La Flandre-Occidentale entend bien donner un nouvel élan à ses quartiers moins prisés
Les quartiers de Venning à Courtrai et Hazegras à Ostende sont connus pour être des quartiers difficiles. Ou plutôt “étaient connus”, car le redressement semble avoir commencé. Une vision claire du développement urbain et la fusion des investissements privés et des travaux publics sont des facteurs clés de succès.
Il y a 15 ans, des investisseurs de Courtrai ont conçu le projet de transformer l’usine désaffectée de Stoops, dans le quartier de Venning, en un immeuble comprenant une quarantaine de lofts et quelques espaces de bureaux. Un projet audacieux car le quartier de Venning n’était pas un endroit prisé. Le quartier était détérioré et délabré, c’était tout particulièrement le cas de la cité sociale de Venning, située juste derrière l’usine Stoops. “Le Venning est un exemple typique de quartier social d’après-guerre: pour résoudre le problème majeur du logement, beaucoup de nouveaux habitats ont été créés très rapidement, explique l’architecte Julie Vermoortel, partenaire du bureau B2Ai. Le quartier avait donc besoin d’une rénovation urgente.”
Dans une ville inclusive, il doit y avoir de la place pour tout le monde, mais cela peut et doit aller de pair avec un cadre de vie de qualité pour tous.” – Julie Vermoortel (B2Ai)
Une rénovation mise sur les rails dès 2011. Certaines habitations vétustes ont été démolies et remplacées par des appartements passifs et des maisons neuves. Les autres logements ont fait l’objet d’une rénovation énergétique complète. “Mais nous ne nous sommes pas contentés de préparer les logements pour l’avenir, poursuit Julie Vermoortel. En collaboration avec la société de logement social Goedkope Woning, nous avons opté pour une approche globale: l’ensemble du quartier devait être préparé pour l’avenir. Nous avons pu utiliser des fonds européens à cette fin et le projet a également été récompensé par un prix européen. Aujourd’hui, le Venning est neutre en CO2 mais c’est aussi un quartier vert, à l’épreuve du climat, qui met l’accent sur la cohabitation inclusive.”
Ces investissements privés et publics ont-ils également profité aux rues et quartiers environnants? L’agent immobilier Annelies Wyseur, responsable du bureau Dewaele à Courtrai, en est convaincue. “Dans le sillage de l’usine Stoops, un peu plus loin, plusieurs projets de lofts et d’appartements neufs ont été réalisés. De l’autre côté de l’eau, les maisons ouvrières sont très demandées, surtout par les jeunes, qui investissent également dans une rénovation en profondeur. Le quartier s’en trouve revalorisé et les prix s’en ressentent. Il y a trois ans, nous vendions ces maisons entre 200.000 et 250.000 euros. Récemment, nous avons vendu une de ces maisons pour 410.000 euros. Cette habitation était entièrement rénovée et prête à être emménagée.”
Annelies Wyseur souligne le fait que le quartier possède des qualités fort prisées. “Sa situation le long du canal Bossuit-Kortrijk est un atout: l’eau fait vendre, dit-elle. Et c’est peut-être une banlieue, mais le centre historique est tout proche: à vélo, on peut rejoindre la Grand-Place en moins de 10 minutes.”
Un point de repère à Krottegem
Les quartiers situés à proximité d’une gare possèdent également une qualité importante: une bonne accessibilité. Pourtant, ils sont aussi souvent connus comme des quartiers à problèmes. Les quartiers des gares de Bruges, d’Ostende et de Roulers en sont des exemples en Flandre-Occidentale. Toutefois, un changement de perception se fait sentir, bien qu’il soit plus marqué dans certaines villes que dans d’autres.
Le quartier Hazegras d’Ostende est peut-être la métamorphose la plus significative. D’un quartier de sortie et de prostitution notoire, il s’est transformé en quelques années en un point névralgique pour les nouveaux projets de logements de luxe. Le projet le plus frappant est SKY Towers, réalisé par le groupe immobilier Degroote sur le site de l’ancienne école hôtelière. “Le projet et son emplacement intéressent un public très large, explique Nick Coeman, spécialiste des nouvelles constructions chez Dewaele. La proximité de la gare est bien sûr intéressante pour les résidents permanents. Et comme la plage n’est pas loin non plus, le quartier attire également les résidents secondaires.”
Il en va tout autrement à Bruges. “Le quartier de la gare de Bruges a également bénéficié d’une forte impulsion ces dernières années mais on ne peut pas dire qu’il s’agissait d’un quartier à problèmes, explique Filip Dewaele. Il n’y avait tout simplement pas d’habitations, c’était surtout une zone non développée. Aujourd’hui, le quartier offre un mélange équilibré de bureaux, d’appartements et de commerces.”
A Roulers, le quartier de la gare est mis en valeur par le Roelevard, un projet mixte de Steenoven et ION. Le projet se compose de deux volumes, dont l’un s’élève progressivement vers la place de la gare jusqu’à une tour de 46 mètres de haut. Le design saisissant est l’œuvre de B2Ai et du cabinet d’architectes norvégien Snøhetta. “Le bâtiment constitue un élément visuel puissant et se veut également un nouveau point de repère pour cette partie de la ville, explique Julie Vermoortel. Mais c’est bien plus que cela. Une grande attention a été accordée à l’espace public et à la connexion avec le tissu urbain existant. Le projet est également une voie de circulation: il relie le centre-ville au quartier de Krottegem, qui se trouve de l’autre côté du faisceau ferroviaire.”
Comme son nom l’indique, Krottegem (krot signifiant taudis) n’est pas le Beverly Hills de Roulers, mais le quartier connaît une évolution favorable, selon Julie Vermoortel. La ville y a pris quelques initiatives, comme la transformation d’un ancien entrepôt en un lieu de rencontre créatif, TRAX. “Krottegem est un quartier ouvrier avec beaucoup de petites maisons ouvrières. L’idée n’est pas de changer complètement son identité en y attirant une population plus aisée. Dans une ville inclusive, il doit y avoir de la place pour tout le monde, mais cela peut et doit aussi aller de pair avec un cadre de vie de qualité pour chacun.”
Vision
Y a-t-il un modèle pour revitaliser ce type de quartiers? Filip Dewaele le pense. “Très souvent, on constate que les quartiers sont stimulés par la conjonction d’investissements privés et de travaux publics. Que l’initiative vienne du privé ou du public n’a pas beaucoup d’importance, mais il faut que quelqu’un soit le premier à appuyer sur le bouton”.
Pieterjan Vermoortel, directeur général de B2Ai, se tourne pour cela principalement vers les autorités locales. “Ce premier pas représente un risque trop important et/ou un effort financier trop lourd pour la plupart des développeurs, explique-t-il. Il est important que la ville ait une vision claire afin que toutes les ressources soient ciblées.”
Nos interlocuteurs citent unanimement Courtrai comme exemple d’une ville dotée d’une vision forte et claire en matière de développement urbain. La revalorisation de De Leieboorden en est la vitrine. “Un effort tel que le réaménagement du Leieboorden rayonne sur l’ensemble de la ville, déclare Julie Vermoortel. Il a redonné vie à la ville. Au début des années 2000, la ville était beaucoup moins populaire, mais aujourd’hui Courtrai attire de nouveaux habitants.”
“Surtout par rapport à Bruges, Courtrai a un avantage important: elle dispose de grands sites, souvent industriels, qui peuvent encore être développés”, ajoute Filip Dewaele. L’un de ces grands sites est l’ancien site industriel Van Marcke sur la Weggevoerdenlaan. Il s’agit d’un emplacement de choix, à 700 mètres de la gare ferroviaire et à 1 kilomètre de la Grand-Place. La ville et Van Marcke y nourrissent des projets ambitieux. Sous le nom de LandMarck, ils font avancer la zone en tant que “quartier de la ville de l’avenir”.
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