Pourquoi le plaidoyer de Colruyt sur l’harmonisation des salaires est douteux

Dans une lettre adressée au ministre Dermagne, le groupe Colruyt demande une harmonisation des conditions de travail dans le secteur de la grande distribution. Une démarche douteuse selon l’expert de Retail Detail Stefan Van Rompaey.

Colruyt demande au gouvernement de simplifier les régimes salariaux dans le secteur de la grande distribution. Le groupe affirme qu’il existe aujourd’hui des abus et des différences injustes entre les travailleurs, allant parfois jusqu’à 400 euros entre deux employés exerçant la même fonction, mais n’étant pas dans la même commission paritaire. L’entreprise demande que le système des commissions paritaires soit simplifié et “plus équitable”.

Pour Stefan Van Rompaey, expert chez Retail Detail, le fait que Colruyt s’implique dans une discussion sur un concurrent est assez exceptionnel, et en même temps, cela ne l’est pas tant que ça. « Le leader du marché est confronté à des challengers qui misent de plus en plus sur le franchisage, qui leur donne de l’agilité et des avantages en termes de coûts. L’expansion de nouveaux venus comme Albert Heijn et Jumbo, mais aussi de Carrefour, se fait presque exclusivement par le biais de magasins franchisés. Concurrence déloyale, pense-t-on à Halle. L’intérêt propre, pourrait-on conclure. Ce qui rend la démarche de Colruyt quelque peu douteuse », explique-t-il.

 On peut arguer qu’il y a trop de supermarchés dans le pays, mais le carnage doit-il être immédiatement auto-infligé ?

Stefan Van Rompaey

Des licenciements inévitables

Dans un secteur déjà mis sous pression et où la concurrence fait rage, l’augmentation des coûts salariaux et organisationnels pour tous dans ces circonstances ne sera pas sans conséquence, estime l’expert qui avance qu’une vague de fermetures de magasins et de licenciements sera alors « inévitable ».

Il rappelle que quatre chaînes de supermarchés sont déjà déficitaires en Belgique et les marges bénéficiaires des autres sont soumises à une forte pression. « On peut arguer qu’il y a trop de supermarchés dans le pays, mais le carnage doit-il être immédiatement auto-infligé ? Le plan de Delhaize vise à éviter les fermetures et les licenciements », avance-t-il.

Une telle réforme ne serait pas non plus sans conséquence pour les consommateurs, poursuit-il. « Les prix devront encore augmenter, la différence de prix avec les supermarchés de nos pays voisins se creusera à nouveau, les achats frontaliers augmenteront à nouveau. Est-ce souhaitable ? »

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