Pension complémentaire: en tranches ou en un seul morceau?
Une assurance groupe vous permet de vous constituer une épargne extralégale en complément de votre pension légale. Formellement, il s’agit d’une police d’assurance-vie que souscrit l’employeur pour son personnel. Le capital constitué peut être versé en une fois ou en tranches. Un choix qui a des conséquences.
Cet été, le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) a annoncé son projet de grande réforme fiscale. Afin d’élargir l’accès à l’épargne pension à tous les salariés et de garantir la viabilité du système, il a notamment manifesté son intention de supprimer graduellement le traitement préférentiel des versements d’assurance groupe sous la forme de capital. Qu’est-ce à dire? Pour rappel, une assurance groupe, c’est cette pension extralégale souscrite par le biais de votre employeur et qui vous donne accès, au moment de votre départ à la retraite, à un certain capital constitué. En principe, vous pouvez alors demander le versement du capital en question en une fois ou en plusieurs tranches. Dans ce dernier cas, on parlera de rente périodique.
Quelles options?
Aujourd’hui, la loi n’impose aucune condition au versement de l’assurance groupe. C’est donc les termes du contrat qui déterminent les différentes possibilités. La plus fréquente est le versement unique du capital. Selon la fédération des assureurs Assuralia, c’est le choix de neuf salariés sur dix. “Si votre assurance groupe prévoit l’attribution du capital sous la forme d’une rente périodique, c’est ce même règlement qui détermine la périodicité, explique Sammy Bogaert, conseiller en assurance-vie chez Assuralia. Généralement, la rente sera mensuelle ou trimestrielle. En principe, vous la toucherez toute votre vie mais dans ce cas, vous ne pourrez pas disposer du capital constitué. A l’inverse, même si votre assurance groupe ne prévoit qu’un versement unique du capital, vous avez légalement le droit de le faire convertir en une rente viagère. Mais dans ce cas aussi, vous perdrez le droit à disposer du capital.” Détail qui a son importance: l’inflation. Lorsqu’elle est élevée, elle grignote peu à peu votre épargne. Mais aussi votre rente, qui ne peut pas être indexée sur la hausse générale des prix. “Les polices d’assurance-vie peuvent cependant prévoir une indexation à un pourcentage fixe, remarque Sammy Bogaert. Mais pour un capital de départ identique, cela se traduira par une rente plus faible au début du versement par rapport au montant que vous recevriez en cas de rente fixe.”
Quelle imposition?
En cas de versement unique, une cotisation Inami (3,55%) et une cotisation de solidarité (de 0 à 2%) sont retenues sur le capital brut constitué (participations bénéficiaires incluses). Le montant brut obtenu (mais pas la participation bénéficiaire, cette fois) sera ensuite soumis à un impôt final. Celui-ci dépendra de divers paramètres . La partie du capital constituée par les cotisations du travailleur est soumise à un impôt de 16,5% pour les primes versées jusqu’en 1993 et de 10% pour les versements effectués à partir de 1993. Pour la partie du capital constituée par les primes de l’employeur, l’impôt dépend de votre âge au moment du versement et du nombre d’années de carrière. Le tarif varie entre 10 et 20%. Dans la plupart des cas, il s’élève à 10 ou 16,5% (plus les centimes additionnels communaux).
Le versement en capital est généralement la formule plus avantageuse, mais c’est justement cette formule que le ministre Van Peteghem veut rendre moins attractive.
Ce régime fiscal ne sera pas identique avec la rente. “Si votre assurance-vie prévoit un versement sous forme de rente, vous payerez la même cotisation Inami mais vous échapperez à la cotisation de solidarité, précise Sammy Bogaert. Ensuite, un impôt sera prélevé à chaque versement. La rente sera en effet soumise aux taux progressifs de l’impôt des personnes physiques. Vous bénéficierez par conséquent des réductions d’impôts propres aux pensions, mais pour peu que vous touchiez d’autres revenus importants, vous pourriez être imposé au taux marginal de 50% (plus les centimes additionnels communaux). Si votre assurance groupe prévoit le versement d’un capital et que vous décidez ensuite de le convertir en rente, vous serez d’abord imposé comme si le versement s’effectuait en une seule fois. Ensuite, vous payerez un précompte mobilier distinct de 30% sur 3% du capital résiduel (plus les centimes additionnels communaux).” Nous pouvons donc conclure de ce qui précède que le versement en capital est généralement la formule plus avantageuse. Et c’est justement ce traitement préférentiel que le ministre Van Peteghem veut supprimer. Affaire à suivre…
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Si vous décédez avant votre départ à la retraite?
La plupart des assurances groupe prévoient une couverture décès. Si vous décédez avant d’avoir atteint l’âge de la retraite, un capital sera versé à vos proches. Le montant et les bénéficiaires figurent dans le règlement de pension. “Si vous décédez avant votre départ à la retraite, le capital décès versé sera soumis à un impôt libératoire de 16,5% (plus les centimes additionnels communaux) et, dans certains cas, à des cotisations Inami et de solidarité, explique Sammy Bogaert. De plus, vos héritiers devront payer des droits de succession, sauf si le capital revient à votre conjoint ou à des enfants de moins de 21 ans.”
Et si vous décédez après?
Si le versement de l’assurance groupe s’effectue en une fois, ce qui reste du capital retraite s’ajoutera à votre succession, à défaut de dispositions testamentaires contraires. Il est donc important de vous informer à temps à ce sujet auprès d’un expert.
Si vous optez pour un versement sous la forme d’une rente périodique, celle-ci est en principe “viagère”, c’est-à-dire que son versement s’arrêtera à votre décès. “Le règlement de l’assurance groupe peut cependant inclure un éventuel transfert de la rente au profit du conjoint survivant jusqu’au décès de ce dernier, tempère cependant Sammy Bogaert. Pour un même capital de départ, une telle rente ‘réversible’ sera cependant légèrement moins élevée qu’une rente non réversible.Vous avez demandé la conversion du capital en une rente au lieu de le faire verser en une fois? Dans ce cas, vous avez en fait renoncé au capital: en principe, vos héritiers n’auront donc pas droit au solde du capital à votre décès. Ce qui peut être désavantageux en cas de décès précoce.”
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