Politique: non au rasage gratis, oui au discours vérité

Georges-Louis Bouchez (MR) et Paul Magnette (PS). © belga
Olivier Mouton

On risque de raser gratis tous azimuts en Belgique durant cette campagne électorale en vue des élections du 9 juin.

Le PS a sidéré la Flandre, dimanche 18 février, en proposant une semaine des 32 heures sans réduction de salaire, après avoir déjà avancé la promesse de salaire minimum à 2.800 euros. Mais le MR n’est pas en reste avec sa réduction fiscale de 8 milliards sur le travail, sans hausse d’impôts pour compenser. Dans le programme ambitieux des Engagés pour la santé, au fil de la transition juste voulue par Ecolo ou dans le combat contre la fraude promis par DéFI, il y a aussi des promesses qui volent. Et l’on ne parle même pas de la sempiternelle taxe des millionnaires du PTB.

Qui est vraiment dupe, alors que la prochaine législature promet surtout du sang et des larmes ? Avec le retour des règles budgétaires européennes, et en raison de nos déficits qui explosent, les différents niveaux de pouvoir devront surtout veiller à économiser. Pas de moins de 27 milliards à trouver sous une législature, près de cinq milliards par an : les électeurs attendent avant tout de savoir comment diable il sera possible de le faire sans augmenter une nouvelle fois la fiscalité? C’est ce discours vérité là que l’on est en droit d’attendre !

La lutte électorale s’annonce féroce dans un pays désormais coupé en trois. Notre sondage exclusif Kantar, réalisé pour Trends-Tendances et les autres magazines de Roularta, en atteste: le PS sauverait les meubles en restant premier en ­Wallonie, le PTB confirme un sondage paru il y a peu en mettant la main sur Bruxelles (au coude-à-coude avec le MR), tandis que le Vlaams Belang devance la N-VA en Flandre. Cerise sur le gâteau: une majorité de Flamands se déclare favorable à une participation de l’extrême droite au pouvoir. Comment réconcilier ces antagonismes? Là encore, les promesses “faciles” risquent de compromettre le dialogue indispensable au lendemain du scrutin, en enfermant les acteurs dans leurs belles paroles.

Notre sondage témoigne toutefois de priorités et de considérations socioéconomiques qui pourraient contribuer à un dialogue par-delà ces fractures. Le pouvoir d’achat et la sécurité sont clairement les deux priorités. Un impôt sur la fortune se justifierait si cela permet de baisser la fiscalité sur le travail. D’ailleurs, l’échec d’une réforme fiscale pèse clairement sur le bilan d’une coalition Vivaldi démonétisée auprès des Belges: seuls 28,4% d’entre eux seraient favorables à sa reconduction. Le temps d’un grand accord entre N-VA et PS est-il venu? Peut-être, avec un échange d’éléments veillant à “protéger” les citoyens, dans la rue et dans le portefeuille. Mais sans négociation institutionnelle, les Belges n’y voient certainement pas d’intérêt alors que leur situation financière les préoccupe. Ce ne sera possible… que si les uns et les autres abandonnent leurs postures.

Notre sondage exclusif vaut aussi par ce qu’il ne dit pas. La création d’emplois et d’activités reste loin des préoccupations principales des Belges, alors que c’est la seule issue pour relever la tête et combler les déficits. Pire, Wallons et Bruxellois ne considèrent pas vraiment que la situation budgétaire de leurs entités menace l’équilibre de la Belgique. Cet aveuglement sur la nécessité de mettre en place une dynamique économique créative et rigoureuse vient aussi des promesses en l’air et du manque de clarté de nos autorités. Seul un discours vérité permettra de passer à l’action. Mais sont-ils encore en capacité de le tenir ?

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