Bon Van Peteghem : mais que va faire l’Etat de tout cet argent ?

Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V). BELGA
Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Plus de 12 milliards d’euros souscrits après trois jours (6,24 milliards via les banques, 6 milliards directement via le site de l’agence de la dette), le bon Van Peteghem à un an est déjà rentré dans l’histoire.

Il paraît acquis aujourd’hui que le bon d’Etat à un an lancé par notre grand argentier Vincent Van Peteghem est un succès historique. Certes, on ne peut pas exclure que ces chiffres soient quelque peu gonflés parce que certains épargnants ont peut-être souscrit le même montant à la fois via les banques et via l’agence de la dette. On ne saura vraiment s’il y a des doublons qu’au moment du paiement, lundi prochain. Mais comme la souscription ne se termine que ce vendredi, on peut sans grande crainte estimer que la récolte devrait se situer entre 15 et 20 milliards, soit bien plus que prévu par les équipes du ministre des Finances.

Bonne nouvelle pour l’Etat

Est-ce que c’est une bonne nouvelle pour les finances de l’Etat ? Oui, pour au moins deux raisons. La première est que l’Etat avec ce bon d’Etat se finance relativement bon marché. Il paie aux épargnants sur ce bon d’État à un an un intérêt de 3,30%. C’est moins que ce qu’il doit payer aux grands investisseurs sur la même échéance : le certificat du trésor sur 12 mois se traite à 3,65%.

Mais c’est aussi une bonne nouvelle parce que cela confirme au marché financer que l’État belge peut s’adresser aux particuliers si jamais les investisseurs professionnels, pour une raison ou l’autre, n’avaient plus d’appétit pour la dette belge. Autrement dit, l’Etat, parce qu’il peut s’abreuver à divers robinets, ne devrait pas se retrouver en manque de liquidités. Et cette force lui permet de demander des taux d’intérêt plus faibles.

Que faire de tout cet argent ?

En revanche, cet afflux d’argent ne change rien au problème budgétaire de l’Etat, qui dépense trop par rapport à ses recettes. Le fait que les Belges prêtent volontiers au gouvernement ne dédouane pas ce dernier de devoir faire des économies.

Que va faire l’Etat de cet argent non prévu ? L’agence de la dette devrait donner davantage de précision sur l’utilisation de cette somme une fois que l’opération sera bouclée c’est-à-dire au début de la semaine prochaine. Mais on peut déjà dire que cela aura des répercussions sur le plan de financement de l’Etat. L’agence de la dette, pour limiter les risque, emprunte à court, moyen et long terme. Cette arrivée subite d’argent pour un an aura comme conséquence que certaines émissions qui étaient destinées à financer le remboursement de dettes à court terme arrivant à échéance seront annulés ou seront moindres que prévu. L’autre grande conséquence est que, dans un an, quand le bon Van Peteghem arrivera à échéance, l’Etat devra avoir sous la main une quinzaine de milliards d’euros pour rembourser les épargnants.

Un impact sur le bénéfice des banques

Et puis, un autre effet de ce succès touche les banques. Il est difficile de dire précisément quel sera l’impact du bon Van Peteghem sur le secteur bancaire, mais, à la très grosse louche, on peut en avoir une idée approximative.

Les banques financent leurs activités en partie grâce aux dépôts des clients, qui leur procurent de l’argent bon marché. Si une partie de ces dépôts s’en va, les banques doivent trouver de l’argent ailleurs, soit auprès d’autres banques en surplus de liquidités, soit auprès de la banque centrale. Mais cet argent leur coûtera bien plus cher. Le principal taux de refinancement de la BCE est aujourd’hui à 4,25%.

Si les banques perdent une dizaine de milliards d’euros qui leur procuraient un financement bon marché (sur lequel, disons, elles payaient un intérêt de 1%), elles devront donc aller chercher sur le marché en payant davantage (disons, grosso modo, un taux de 4%). Autrement dit, les banques devront payer sur ces liquidités 3% de plus qu’avant. Et 3% de 10 milliards, c’est 300 millions. L’arrivée du bon Van Peteghem pourrait donc peser de plusieurs centaines de millions sur le bénéfice du secteur bancaire du pays.

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