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La BCE sur les traces de la Fed ?

Le secteur bancaire joue un rôle crucial dans l’économie européenne. En effet, les trois-quarts du financement des entreprises passent par le crédit bancaire, soit beaucoup plus qu’aux Etats-Unis. Dès lors, le secteur bancaire est un maillon-clé dans la chaîne de transmission de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE).

Le secteur bancaire joue un rôle crucial dans l’économie européenne. En effet, les trois-quarts du financement des entreprises passent par le crédit bancaire, soit beaucoup plus qu’aux Etats-Unis. Dès lors, le secteur bancaire est un maillon-clé dans la chaîne de transmission de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Depuis le début de la crise, celle-ci n’a cessé d’explorer de nouvelles voies pour maintenir les liens qui unissent l’économie et le secteur bancaire d’une part, et ce dernier et la BCE d’autre part.

En temps normal, ce dernier lien est assez ténu : lorsqu’une banque a besoin de liquidités pour ses activités de prêts à l’économie, elle se dirige a priori vers une autre banque, qui pour sa part en dispose de “trop”. La BCE n’intervient alors qu’à la marge, pour glisser dans les rouages de l’économie la goutte d’huile supplémentaire qui lui permet de croître.

Pallier le manque de confiance… et de liquidités

Cependant, le manque de confiance dans le secteur financier a changé la donne. Les banques en manque de liquidités ne trouvent pas de contrepartie “classique”, car les banques en surplus préfèrent les conserver. Dès lors, la BCE ne peut se contenter de fournir des liquidités à la marge, elle en devient au contraire le fournisseur principal. Le lien entre le secteur bancaire et la BCE est donc renforcé. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre les montants astronomiques évoqués dans la presse (on parle souvent d’octroi de liquidités, mais en fait, ce sont des prêts garantis), et non, bien entendu, comme des recapitalisations directes et encore moins comme des dons.

Fin novembre dernier, la BCE a annoncé l’organisation de trois opérations exceptionnelles de refinancement. Moyennant des garanties (majoritairement des obligations d’Etats), la BCE accepte de prêter des liquidités aux banques qui en font la demande, sans limite, pour une durée de trois ans et à un taux de l’ordre de 1 %. La première opération de ce genre a eu lieu en décembre dernier et s’est soldée par le prêt de 489 milliards d’euros. Suite à cette opération, différents indicateurs de stress laissent penser que suffisamment de liquidités sont à présent en circulation dans l’économie pour assurer son financement.

Pourquoi aller plus loin ?

Pourtant, à en croire un récent article du Financial Times, on pourrait atteindre 1.000 milliards d’euros lors de la prochaine opération du 29 février prochain. Mettre davantage d’huile dans les rouages du système économique n’a plus vraiment de sens et n’est probablement pas la raison principale du succès attendu des futures opérations. Un coup d’oeil aux rendements obligataires actuels permet de formuler une autre hypothèse. Les obligations à trois ans de l’Espagne, de l’Italie ou encore du Portugal offrent en effet un rendement qui dépasse 3 %. Dès lors, en empruntant à la BCE au taux de 1 % sur la même durée, le gain potentiel dépasse 2 % par an. Une telle opération reste pourtant osée, car le risque de défaut, même partiel, de ces pays est non nul. Cela devrait donc refroidir la plupart des banques du coeur de la zone euro. Par contre, l’opération est plus alléchante pour les banques de la périphérie, qui sont de toute façon déjà très exposées à la dette de leur pays. Un gain d’intérêt leur permettrait de se refaire une santé. Mais les différents Etats en profiteraient également, car l’engouement pour leurs obligations réduirait leur coût de financement. Alors pourquoi pas ?

Les prochaines opérations de refinancement proposées par la BCE s’apparenteront donc à peu de choses près à l’assouplissement quantitatif pratiqué par la Réserve fédérale américaine depuis le début de la crise : augmenter la masse monétaire tout en réduisant les rendements obligataires. Le modus operandi est néanmoins très différent, car il maintient la spécificité européenne, c’est-à-dire l’utilisation du système bancaire européen comme intermédiaire de la politique monétaire.

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