La pire inflation de la zone euro : l’indexation des salaires, à nouveau sur le banc des accusés
Relativement passée inaperçue, l’inflation belge du mois de mai est la plus importante de toute la zone euro, selon les derniers chiffres d’Eurostat. À 4,9%, quand la moyenne tourne à 2,6%. Régulièrement suspecte, l’indexation automatique des salaires semble finalement jouer contre la baisse de l’inflation.
Statbel, qui a sa propre comptabilité, mentionnait une inflation de 3,36%, en mai. Mais le Bureau du plan, qui établit des prévisions, voit cette inflation encore grimper le mois prochain, n’atteignant pas l’objectif de 2% avant le mois de mars 2025. Sur toute l’année 2024, cette inflation devrait se maintenir à 3,1%.
Bref, l’inflation nous colle un peu aux basques. C’est surtout vrai quand on regarde les chiffres harmonisés au niveau européen. L’inflation belge est en hausse, à 4,9%. Aucun pays ne fait pire.
Comme partout, l’inflation a surtout été portée par les prix de l’énergie, ces dernières années. En Belgique, le taux annuel affichait 9,59% en 2022 et 4,06% en 2023. Le pic de l’inflation a même dépassé les 12% en octobre 2022. Mais une grande partie de cette inflation a été compensée par le mécanisme de l’indexation automatique. Une manière, presque unique au monde, de rendre du pouvoir d’achat aux citoyens belges et de booster, dans le même temps, la consommation intérieure. Début 2023, les salaires des fonctionnaires et d’une majorité de salariés ont ainsi augmenté de plus de 10%, contre seulement 4,5% en France, par exemple.
Les organisations patronales et les entreprises ont évidemment pointé du doigt l’augmentation du coût salarial, qui menaçait de rejaillir sur les prix. C’est la fameuse boucle prix-salaires, qui, avait-on cru, ne s’était pas matérialisée en 2023. En effet, fin de l’année dernière, la Belgique affichait le taux d’inflation le plus bas de toute la zone euro.
Alors que le débat est relancé en France, à l’occasion de la campagne électorale européenne, l’indexation automatique a-t-elle finalement eu un effet de retard ? C’est ce que laisse penser l’économiste Éric Dor, de l’IESG Lille.
Effet mécanique, énergie et croissance annuelle des salaires
Les bons chiffres de l’inflation belge, fin de l’année dernière, étaient à relativiser. Car l’inflation bénéficiait d’un effet mécanique de par sa comparaison sur base annuelle. En effet, un an plus tôt, l’indice des prix à la consommation était stratosphérique.
Ensuite, l’inflation belge a pu bénéficier d’un sérieux coup de mou des prix de l’énergie, qui expliquent d’ailleurs, en partie, le regain d’intensité aujourd’hui, puisque l’inflation des prix de l’énergie était à 11,17% au mois de mai. Alors qu’elle était négative, il y a quelques mois.
Mais l’énergie n’explique pas tout. Car l’inflation de base, sans les prix de l’énergie, était encore de 3,3% en Belgique, en mai, selon Eurostat. Soit au deuxième rang de la zone euro, derrière la Croatie.
La hausse des salaires est en tout cas un point d’attention pour la BCE, qui décidera de baisser ou pas ses taux d’intérêt, ce jeudi. Pour la Belgique, la hausse des salaires est passée, mais la zone euro suit à son tour, avec une hausse moyenne du salaire de 4,69% au premier trimestre 2024, par rapport à l’année dernière.
Saut d’index
Il n’existe pas encore d’étude comparative sur l’influence de l’indexation sur l’inflation, ces dernières années. On sait toutefois que dans le temps, l’écart salarial avec les pays voisins finit par se résorber, que ce soit par des augmentations salariales à l’étranger ou par des sauts d’index, chez nous, qui ont lieu à peu près tous les 10 ans.
Notre sondage l’a montré, une très grande majorité de Belges est logiquement pour le maintien de l’indexation automatique des salaires. Mais un tout récent sondage de VTM Nieuws montre qu’une majorité de Flamands n’est pas opposée à un saut d’index. 56% pour être précis.
À plus long terme, la FEB, la Fédération des entreprises de Belgique, ne plaide pas pour un nouveau saut d’index, mais pour la suppression pure et simple de l’indexation automatique des salaires, ainsi que de la loi sur la norme salariale (loi de 1996). Pour laisser les entreprises négocier directement avec leurs travailleurs, comme partout en Europe, à l’exception des Pays-Bas et de Malte.
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