Les adultes nostalgiques, le nouveau public cible de l’industrie du jouet

Un collectionneur de Playmobil. (Photo by Daniel Löb/picture alliance via Getty Images) © Getty Images

Poupées, Lego ou Tamagotchi : certains adultes retombent en enfance et se mettent à racheter des jouets. Les marques en profitent, en misant sur le vintage des années 90-2000 pour attirer les clients. Mais tous les fabricants de jouets ne peuvent pas surfer sur la vague.

Le vintage cartonne, que ce soit dans le design, la musique (reprises et remasters), le cinéma, le vêtement ou autres. Les jouets n’échappent pas à cette tendance. Les jouets de la fin des années 90 connaissent un vrai revival, avec des marques reprenant la production d’éléments qui avaient été arrêtés. Et les clients visés ne sont pas les enfants.

La recette prend, comme le montrent les chiffres. Entre juin 2022 et 2023, les adultes représentaient 17% des ventes aux États-Unis, en tant que clients finaux de ces articles, selon une étude du cabinet d’études sur la consommation Circana, citée par CNN. Entre juin 2018 et 2019, ils n’étaient que 9%. La part de marché a presque doublé. En deux ans, le chiffre généré a également explosé : de 1,7 milliard de dollars en juin 2021 il est passé à 6,4 milliards de dollars en juin 2023.

“Moment propice”

Comment expliquer ce regain d’intérêt pour les jouets ? Le covid et les confinements seraient en partie responsables. Cette période anxiogène a poussé de nombreuses personnes à essayer de trouver des refuges émotionnels quelque peu inhabituels. Certaines se sont mises à fabriquer leur propre pain, d’autres ont visiblement été nostalgiques de leur enfance.

Mais ce n’est pas la seule explication. Il y a aussi le fait que la Gen Z et les Milléniaux se trouvent à un stade de leur vie où ils deviennent facilement nostalgiques. “Le passage de l’enfance et de l’adolescence à l’âge adulte entraîne un conflit doux-amer entre le désir de devenir indépendant et le désir de retrouver l’insouciance, l’innocence et la sécurité de l’enfance”, explique Krystine Batcho, psychologue et professeure au Le Moyne College aux États-Unis. Elle ajoute que des périodes anxiogènes peuvent en effet davantage créer de la nostalgie. Et force est de constater que depuis le covid, elles ne manquent pas.

Pas le même succès pour toutes les marques

Lego profite clairement de cette tendance. Le covid a donné un fameux coup de pouce à la marque danoise. Il n’y a en plus pas uniquement le côté “jouet” à ses produits, mais aussi le côté de challenge ludique qu’est la construction, voire le côté de la décoration intérieure. Certains produits sont d’ailleurs clairement destinés aux adultes, comme l’atteste sa boutique en ligne. Des concours télévisés et des partenariats avec des sagas cultes, comme “Star Wars”, “Harry Potter” ou “Le Seigneur des Anneaux” boostent aussi les ventes ; non sans l’aide d’une pincée de nostalgie.

Gros succès aussi pour American Girl, une poupée développée par le groupe Mattel. Jamie Cygielman, présidente de la marque, constate en effet un grand intérêt des adultes les produits. Pour l’édition spéciale “35e anniversaire” en 2021, une reproduction des premiers modèles, la moitié des acheteurs étaient des adultes, explique la présidente au média américain. La marque a suivi le filon d’or, sortant d’autres poupées ou vêtements rétro. Elle ajoute aussi des boissons alcoolisées à la carte des cafés de ses magasins, car de plus en plus d’adultes viennent en groupe, souvent accompagnés de leurs poupées.

De son côté, Playmobil ne semble pas pouvoir profiter de la tendance. Le groupe voit ses ventes plonger et doit réduire ses effectifs, a-t-il annoncé au début du mois. 700 emplois, ou 17% de la main d’oeuvre, dont la moitié en Allemagne. Faut-il alors s’attendre à une vague de nostalgiques qui vident les rayons, pour sauver la société (un phénomène comme les actions mème à la GameStop) ? L’avenir nous le dira.

Partner Content