69% de réussite à l’examen pratique à Eupen contre seulement 49% à Bruxelles: les Belges ne sont pas égaux devant le permis de conduire
L’égalité d’accès au permis de conduire est-elle garantie en Belgique ? Trends-Tendances a tenté de répondre à la question en analysant les taux de réussite dans les trois Régions du pays afin de dégager quelques tendances.
Pour savoir si les examens du permis de conduire sont réellement objectifs en Belgique, nous avons procédé à une analyse des données fournies par les Régions afin d’établir une comparaison des taux de réussite selon différents critères, tels que l’âge et le genre des candidats, ou même le lieu où ils passent leur permis… Cette première autopsie devait nous permettre de relever plusieurs observations et ainsi guider notre réflexion pour questionner les institutions compétentes.
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À chaque Région sa propre méthode
À l’origine compétences fédérales, la formation au permis de conduire et la gestion des examens sont passées aux régions. « Le Code de la route étant en partie régionalisé, il va de soi que les questions d’examen diffèrent aussi en partie selon les régions », nous expliquent les autorités wallonnes. Du coup, si chaque Région a son propre fonctionnement, sa propre méthode d’évaluation, ses propres questionnaires…, on ne peut pas dire que les Wallons, Bruxellois et Flamands ont les mêmes conditions d’accès au permis et donc les mêmes chances de réussite.
L’analyse des résultats nous le montre: chaque Région a ses faiblesses et les taux de réussite ne sont certainement pas les mêmes du nord au sud de la Belgique.
Une matière, plusieurs autorités compétentes
De manière générale, on distingue plusieurs acteurs:
– L’État fédéral: qui délivre le document officiel “Permis de conduire”.
– Les Régions: qui s’occupent de la réglementation du permis de conduire, à savoir l’entrée en vigueur de réformes et nouvelles règles pour la formation à la conduite et les examens.
– Les prestataires/sociétés privées: qui gèrent les centres d’examen. En Flandre, on retrouve quatre de ces sociétés privées pour 16 centres d’examen (Groep autoveiligheid, SBAT, KM et AIBV). À Bruxelles, on en a deux pour deux centres (Auto-contrôle technique SA et La sécurité automobile). Et enfin, la Wallonie en compte deux pour 14 centres d’examen (Autosécurité et AIBV).
– Les centres d’examen: qui font passer les examens.
Des incertitudes à Bruxelles
À Bruxelles, on constate que l’examen pratique est une épreuve vraiment compliquée pour de nombreux candidats. La Région obtient les pires résultats de Belgique pour ces trois dernières années (en 2022, elle recense 49% de réussites, pour 51% en Flandre et 56% en Wallonie). Et lorsque l’on questionne les autorités compétentes, les réponses à nos questions restent nébuleuses. La zone 30 a-t-elle une influence? « On ne sait pas le dire ». La filière choisie (filière libre , autoécoles, etc.) impacte-t-elle les résultats? « Les centres d’examen ne gardent pas ces informations, nous n’avons, de ce fait, pas de chiffres à communiquer. » Plusieurs données manquent et nos constats semblent parfois prendre les autorités au dépourvu… Le manque de certaines données est interpellant: comment peut-on suivre le sérieux du travail des centres d’examen si l’on n’a pas des données objectives à analyser?
Il y a un clair manque d’uniformité entre les chiffres des différentes autorités
Une stabilité qui démontrerait une certaine impartialité en Flandre ?
En Flandre, les taux de réussite semblent suivre une trajectoire rectiligne, à peine ébranlée par le Covid… On peut le dire, les résultats sont constants: les taux de réussite pour l’examen théorique baissent d’année en année, alors que ceux pour le pratique ne varient pas vraiment. De quoi démontrer une plus grande uniformité des examens entre les différents centres? Cela reste difficile à prouver puisqu’on refuse de nous donner les données par centres. Quoi qu’il en soit, pour ce qui est du suivi de la procédure, les autorités flamandes obtiennent une bonne note: moins de délais pour obtenir nos réponses, des chiffres mieux présentés et souvent plus clairs, ils semblent avoir les données à porte de main et ne rechignent pas (trop) à les communiquer.
Un manque de recul en Wallonie
Enfin, pour la Wallonie, on constate que les candidats obtiennent de meilleurs résultats pour l’examen pratique que pour le théorique. Un contraste surprenant étant donné que le Code de la route est essentiel pour la réussite de l’examen de conduite. Les futurs conducteurs wallons ont-ils toujours éprouvé des difficultés pour l’examen théorique ou est-ce récent? Ont-ils toujours été bons à l’examen pratique? Les différentes mesures prises par les autorités au fil des ans ont-elles impacté les taux de réussite aux examens? De manière générale, il est difficile de tirer de réelles conclusions, car la Région ne dispose pas de données avant 2020. Impossible donc de savoir si le Covid a eu un impact sur le taux de réussite du permis en Wallonie, d’extraire des tendances sur le long terme ou de comparer en détail les Régions. Un manque de perspective qui marque une fois de plus un défaut de suivi et de contrôle de cette branche de la mobilité…
Un très clair souci d’uniformité
D’autre part, nos recherches nous ont confrontés à un obstacle qui montre à quel point cette compétence varie d’une Région à l’autre: il y a un clair manque d’uniformité entre les chiffres des différentes autorités.
Quand la Wallonie accepte de nous fournir les taux de réussite par centre, elle ne remonte pas plus loin qu’en 2020. La Flandre, de son côté, refuse de nous fournir des taux par centre, mais nous autorise à consulter leurs données par société/prestataire (quatre sociétés pour 16 centres d’examen), de 2016 à aujourd’hui. Pour Bruxelles, seul le taux de réussite global de la Région nous sera communiqué, avec une ventilation par âge et genre des candidats, de 2014 à aujourd’hui. Difficile donc de comparer objectivement les taux de réussite de chaque Région.
Des examinateurs contrôlés, mais…
Comparer les taux de réussite pour épingler les incohérences, c’est évidemment important. Mais pour juger de la validité de toute cette procédure, il faut aussi s’intéresser aux évaluations et contrôles effectués par les Régions. Les examinateurs et les centres sont-ils contrôlés régulièrement? On nous affirme que oui, dans les trois Régions. À Bruxelles, on nous explique que les examinateurs « ont une épreuve écrite, puis un oral et enfin un examen voie publique » sans nous apporter plus de précisions, si ce n’est que leur agrément est à vie. En Wallonie, les examinateurs doivent suivre une formation avant de passer les examens théorique et pratique. Leur agrément n’a pas de date de fin de validité, mais des sanctions sont prévues en cas de non-respect des dispositions prévues par la loi: agrément suspendu pour une durée de huit jours à un an voir carrément retiré. Même procédure en Flandre : « Les cours de préparation aux examens sont organisés par Goca-Vlaanderen et les examens se déroulent en présence d’un inspecteur du ministère flamand de la Mobilité et des Travaux publics, qui délivre l’accréditation », explique Steven Raes, de la Goca.
Permis de conduire belge
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