Compteur électrique ou de gaz trafiqué : une pratique illégale aux lourdes conséquences
Des consommateurs désirant réaliser des économies tentent de modifier les données de leur compteur de gaz et/ou d’électricité. Cette pratique illégale peut aboutir à de lourdes sanctions, mieux ne vaut pas s’y risquer.
La pratique frauduleuse est à la portée de tout un chacun. En surfant sur la Toile, on tombe facilement sur des sites expliquant comment “ralentir la roue d’un compteur électromécanique”, à l’aide notamment d’un aimant puissant. Ou encore, il est possible avec un simple tournevis de fracturer les plombs et de faire redescendre les données de consommation de son compteur. Certains petits malins n’hésitent pas non plus à dériver des câbles pour alimenter leurs appareils les plus énergivores sans qu’ils soient pris en compte dans leur consommation globale.
Selon des données chiffrées qui remontent à 2019, rien qu’en Région bruxelloise, Sibelga dénombre chaque année entre 300 et 500 cas de fraude au compteur. Une estimation qui varie d’une année à l’autre. Ce petit jeu de traficotage n’en vaut pourtant pas la chandelle, car il peut se révéler tout à fait contraire à l’effet recherché. “Ces actes sont considérés comme du vol d’énergie et donc poursuivis en justice“, rappelle Ores, l’un des gestionnaires des réseaux de distribution d’électricité et de gaz naturel en Région wallonne.
Pas de tendance à la hausse
Johan De Bruyn, porte-parole de Sibelga, le gestionnaire du réseau de distribution pour le gaz naturel et l’électricité dans la Région de Bruxelles-Capitale, n’a pas voulu nous dévoiler de chiffres précis de fraudes au compteur repérées ces derniers mois. “Ce qu’on peut dire, c’est qu’on ne remarque pas d’augmentation à l’heure actuelle. On découvre autant de fraudes qu’avant, mais on ne remarque pas de tendances à la hausse. On pense qu’on devrait avoir un peu plus de recul pour voir la tendance augmenter ou pas, car tous les ménages n’ont pas encore reçu leur facture d’acompte qui peut être salée. Et ce n’est pas parce qu’on fraude aujourd’hui qu’on le découvre directement demain“,
Des contrôles aléatoires
Les techniciens de Sibelga sont tous sensibilisés aux fraudes aux compteurs – qui peuvent être très bien réalisées avec, par exemple, de nouveaux scellés apposés de façon très professionnelle – pendant leurs formations. A côté de cela, des équipes d’experts du gestionnaire du réseau de distribution effectuent aussi des contrôles aléatoires ou plus ciblés quand ils suspectent des fraudes à un endroit précis. “Si on remarque que des données ne collent plus au niveau de la consommation d’un client, s’il y a des incohérences, des signaux d’alarme se mettent en place et on va vérifier sur place“, explique Johan De Bruyn.
Quelles sont les sanctions financières encourues ?
Lorsqu’ils détectent une arnaque, les gestionnaires de réseau estiment le volume d’énergie fraudée et le facturent au client fautif en prenant les dispositions qui s’imposent. Des frais administratifs fixes sont automatiquement dûs. Ils s’élèvent à environ 900 euros à partir du 1er janvier. “Outre une pénalité administrative, toute consommation frauduleuse sera facturée à un tarif équivalent au double du prix au kilowattheure (kWh) moyen sur le marché de l’énergie à l’instant T“, détaille le porte-parole de Sibelga. “ Vu les prix élevés de l’énergie à l’heure actuelle, la note peut donc être très salée par rapport à ce qu’un client aurait dû payer à son fournisseur sans frauder.“
Par ailleurs, la somme grimpera encore en cas de dommage aux installations de comptage et/ou au raccordement. Le GRD facturera au client l’ensemble des frais auquel il doit faire face. C’est-à-dire les frais techniques, ainsi que de remise en état du compteur et de remise en service du raccordement électrique ou au gaz naturel. Cette dernière opération ne sera effectuée que si toutes les conditions sont respectées, explique le site KillMyBill.be
Impact sur la collectivité
Mais ce n’est pas tout. La pratique illicite est également dommageable pour les autres consommateurs qui s’acquittent honnêtement de l’entièreté de leurs factures. L’énergie distribuée, mais non payée engendre inévitablement des pertes pour les gestionnaires de réseaux (GRD). Pour récupérer ces sommes, ils doivent augmenter leur rémunération qui n’est autre que les coûts de distribution facturés à tous les titulaires d’un contrat de fourniture régulier.
“La collectivité paie aussi ces frais, nous confirme Johan De Bruyn, car cela rentre dans nos pertes d’énergie, mais dans une moindre mesure. Nous essayons de récupérer au maximum cet argent via des amendes auprès des fraudeurs. In fine, cela n’a donc presque pas d’impact sur les tarifs de distribution qui sont établis, rappelons-le sur 5 ans. Mais quelqu’un qui fraude doit quand même savoir que la collectivité sera punie par son action.”
En plus d’amendes salées, ces fraudes entraînent des risques de sécurité pour les infrastructures et pour les personnes qui les commettent. “On ne sait jamais exactement ce que les gens chipotent avec leur compteur électrique, une électrocution est possible tout comme des fuites de gaz, cela peut être dangereux”, avertit Johan De Bruyn.
A l’avenir, avec le déploiement du nouveau compteur intelligent, la fraude au compteur sera plus compliquée. Les irrégularités dans les consommations sont effet plus facilement détectables sur les compteurs intelligents que sur les anciens compteurs électromécaniques. “Le truc de l’aimant apposé sur le compteur que vous mentionnez n’aura pas le même effet“, nous confie le porte-parole de Sibelga, en évitant de donner plus de précisions techniques.
Il fraude pendant 18 ans, il doit 96.000 euros d’indemnités à Ores
Dernière preuve en date qu’une fraude au compteur peut coûter cher: le tribunal correctionnel d’Eupen a condamné le 12 décembre dernier un habitant de Raeren à une peine de six mois de prison et 1.600 euros d’amende. Le prévenu a été reconnu coupable d’une manipulation de son compteur électrique de manière à ce que ses consommations ne soient pas comptabilisées. Le préjudice porte sur une période de plus de 18 ans.
L’homme, aujourd’hui âgé d’une septantaine d’années, dispose d’un atelier dans lequel il effectue de petits travaux. Tant la consommation de l’individu, qui vit seul, que son chauffage et celle de son atelier n’étaient pas comptabilisés correctement. “Le compteur a été relevé une dernière fois en avril 2002. Depuis, les consommations indiquées étaient anormalement basses pour une personne vivant seule”, avait indiqué la partie civile, l’opérateur Ores.
Il doit, par ailleurs, indemniser l’opérateur Ores à hauteur de 96.000 euros.
Comment faire baisser “légalement” sa facture d’énergie
Il existe des moyens efficaces et légales pour réaliser des économies sur sa facture d’électricité et/ou de gaz. Le site KillMyBill.be en évoque quelques-uns.
Changer d’offre et éventuellement de fournisseur : pour payer moins, il faut bien comparer les offres d’électricité et de gaz. Pour ce faire, plusieurs comparateurs en ligne agréés par la CREG existent comme Comparateur-energie.be ou Monenergie.be ou encore le CREG Scan. Ils permettent de profiter des promotions des différents fournisseurs présents sur le marché et de suivre régulièrement les tarifs à la hausse ou à la baisse. La résiliation d’un contrat d’énergie est facile et gratuite. Il ne faut donc pas hésiter à en changer pour une offre plus avantageuse.
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Adopter les bons réflexes : en utilisant les programmes “éco” des appareils les plus énergivores, en s’équipant de multiprises avec interrupteurs, d’ampoules économiques et en évitant de surchauffer son logement (16°C suffisent dans les chambres, 19°C dans le salon).
Vérifier quel type de compteur est le mieux adapté : Le tarif bihoraire peut être plus intéressant pour certains ménages. En faisant fonctionner les électroménagers pendant les heures creuses, il est possible de bénéficier d’un prix du kilowattheure attractif.
Ajuster sa consommation : grâce à des compteurs intelligents, il est possible de surveiller sa consommation en temps réel afin de réagir en conséquence si on la voit grimper.
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