Les aides à l’embauche ne stimulent pas les perspectives d’emploi des jeunes peu scolarisés en Wallonie 

Depuis 2017, la Wallonie octroie des aides à l’embauche pour les demandeurs d’emploi de moins de 25 ans faiblement scolarisés. Ces subventions n’ont pas incité les employeurs à embaucher davantage de jeunes travailleurs sans diplôme universitaire. Elles ont même généré des effets indésirables, selon une étude.

Les perspectives d’emploi sont-elles plus importantes de ce qu’elles auraient été si des aides à l’embauche n’avaient pas été mises en place en Wallonie pour les jeunes travailleurs de moins de 25 ans peu scolarisés ? C’est ce qu’ont analysé deux chercheuses de l’Institut de Recherches Économiques et Sociales (IRES/LIDAM) de l’UCLouvain en collaboration avec l’Institut wallon des Statistiques (IWEPS). La dernière édition de la revue Regards Économiques parue ce jeudi offre un aperçu de leurs conclusions sur l’efficacité de ces mesures dans le sud du pays. 

Réduction salariale de 25% 

En réduisant le coût du travail, le programme”Impulsion moins de 25 ans” vise à encourager les employeurs à créer de nouvelles opportunités d’embauche pour les jeunes chômeurs peu scolarisés en Wallonie.  

Pour être éligible à ces aides, aucune exigence de durée de chômage n’est imposée pour les moins scolarisés, alors que les diplômés de l’enseignement secondaire supérieur doivent être sans emploi depuis au moins 6 mois pour y avoir droit. Ce soutien à l’embauche, dégressif et temporaire sur une période maximale de 3 ans, représente une réduction salariale de 25% au moment de l’embauche. Entre juillet 2017 et décembre 2021, la période ciblée par l’évaluation, cette initiative a engagé près de 195 millions d’euros d’aides pour ces jeunes travailleurs. 

Cependant, les chercheurs de l’IRES et de l’IWEPS mettent en évidence que l’initiative n’a pas eu l’effet escompté. Les données qu’ils ont analysées montrent que le dispositif n’a pas augmenté le taux de retour à l’emploi ni la durée des contrats pour les jeunes peu scolarisés de moins de 25 ans. Les subventions n’ont pas incité les employeurs à embaucher davantage ces travailleurs. Ces aides ont même généré des effets indésirables, rapportent les auteurs de l’étude. 

Ajuster le ciblage des aides en fonction des cycles économiques 

Comparés à la littérature scientifique pertinente sur le sujet, les résultats révèlent que l’une des raisons principales de l’inefficacité de cette aide à l’embauche s’explique par son introduction durant une période économique favorable avec un marché du travail tendu et un chômage en déclin. Dans de telles conjonctures, réduire le coût du travail pour stimuler la demande des entreprises peut en effet se révéler inefficace, car les opportunités d’emploi sont déjà existantes.

Les chercheurs recommandent d’ajuster le ciblage de ces aides en fonction des cycles économiques, en les mettant en place lors d’une sortie de récession, bien avant que des tensions n’apparaissent sur le marché du travail. Cette focalisation opportune permettrait également de considérer des montants d’aide plus généreux, renforçant ainsi l’incitation pour les employeurs. 

Un socle de compétences acquis grâce à des formations ciblées 

Au-delà du contexte économique, il est essentiel de souligner que les programmes axés sur un retour rapide à l’emploi, tels que les aides à l’embauche, ne sont pas nécessairement efficaces pour les jeunes demandeurs d’emploi peu qualifiés. Le défi pour ce groupe ne réside pas uniquement dans la demande des entreprises, mais dans ce que les jeunes peuvent offrir en retour. Pour qu’une subvention à l’embauche soit efficace, elle doit s’appuyer sur un socle de compétences suffisant, pouvant être acquis grâce à des formations ciblées, rapportent encore les chercheurs universitaires. 

Les agences d’intérim exclues des aides  

Par ailleurs, depuis le 1er juillet 2023, une réforme du dispositif “Impulsion” est entrée en vigueur, restreignant l’octroi des aides aux contrats d’une durée minimale de deux mois, commente encore l’étude. Ce qui exclut de facto les entreprises de travail intérimaire, en raison de la brièveté des contrats qu’elles proposent. Cependant, les effets de cette réforme restent incertains quant à l’amélioration de l’efficacité des aides à l’embauche. Malgré l’économie potentielle sur le plan budgétaire en raison de la part importante des agences d’intérim dans les entreprises utilisatrices du subside, rien ne garantit que les effets indésirables disparaîtront. Particulièrement, si l’aide à l’embauche, telle qu’elle est conçue actuellement, n’a pas incité les employeurs à créer de nouvelles opportunités d’embauche, il est difficile d’imaginer que l’effet incitatif sera amplifié en ajoutant une contrainte supplémentaire sur la durée du contrat, peut-on encore apprendre de la dernière édition de Regards Economiques.

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