Construction: 5.000 pertes d’emploi en 2015, malgré une hausse inattendue des activités

© Sébastien Cruyt

Le nombre d’emplois salariés perdus en 2015 s’élève à 5.000, selon des chiffres communiqués jeudi par la Confédération de la Construction. Les bonnes conditions climatiques au quatrième trimestre ont cependant tiré le bilan des activités à la hausse.

Parallèlement, le nombre de déclarations pour des activités exercées par des travailleurs étrangers détachés dans le secteur de la construction (dites Limosa) a bondi en un an de 25%, passant de 314.000 en 2014 à 394.000 en 2015. Depuis 2011, la perte d’emplois salariés atteint 19.000. Dans l’hypothèse où une mission de détachement correspond en moyenne à 23 jours de travail, les travailleurs étrangers détachés représentent actuellement un volume d’emplois de 41.000 équivalents temps plein, contre 16.000 en 2011, selon un calcul de la Confédération.

Le recours accru à la sous-traitance étrangère est entré dans une phase structurelle et a même tendance à s’accélérer, selon Robert de Mûelenaere, administrateur délégué de la Confédération de la Construction. “On arrive à un point de non-retour,” met-il en garde. “Et nous n’évoquons ici qu’une concurrence tout à fait légale, permise par l’Europe, et non le dumping social”, précise-t-il.

Le Bureau du Plan table sur une augmentation des emplois salariés dans le secteur de la construction de 14.000 unités pour la période 2016-2019. Le secteur de la construction prévoit, lui, une perte de 26.000 emplois d’ici la fin de la législature, selon un scénario “optimiste” mais à politique inchangée. Soit, une différence de 40.000 entre les deux scénarios, qui coûterait au Trésor belge 1,3 milliard d’euros (compte tenu d’un manque à gagner évalué à 22.000 euros en matière de recettes financières et parafiscales et d’un coût chiffré à 11.000 euros en matière de chômage, par perte d’emploi), souligne la Confédération de la Construction.

Le secteur réclame en urgence l’application de mesures auprès du gouvernement fédéral. “Il y va de l’intérêt collectif et pas uniquement de celui d’un secteur”, défend Robert de Mûelenaere. “La construction s’est vue octroyer plus de 600 millions d’euros en vue de baisser les coûts salariaux et voir restaurée sa compétitivité. Mais quand cette mesure entrera-t-elle en vigueur? En 2020? Il sera alors trop tard”, déclare-t-il.

La Confédération de la Construction estime que les marges des entreprises de la construction sont inférieures à 4% et que nombre de celles-ci sont donc menacées. La concurrence étrangère déloyale aggrave la pression sur les prix, les ouvriers détachés coûtant 30% moins cher, dénonce-t-elle. La Confédération craint par ailleurs un désintérêt des élèves en Belgique pour les métiers de la construction en raison de ce sombre avenir pour les salariés.

Le nombre d’indépendants dans le secteur a, lui, augmenté en 2015, de 1.700 unités. Le secteur de la construction compte en Belgique près de 200.000 salariés, dont près de 160.000 ouvriers, et près de 75.000 indépendants.

Hausse inattendue des activités en 2015

Par ailleurs, les activités dans le secteur de la construction ont connu une hausse de l’ordre de 1,6% en 2015, selon des chiffres et des extrapolations de la Confédération de la Construction. Ce bilan provisoire est plus favorable que celui attendu par les experts. La Confédération de la Construction et le Bureau du Plan avaient tablé sur une quasi stabilisation de l’activité. Les bonnes conditions climatiques enregistrées au quatrième trimestre ont probablement tiré le bilan à la hausse.

La construction de logements neufs a progressé de l’ordre de 2 à 3% en 2015, soutenue par la forte hausse du nombre de permis de bâtir octroyés en 2014 dans cette branche. Le nombre de ‘logements autorisés’ en 2015 devrait en revanche fortement baisser, probablement de plus de 10%. Le nombre de logements qui sortiront de terre en 2016 devrait logiquement connaître un net recul, de l’ordre de 10%.

En ce qui concerne la branche du non-résidentiel, l’activité a reculé de l’ordre de 2 à 3%. Le volume de nouveaux bâtiments non-résidentiels autorisé a fortement diminué en 2013, pour se stabiliser en 2014. Le volume de bâtiments non résidentiels autorisé en 2015 a en revanche fortement progressé, d’environ 10%, ce qui est de bon augure pour 2016.

En matière de rénovations, l’activité a progressé de près de 2% contre plus de 2,5% en 2014. La hausse, depuis le 1er janvier 2016, de la TVA, de 6 à 21%, pour les rénovations des bâtiments de 5 à 10 ans, a contribué à cette progression enregistrée en 2015.

Les entreprises de génie civil auraient enregistré en 2015 une hausse de “quelques pour cent”, contre toute attente. Le nombre d’adjudications pour des travaux de génie civil aurait augmenté de 11% et les investissements publics de 3,7%, selon des extrapolations de la Confédération de la Construction. Le secteur s’attend à une légère hausse pour cette branche en 2016.

Pour 2016, l’activité du secteur de la construction, toutes branches confondues, devrait à nouveau progresser, grâce essentiellement à la rénovation et à la construction de nouveaux bâtiments non résidentiels.

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