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Doucement, la Belgique ! Ou plus vite ?

Le monde à l’envers. Mais dans le bon sens… si l’on peut ainsi s’exprimer. Présenté comme dur et même implacable avec les pays en difficultés, le Fonds monétaire international (FMI) propose au contraire à la Belgique d’y aller plus doucement que prévu en matière d’austérité. C’est en tout cas la lecture souvent faite de l’étude Belgium, consultation-staff report que le FMI a publiée la semaine dernière. Le Fonds recommande de réaliser un ajustement budgétaire annuel équivalant à 0,75 % du PIB. Il précise que ce rythme serait compatible avec la conjoncture économique du moment, qui est assez faible. La croissance attendue cette année n’est en effet que d’un bon pour cent. C’est plus qu’honorable au niveau de l’Union, mais historiquement faiblard. Le message semble donc être : allez-y mollo. Sachant que le FMI chiffre à 3,3 % du PIB l’effort encore à réaliser, l’équilibre budgétaire ne serait atteint qu’en 2019.

C’est tard, très tard. Dans le “programme de stabilité” annoncé en avril 2011 et qui prévalait toujours un an plus tard (on faisait semblant, en tout cas…) , le gouvernement belge promettait l’équilibre pour 2015. Mais dans quel contexte ? Le Bureau du Plan prévoyait à l’époque une stagnation en 2012, mais un joli rebond l’année suivante, avec un PIB en hausse de 1,4 %. Sympathique prélude à une croissance dépassant légèrement les 2 % en 2014. La réalité fut tout autre : après -0,1 % en 2012, la croissance n’est que symboliquement redevenue positive l’an dernier, à +0,2 %. Dans un tel environnement, de grands coups de hache dans le déficit budgétaire sont quasiment impossibles. A moins d’opérer des coupes sanglantes dans les salaires ou les retraites des fonctionnaires, par exemple, comme en Grèce ou au Portugal. Impensable chez nous, et du reste inutile.

Résultat de la mauvaise conjoncture de 2012 : le déficit budgétaire a dérapé à 4 % du PIB, venant de 3,7 % en 2011. Bel effort par contre l’an dernier, le déficit chutant à 2,7 %. Le 0,75 % annuel proposé par le FMI est très inférieur au gros pour cent d’amélioration signé l’an dernier, mais supérieur à la moyenne 2011-2013, qui n’est que de 0,5 %. Alors, le FMI nous incite-t-il vraiment à y aller mollo ou, au contraire, à faire mieux que durant les deux dernières années ? On peut ergoter. Le plus important reste que l’effort belge a été remarquable… et remarqué. Tout le contraire de la France, qui affichera encore 4 % de déficit cette année et 3,9 % l’an prochain, estime la Commission européenne, au point d’avoir été placée sous “surveillance renforcée”, comme la Slovénie. Une gifle…

C’est sur un autre plan que se situe la grande faiblesse de la Belgique : le coût du travail, pointe le FMI. Pas nouveau. Les chiffres de la Commission nous placent en tête, juste avant le Danemark, 27 % au-dessus de l’Allemagne et 81 % au-delà de la Grande-Bretagne. Dramatique ! Est-ce pour cela que notre pays patine en matière d’emploi ? L’étude du FMI met graphiquement en lumière un phénomène troublant. Au lendemain de la crise, l’emploi flanche un peu partout, mais assez faiblement en Allemagne et en Belgique. Il se redresse même assez rapidement dans ces deux pays, alors qu’il hésite, au mieux, en France et aux Pays-Bas. Pourtant, fin 2011, alors que l’Allemagne poursuit sur sa lancée, la Belgique décroche soudain, pour stagner comme les autres. Les mesures prises par le gouvernement, en partie sur le modèle de Berlin, ont donc été couronnées de succès, mais notre faiblesse structurelle a fini par prendre le dessus. En matière d’emploi, là, c’est clair : la Belgique doit aller plus vite dans ses efforts !

GUY LEGRAND Senior writer

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