Les banques nationales dans le rouge: quel effet sur votre portefeuille ?

La semaine dernière la BCE affichait une perte avant provision de 1,6 milliard d’euros en 2022. Fin 2022, la Banque Nationale de Belgique annonçait qu’elle pourrait perdre jusqu’à 9 milliards d’euros dans les années à venir. Quel est l’impact sur vos finances ?

La perte affichée la semaine dernière par la BCE – avant reprise de provision – est la première enregistrée par l’institution de Francfort depuis 2004. Elle représente le troisième recul annuel de suite du résultat, depuis le bénéfice de 2,4 milliards d’euros en 2019. Si, au final, la BCE affiche tout de même des comptes à l’équilibre, grâce à des provisions déjà constituées, cela démontre qu’elle paie là sa remontée agressive des taux directeurs depuis l’été dernier pour combattre l’inflation.

Pourquoi une telle perte ?

Cette hausse des taux directeurs a créé deux foyers de pertes pour la principale gardienne de l’euro. Le premier est lié aux rachats de titres qu’effectue la BCE via les banques centrales nationales. Ce qui conduit à leur verser des intérêts. Il en résulte pour la BCE une charge de 2,1 milliards d’euros en 2022. Le second est que la BCE a abaissé pour 1,84 milliard d’euros la valeur des titres détenus, y compris des portefeuilles en dollars américains, en raison de la hausse des rendements obligataires. 

Après la ponction opérée dans les coussins financiers pour équilibrer le bilan 2022, il reste 6,6 milliards d’euros de provision au bilan de la BCE pour couvrir les risques de pertes futures. Un matelas qui pourrait s’avérer insuffisant alors que ces risques pour l’ensemble des portefeuilles de la BCE étaient chiffrés fin 2022 à 16 milliards d’euros.

Tout comme la BCE, les banques centrales nationales de la zone euro pourraient afficher, pour certaines d’entre elles, des pertes en 2022. C’est notamment le cas de la Banque Nationale de Belgique.  Ainsi la Banque Nationale de Belgique (BNB) a subi une perte de 600 à 800 millions d’euros en 2022. C’est une première depuis la Seconde Guerre mondiale. Et il est possible que les pertes se poursuivent ensuite jusqu’en 2027, pour atteindre un total de 9 milliards d’euros, a-t-elle averti début décembre 2022.

Les banques centrales ne sont pas des sociétés ordinaires

La BCE rappelle toutefois que ces institutions ne sont pas des “sociétés ordinaires” et qu’elles “peuvent enregistrer des pertes tout en continuant de fonctionner efficacement” pour remplir leur mandat principal qui repose sur le maintien des prix.

C’est ainsi le cas pour la BNB. Ses réserves financières, constituées au cours des dernières années, s’élevaient en décembre à 7,08 milliards d’euros. Et si toutes ces pertes venaient à consommer les amortisseurs financiers, cela ne poserait toutefois pas de problème pour la stabilité de la Banque Nationale. « En effet, une banque centrale peut fonctionner, à tout le moins temporairement, en ayant une position de capital négative. »

La BCE a créé “une machine à billets qui enrichit les banquiers pendant qu’ils dorment” ?

Les banques centrales paient des intérêts sur les réserves de liquidités que les banques commerciales mettent en dépôt auprès d’elles. Paul De Grauwe et Yuemei Li, deux enseignent à la London School of Economics, estiment que « cette machine déboursera 92 milliards d’euros en 2023 et probablement beaucoup plus lorsque la BCE portera à 3 % le taux d’intérêt sur ses dépôts. « Les banques recevront alors 140 milliards d’euros par an », soulignent-ils. 

Cette rémunération des dépôts auprès des banques centrales n’est pas neutre : c’est un subside inutile aux banques commerciales, et c’est aussi un manque à gagner pour les banques centrales, qui, au final, va peser sur les finances des États puisque les banques centrales leur versent des dividendes. Si le gouvernement fédéral avait reçu 122 millions d’euros en 2021 et 288 millions en 2020, il ne devrait rien toucher cette année.

Quel est l’impact direct dès lors?

Lorsque la BCE modifie les taux d’intérêt directeurs, cela se reflète de manière plus ou moins importante à travers toute l’économie, et notamment sur les prêts bancaires, les prêts de marché, les prêts immobiliers, les taux des dépôts bancaires et d’autres instruments de placement.

La concurrence entre banques joue aussi sur l’ajustement des taux. Les taux d’intérêt proposés par les banques aux particuliers et aux entreprises varient généralement en lien avec les taux fixés par la BCE, mais ils sont également influencés par d’autres facteurs comme l’offre et de la demande de crédits, autrement dit, des montants que les entreprises et les particuliers souhaitent dépenser et investir, et de l’ensemble du crédit disponible.

En simplifiant, lorsque les taux directeurs augmentent prendre un crédit devient plus cher et le compte épargne rapporte plus. Cela fait que l’épargne redevient « un peu plus intéressante ».

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