Carrefour, Accor, Sara Lee : pourquoi les scissions ont la cote

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Carrefour réfléchit à mettre en Bourse ses activités foncières et sa branche hard discount. Sara Lee s’apprêterait à se scinder. ArcelorMittal vient d’introduire en Bourse sa division acier inoxydable… Les scissions sont très tendance chez les grands groupes et séduisent les investisseurs.

Les scissions sont-elles vraiment plus tendance qu’avant ?

Carrefour qui réfléchit à mettre en Bourse ses activités foncières et sa branche hard discount, Sara Lee qui s’apprêterait à se scinder en deux sociétés indépendantes, ArcelorMittal qui vient d’introduire en Bourse Aperam, sa division d’acier inoxydable… Les exemples, en tous cas, se multiplient.

Ces entreprises sont en train de sortir de la torpeur de la crise. Tout comme elles renouent avec les fusions et acquisitions, elles cherchent à se séparer de certaines activités pour créer une dynamique nouvelle et profiter d’une conjoncture boursière plus favorable.

“Avec une demande toujours faible mais des marges importantes, les entreprises cherchent de la croissance ailleurs, analyse Hervé Mangin, gérant chez Axa IM. Pour ce faire, elles cèdent ou mettent en Bourse des actifs. Il s’agit généralement de petites sociétés, qui n’appartiennent plus à leur coeur de métier ou qui ne sont pas assez valorisées.”

L’objectif ? Désinvestir cette activité pour réinvestir le subside ailleurs, dans des acquisitions notamment, ou choyer les actionnaires. Saint-Gobain pourrait en faire l’expérience, puisque l’entreprise songe à se séparer de Verallia, sa division d’emballage, fortement génératrice de cash mais trop éloignée de son activité principale.

Pourquoi les scissions sont-elles plébiscitées par les investisseurs ?

Les scissions sont souvent créatrices de valeur en Bourse, en tous cas à court terme. Selon une récente étude d’UBS, dévoilée mardi par le quotidien français La Tribune, les sociétés scindées afficheraient depuis 2000, en Bourse, une surperformance de 16 % sur un an par rapport au marché européen. Les sociétés mères, elles, progresseraient de 8 % de plus que ce marché.

Lundi, à peine les rumeurs sur Carrefour paraissaient-elles dans Le Figaro que l’entreprise affichait la plus forte hausse du Cac 40, l’indice vedette de la Bourse parisienne (+ 5,33 % après la publication du communiqué officiel). En juillet dernier, Accor a été divisé en deux entités, l’une consacrée aux services, Edenred, l’autre à l’hôtellerie, Accor. En l’espace de quelques mois, le cours de l’action a flambé, passant de 25,39 euros le 1er juillet à 51,58 euros hier mardi, si l’on additionne les cours d’Accord et Edenred.

“Une scission permet d’apporter plus de clarté sur le business model et obtient donc souvent la faveur des investisseurs, indique Hervé Mangin. Ceci est d’autant plus vrai depuis le début de la crise, où les entreprises qui ont choisi de se spécialiser ont davantage la cote.”

La preuve, les entreprises elles-mêmes, qui se sont relancées dans les grandes manoeuvres d’OPA, ont choisi d’acquérir des actifs stratégiques plutôt que financiers. Depuis quelque temps, certains groupes ont également remis en question leur stratégie de conglomérat. C’est le cas de PPR, qui a décidé de se recentrer sur le luxe et le sportswear. En 2009, Pinault-Printemps-Redoute a introduit en Bourse sa filiale CFAO, leader de la distribution automobile et pharmaceutique en Afrique, et annoncé fin 2010 la cession de Conforama. En trois ans, le titre a pris plus de 20 %.

Autre exemple en ce sens, le britannique Smiths Group, présent dans le médical et la détection, et qui pourrait, selon le management, céder sa division pharmaceutique.

N’est-il pas risqué de se séparer de certaines activités, comme l’immobilier ?

En la matière, il n’y a pas de règle absolue. “Une scission peut être souhaitable lorsque les activités scindées ne sont pas synergiques et qu’elles sont suffisamment autonome pour exister seules”, répond Sonia Bonnet-Bernard, associée gérante chez Ricol Lasteyrie.

Parfois, la demande pressante des actionnaires peut cependant conduire à des erreurs stratégiques. Depuis 2007, Bernard Arnault (groupe Arnault) et Sébastien Bazin (Colony Capital), les deux principaux actionnaires de Carrefour dont le titre a chuté de 27 % en trois ans, ne cachent pas leur intention de céder le patrimoine immobilier du géant mondial afin de recueillir les fruits de leur placement. Une stratégie qui revaloriserait peut-être ces actifs mais qui, à moyen terme, pourrait pénaliser le géant de la distribution.

“Dans ce secteur, les marges sont très faibles : sans la maîtrise de ses loyers, Carrefour risquerait de se retrouver dans une situation compliquée”, prévient Hervé Mangin, pour qui une mise sur le marché partielle serait moins risquée pour le groupe. “Lorsqu’une entreprise est trop dépendante de ses actifs immobiliers, leur cession n’est pas toujours souhaitable, même si le marché immobilier y est favorable”, renchérit Sonia Bonnet-Bernard.

Même si le marché de l’immobilier devrait offrir de juteux rendement en 2011, gare donc à la précipitation !

L’Expansion.com

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