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La morale des Belges laisse (un peu) à désirer

On savait que les discussions autour du tax shift allaient être musclées. Et les révélations du Swiss Leaks n’ont rien arrangé.

Normal : apprendre que vous allez plus que probablement subir une hausse de TVA (lire aussi l’article “La TVA au centre du ‘tax shift'”) et que dans le même temps 6 milliards d’euros ont échappé au fisc belge, représentant un manque à gagner de 430 millions pour l’Etat, ça a de quoi faire grincer des dents. Si on luttait plus efficacement contre la fraude fiscale, on n’en serait pas là ; qu’on soit de gauche ou de droite, difficile de passer à côté d’un tel constat.

Lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, c’est impératif, et fort heureusement, tant l’Europe que les Etats-Unis semblent s’y atteler par le biais de directives toujours plus strictes en la matière. Pour les mettre à exécution, il faudra néanmoins qu’aux niveaux nationaux, les moyens suivent… Cela semble évident, mais pour l’instant l’engagement se limite plus à des belles paroles qu’à de véritables investissements (lire aussi l’article “Elke Sleurs, Madame anti-fraude”). Attendons de voir.

La morale des Belges laisse (un peu) à désirer

Cela dit, déployer un coûteux arsenal anti-fraude, même s’il sera plus que probablement rentable, cela reste du curatif. Or, en matière de soins de santé comme en matière fiscale, le préventif est le plus efficace – et de loin. C’est là que le bât blesse : la morale des Belges laisse (un peu) à désirer. Jugez plutôt : chez nous, personne ne s’insurge lorsque quelqu’un prend le volant après avoir bu un, deux ou même trois verres de trop. Eviter les contrôleurs de la Stib devient un sport pour les plus jeunes. On envie l’indépendant qui peut faire passer une note de restaurant ou un billet d’avion privés sur le compte de sa société. Même les notaires ferment les yeux lorsqu’une partie de transaction immobilière est réalisée sous la table. Et dans quel autre pays un président de fédération ose-t-il dire devant les caméras de télévision “qu’il est aujourd’hui impossible de gérer un restaurant en respectant la loi” ?

D’accord, nous ne sommes pas l’exception. Mais ça n’est pas une raison, pas plus que ne l’est la lourdeur de notre fiscalité d’ailleurs : dans l’affaire Swiss Leaks, les fonds qui ont échappé à l’impôt provenaient en majeure partie, outre de Belgique, de Suisse, de France, d’Italie, du Royaume-Uni, du Brésil, d’Israël et des Etats-Unis. Les pays scandinaves, pourtant les plus taxés d’Europe, n’apparaissent nulle part dans ce joyeux étalage. Coïncidence ou pas, ces pays sont également ceux où le taux d’accidents mortels sur les routes est l’un des plus faibles au monde, les limitations de vitesse étant respectées à la lettre, de même que celles concernant l’alcool au volant.

Les attentats de Paris et de Copenhague ont renforcé l’idée d’introduire à l’école des cours de citoyenneté, avec le respect de l’autre et la liberté d’expression comme valeurs centrales. La morale devrait en être une autre, tout comme elle devrait être une priorité du gouvernement. Pour ses propres membres d’abord – et il y a encore du chemin à faire sur ce plan – mais aussi pour l’ensemble de sa population. OK, ça peut paraître un peu bateau. Pas moins que de dire que le gouvernement sera “moins clément à l’égard des fraudeurs”. Merci, Elke Sleurs.

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