La reprise quand les chiffres ont explosé avec le Covid: les cas Dutra et e-Farmz
Dutra est une entreprise de Wavre spécialisée dans les vêtements pour le personnel soignant. La crise a soutenu la demande mais a aussi conforté sa patronne, Mireille Rousseaux-Nelis, dans sa volonté de soutenir encore davantage un modèle d’affaires durable.
La rédaction de Trends-Tendances consacre son numéro de la semaine à la reprise.
Découvrez ici l’entiereté du dossier:
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- La reprise quand les chiffres ont explosé avec le Covid : le cas Dutra
- La reprise après avoir racheté un concurrent : le cas Lasea
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- La reprise quand on a réorienté ses activités : les cas de Lhoist, Dardenne, Newtree Impact, Good Move et Mozzeno
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- La reprise quand on a revu sa stratégie d’exportation : le cas de Kiomed
Entreprise familiale basée dans le zoning de Wavre, Dutra fabrique des vêtements professionnels utilisés dans l’horeca, les soins de santé, la maintenance et l’industrie. “Notre core business est toutefois la fabrication de vêtements destinés à habiller le monde médical (médecins, infirmiers, aides-soignants, personnel d’entretien des hôpitaux et des maisons de repos, etc.)”, précise la CEO Mireille Rousseaux-Nélis.
Avec la crise sanitaire, cette entreprise de 25 personnes qui a déjà plus d’un demi-siècle d’existence a réorienté sa production vers les masques et les blouses de protection en tissu. Elle a vu son chiffre d’affaire bondir de plus de 50% et a réalisé, avec l’aide de la Sowalfin qui lui a octroyé un prêt sur cinq ans, un important investissement dans une grande table de découpe automatique. Mais la crise a également conforté la société dans son ambition de jouer un plus grand rôle, demain, dans l’économie durable et circulaire.
Le durable et le circulaire
“Nous avions la chance d’être dans un secteur où nous n’avons pas dû nous réinventer, explique Mireille Rousseaux-Nélis. En suivant le fil de l’actualité au début de la pandémie, nous nous sommes bien votre rendu compte qu’il manquait cruellement de masques et de vêtements de protection adaptés. Nous avions les outils, le matériel, le personnel et les tissus.” Et la demande s’est immédiatement manifestée.
“Les premières commandes ont émané d’un hôpital bruxellois qui manquait de masques FFP2 et qui devait protéger le personnel qui confectionnait les plateaux service pour les patients. Nous avons ressorti les patrons qui dataient du temps où nous confectionnions encore des blouses de chirurgie et des masques en tissu pour les hôpitaux.” Des patrons qui dormaient dans les armoires car depuis des décennies, les hôpitaux s’étaient orientés vers les masques et blouses jetables.
Aujourd’hui, la situation a évolué parce que les masques en tissu, s’ils restent demandés dans les collectivités, sont désormais bannis des hôpitaux, au grand regret de la CEO de Dutra qui veut développer une filière circulaire en Belgique pour les vêtements professionnels. Mais c’est difficile, notamment par manque de communication et d’information.
“Au début de la pandémie, les gens ont déchiré leurs draps pour confectionner des masques en ignorant les exigences techniques nécessaires pour faire barrière. Un masque en coton ne sert à rien car il absorbe l’humidité et les germes! Le polyester est le seul recommandé pour la fabrication des masques pour le milieu médical. Il évacue l’humidité. Certes, un masque en tissu ne sera jamais équivalent à un FFP2, mais il est tout à fait capable de faire correctement barrière. Mais les virologues ne se sont pas adressés à nous”, déplore la patronne de Dutra, qui regrette que la filière de la confection belge ait été trop ignorée pendant cette crise sanitaire. “Il a manqué de gens pour fédérer et nos pouvoirs publics n’ont pas été à même de réfléchir en ce sens.”
Créer une économie circulaire n’est pas toujours facile mais Mireille Rousseaux-Nélis, convaincue de la nécessité “d’abandonner les business models linéaires“, s’y attelle. “J’ai pris mon bâton de combattante, dit-elle, car je suis convaincue que le durable est la meilleure des choses pour notre planète. Je suis une battante. C’est dans ma nature.”
Montrer l’exemple
Cependant, pour créer un nouveau modèle d’économie circulaire, il faut “faire du lien”. Et c’est une des leçons de la crise sanitaire, observe la patronne de Dutra. “Lorsque l’on parle de durable, toute une chaîne logistique doit suivre: un masque, une blouse en tissu doivent être lavés et livrés à nouveau aux hôpitaux. Mais en Belgique, il y a des blanchisseurs industriels qui peuvent assurer ce travail et absorber des volumes importants. Ils l’ont fait pendant la crise. Mais il faut oser faire la jonction.” “Tout est lié” est d’ailleurs la thématique choisie par Dutra pour accompagner cette année 2021. Ainsi, explique Mireille Rousseaux-Nelis, trois petites fédérations professionnelles – Creamoda (la confection), Fedustria (l’industrie textile) et Febelsafe (les fabricants d’équipements de protection individuels) – se sont alliées pour développer un label, le Belgian Quality Mask, afin de redonner une légitimité aux masques en tissu. Ce label est en pleine procédure de reconnaissance. Il avertira les utilisateurs que le masque qui l’arbore est efficace car il a fait l’objet d’un test. Dutra fait également partie des fondateurs d’une ASBL, Circletex, qui regroupe aujourd’hui sept entreprises. Cette association se focalise sur la mise en place d’un système de collecte, de tri et de recyclage des vêtements et textiles d’entreprise, pour récupérer les fibres de ces vêtements usagés afin de les réutiliser dans de nouveaux tissus. Et puis, Dutra a dans ses cartons un projet ciblant les médecins, kinés et autres professions libérales de la santé. Avec l’aide de la Région wallonne qui lui permet de financer une équipe de recherche et dont Mireille Rousseaux-Nélis salue le soutien, l’entreprise de Wavre travaille aujourd’hui à leur offrir une solution de protection durable et circulaire. Nous n’en saurons pas plus: il est encore un peu trop tôt pour parler de ce nouveau service… Car une autre devise prisée par Mireille Rousseaux-Nelis est: “avancer pas à pas”. “Je suis trop petite pour être une influenceuse mais nous devons être clairs et alignés sur nos idées, dit-elle. Nous avons envie de montrer l’exemple. Il ne faut pas se dire: demain peut-être. Mais aujourd’hui certainement!”
Efarmz a accéléré sa professionnalisation
Sur l’année 2020, eFarmz a multiplié son chiffre d’affaires par trois, dépassant les 10 millions d’euros. Danger de surchauffe? Pas du tout, la fondatrice et CEO Muriel Bernard entend bien conserver le rythme de développement de sa plateforme de vente en ligne de produits alimentaires bios. “Ça dure depuis un an, ce n’était pas un phénomène ponctuel, confie-t-elle. Pendant cette période, tout le monde a été sensibilisé au bio et au local, à la qualité des produits. De nouvelles habitudes se sont créées. Elles ne vont pas disparaître.” Encore faut-il pouvoir répondre dans la durée à ces nouvelles habitudes. Pour y parvenir, eFarmz a étoffé ses équipes, notamment dans le management, dans le but de parfaire sa logistique et d’anticiper au mieux les évolutions de la demande. “Le boost de l’année 2020 nous permet d’aller plus loin dans la professionnalisation de l’entreprise, ajoute Muriel Bernard. Toute la chaîne de travail est concernée: le choix des produits, la diversité de l’offre, la qualité de la livraison, etc. Nous allons aussi travailler sur le marketing pour fidéliser les clients qui nous ont rejoints pendant cette période. Nous passons en fait dans une autre catégorie de business.” Cela vaut aussi pour les bâtiments puisque l’entreprise a intégré l’automne dernier un tout nouvel entrepôt de 1.800 m2 à Anderlecht, à quelques centaines de mètres de ses anciennes installations. Cet entrepôt a été aménagé en prévision de la croissance future d’eFarmz.
Quand nous reprendrons une vie plus normale, quand les restaurants rouvriront, les ménages raboteront peut-être leurs courses alimentaires. Un mouvement qu’eFarmz essaie bien entendu d’anticiper “Aujourd’hui, nous livrons beaucoup de box-repas pour deux ou trois personnes, explique Muriel Bernard. Nous pourrons proposer des box de fête pour 10 personnes ou plus. Nous aurons aussi des gens plus pressés et donc intéressés par des plats pour la famille. Le type de consommation va bouger et, avec notre nouvelle structure, nous sommes prêts à y répondre.”
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