de Gaulle avait raison: les Etats n’ont pas d’amis, juste des intérêts 

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Amid Faljaoui

L’économie, c’est aussi de l’hypocrisie. Ou, pour citer le général de Gaulle, « les états n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts ». Il suffit pour s’en convaincre de regarder la hausse de l’or ou la politique des États-Unis.

Parlons de l’or, mais sous un angle moins habituel. On sait que le métal jaune se porte comme un charme. Il a même grimpé de 10% depuis le 7 octobre dernier, date du début du conflit entre le Hamas et Israël. Ce qu’on sait moins par contre c’est l’origine véritable de cette hausse de l’or. Les plus distraits argueront que cette hausse est normale puisque l’or a toujours été une valeur refuge en cas de guerre ou de tensions. C’est vrai, mais c’était moins le cas ces dernières années.

La vraie raison de la hausse du métal jaune aujourd’hui est plutôt à rechercher du côté des banques centrales. Elles achètent massivement – j’ai failli dire à la pelle –  de l’or. Les banques centrales qui en achètent le plus, et qui sont donc derrière cette hausse, sont celles des pays comme la Chine ou d’autres pays qui se méfient des États-Unis. Ces pays ont perdu confiance dans le dollar depuis que les États-Unis et leurs amis européens n’ont pas hésité à mettre en place des sanctions financières contre la Russie.

La Chine et sa banque centrale, mais aussi d’autres pays asiatiques et du Moyen-Orient, veulent depuis diversifier leurs avoirs, leurs devises et ne plus tout miser sur le dollar. Or, le métal jaune est la forme suprême de cette diversification.

Si tous ces pays rêvent de se libérer du dollar, il y a une marge entre le songe et la réalité. Et cette réalité est que le billet vert reste encore, et de loin, la monnaie la plus utilisée dans le monde. L’économie c’est donc aussi savoir anticiper d’éventuels ennuis avec la première puissance du monde.

Dans cette optique, Poutine est le canari de la mine. Celui qui avertit les autres pays de ce qui pourrait leur arriver. Par exemple si la Chine envahit Taïwan. Mais l’économie, c’est aussi de l’hypocrisie. Ou, pour citer le général de Gaulle, « les états n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts ». Il suffit pour s’en convaincre de regarder la politique des États-Unis. L’ancien président Georges Bush avait fait la liste il y a quelques années des pays qu’il considérait comme faisant partie de l’axe du mal. Sur cette liste, on retrouvait l’Iran et le Venezuela. Or, aujourd’hui, Joe Biden ferme les yeux sur les exportations de pétrole de l’Iran. Des exportations qui même si elles sont faibles permettent au régime en place de respirer. Et si l’Iran n’intervient pas en ce moment dans la guerre Israël-Hamas, c’est qu’il est en train de négocier quelque chose. Selon un spécialiste de la géopolitique, l’Iran est ce qu’on appelle un pays du « seuil ». En clair, s’il n’a pas encore la bombe nucléaire, il n’est pas très loin de l’avoir. Et donc, malgré sa rhétorique propalestinienne, l’Iran ne  voudra sans doute pas mettre en péril des années d’effort pour l’obtenir. L’Iran, pays du jeu d’échecs, sait pertinemment que la bombe atomique est son assurance-vie. Comme le Pakistan ou la Corée du Nord, l’Iran ne peut ignorer que quand on a la bombe nucléaire, les Américains ne cherchent plus à renverser votre régime. Une bonne raison de rester prudent.

Et c’est toujours les intérêts qui priment sur l’amitié quand Joe Biden renoue avec le Venezuela, ancien ennemi juré des États-Unis. Il ne le fait pas parce que le Venezuela s’est converti cette semaine aux valeurs américaines, mais uniquement parce que les États-Unis ont besoin du pétrole Vénézuélien. Et qu’importe si cela met le Venezuela en porte à faux avec l’Iran et la Russie, deux de ses alliés. C’est donc ça la RealPolitik. D’abord et toujours de l’économie.

Donc, si un jour vous ambitionnez de devenir Premier ministre de la Belgique ou président de la République française, il faudra appliquer la maxime du philosophe Nicolas de Chamfort « En vivant et en voyant les hommes, il faut que le coeur se brise ou se bronze.» A ceci j’ajouterai qu’il faudra également apprendre à avaler une couleuvre chaque matin que Dieu fait. C’est aussi pour ça que je ne fais pas de politique, j’ai l’estomac trop sensible. Et vous, vous en pensez quoi ?

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