc. Ces formules du genre execution only concernent assez peu de clients, du moins au regard des deux autres types de mandats.

Vrai sur-mesure

“En gestion discrétionnaire, nos clients nous confient leur patrimoine qui est géré par nos gestionnaires selon la stratégie de la banque”, explique Frank Claus. Les gestionnaires constituent et gèrent ainsi un portefeuille “en fonction du profil, de l’appétence au risque, des connaissances en matière de produits financiers et de l’attrait pour les investissements durables du client”.

Troisième grand type de mandat: la gestion-conseil, dans laquelle les clients reçoivent des conseils sur mesure de la part d’un gestionnaire, mais décident eux-mêmes s’ils souhaitent les suivre en totalité ou en partie. Ils ont donc toujours le dernier mot. “La concertation entre le gestionnaire et le client est au coeur de la gestion-conseil, explique Filip Decruyenaere, CEO de Dierickx Leys Private Bank. Le gestionnaire donne des conseils proactifs, mais c’est finalement le client qui approuve la transaction. Il s’agit de conseils sur mesure et personnalisés, il n’y a pas deux portefeuilles identiques. C’est la principale différence avec la gestion discrétionnaire, où le client donne à la banque un mandat pour agir de manière autonome dans les limites de son profil d’investisseur.”

Filip Decruyenaere
Filip Decruyenaere© pg
Ce n’est pas parce que l’offre se raréfie que la demande diminue, bien au contraire.” – Filip Decruyenaere (Dierickx Leys Private Bank)

Impact de MiFID II

A la suite de l’entrée en vigueur de la réglementation MiFID II en 2018, la gestion-conseil est devenue plus complexe à gérer dans le chef des banques, comme l’explique Filip Decruyenaere. “Les obligations d’information ont été considérablement accrues. Pour chaque recommandation, il faut vérifier si les opérations conviennent au client en termes de connaissances et d’expérience, de goût du risque, d’horizon d’investissement, etc.” Le tout doit en outre être consigné dans un rapport d’adéquation pour chaque conseil, tout en présentant la structure de frais de façon totalement transparente au client.

“Que ce soit au niveau de nos systèmes IT, de nos processus de vente, de l’information que nous donnons à nos clients et de la formation des private bankers, cette nouvelle réglementation a bien sûr nécessité des changements et des investissements”, détaille Frank Claus, qui ne regrette toutefois pas MiFID II. “Nous sommes convaincus du bien-fondé de cette réglementation car elle n’a qu’un but: assurer la qualité du conseil fourni au client et nous ne pouvons que nous en féliciter, poursuit-il. Nous sommes partisans de standards élevés, car cela renforce encore la plus-value de notre métier.”

Si l’objectif est louable, ces formalités engendrent évidemment des surcoûts. Mais qui n’ont pas tué la gestion-conseil, comme on le redoutait il y a quelques années. “Nombre de nos clients valorisent le fait de recevoir des conseils d’experts et sont prêts à payer pour cela”, explique Filip Decruyenaere. Les clients de services de gestion de patrimoine “recherchent de plus en plus des conseils personnalisés où ils ont leur mot à dire dans les choix de gestion de leur portefeuille. Ils sont eux-mêmes souvent très intéressés et bien informés. Le banquier agit alors davantage en tant que sparring-partner dans un environnement financier en évolution rapide avec une actualité qui ne s’arrête jamais.”

Pas pour tous

Cependant, “les obligations liées à MiFID II ont amené un certain nombre d’acteurs à quitter le marché de la gestion-conseil ou à relever le patrimoine nécessaire pour bénéficier de tels services”. Ce n’est pas le cas de Dierickx Leys Private Bank, où cette gestion-conseil est restée relativement accessible avec un portefeuille minimal de 500.000 euros, et où on constate une réelle demande. “Ce n’est pas parce que l’offre se raréfie que la demande de gestion-conseil diminue, bien au contraire”, assure le CEO.

Du côté de BNP Paribas Fortis, toutefois, “la gestion-conseil en ligne à ligne avec des portefeuilles composés d’actions individuelles, d’obligations, de fonds et de produits structurés n’est plus envisagée que pour les grands patrimoines et passe par des gestionnaires dédiés, précise Frank Claus. Ce niveau de complexité n’intéresse qu’une petite partie de notre clientèle.”

Investisseurs avertis

Outre l’aspect financier, recourir à un service de gestion-conseil nécessite aussi une plus grande implication. “Ce modèle demande un engagement en temps et une expertise plus pointue dans les marchés” de la part du client qui est le responsable final des choix d’investissement. Cette responsabilité est évidemment plus lourde à porter en cas de crise ou de turbulences sur les marchés.

Filip Decruyenaere insiste ainsi sur la nécessaire coordination entre la banque et le client. “La méthode de travail et les modalités sont dûment discutés et clarifiés au préalable lors d’un entretien avec le client et lors de l’établissement du profil d’investisseur”, indispensable pour des recommandations adaptées.

Mais si vous optez pour un mandat de gestion-conseil, outre ses modalités (conseils en ligne, par téléphone, etc.), demeurez aussi bien vigilant à l’ensemble des frais, notamment. Différents coûts (frais pour les conseils, droits de garde, frais de transaction, etc.) peuvent en effet vous être imputés, contrairement à un mandat de gestion discrétionnaire prévoyant généralement un forfait.

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