Crash en Corée du Sud: le Boeing 737-800, l’un des avions les plus populaires au monde, sous la loupe

Dans la nuit du 29 décembre 2024, le vol 7C2216 de Jeju Air s’est écrasé à l’aéroport international de Muan, entraînant la mort de 179 des 181 passagers à bord, dans ce qui s’avère être la pire catastrophe aérienne en Corée du Sud depuis des décennies. Le Boeing 737-800, modèle extrêmement populaire avec plus de 4 400 unités en service à travers le monde, est désormais sous les projecteurs.

Malgré l’historique de sécurité robuste du modèle 737-800, les circonstances du crash du vol 7C2216 de Jeju Air survenu à l’aéroport international de Muan, dans le sud-ouest de la Corée du Sud posent question. L’avion aurait tenté un atterrissage sans déployer son train d’atterrissage avant de s’embraser. Les enquêteurs envisagent plusieurs hypothèses, dont une collision avec des oiseaux ayant potentiellement désactivé les moteurs.

Inspection générale des avions

Cet événement tragique rappelle les défis constants du transport aérien. Bien que les Boeing 737-800 ne soient pas liés à des défauts structurels comme le 737 Max (lire aussi ci-dessous), une inspection générale des appareils de ce type a été ordonnée par le gouvernement sud-coréen.  

Le modèle 737-800 été développé avant le Boeing 737 Max, qui a connu des problèmes critiques de contrôle de vol impliqués dans deux accidents mortels en 2018 et 2019, entraînant la mort de 346 personnes. Contrairement au 737 Max, le 737-800 n’a pas été impliqué dans des défauts de conception similaires. L’avion impliqué dans l’accident avait été livré à Jeju Air en 2017, après avoir été exploité par Ryanair. Agé de 15 ans, il faisait partie d’une flotte mondiale de 4 400 appareils en service, dont l’âge moyen est de 13 ans, selon le site spécialisé en aviation Cirium.

Une collisions avec des oiseaux ?

Parmi les questions soulevées par l’accident figure l’absence de déploiement du train d’atterrissage. Même en cas de panne hydraulique, les pilotes de Boeing 737-800 peuvent le déployer manuellement. Une des hypothèses avancées est une collision avec des oiseaux, ayant potentiellement endommagé un ou même les deux moteurs.

« Si cela se produit à basse altitude, les pilotes peuvent manquer de temps pour exécuter les check-lists d’urgence », explique à CNBC Jeff Guzzetti, ancien enquêteur à la NTSB et à la FAA. Il ajoute que l’accident aurait pu être moins fatal si l’avion n’avait pas heurté une butte de terre et un mur dur à l’extrémité de la piste. “Malgré l’urgence, l’atterrissage a été remarquablement bien exécuté”, souligne de son côté pour l’AFP Kim Kwang-il, professeur de sciences aéronautiques à l’université de Silla et ancien pilote.

Un mur en fin de piste

Mais “normalement, il n’y a pas de tel obstacle solide en bout de piste, c’est contre les standards de sécurité de l’aviation internationale recommandés par (…) l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et l’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne (AUESA). La structure en question a fait s’écraser et s’enflammer l’avion”, affirme-t-il. “La plupart des passagers sont morts à cause de cet obstacle, c’est bouleversant”, déplore-t-il, appelant les autorités aéroportuaires à rendre des comptes.

Sur le plan de l’enquête, les boîtes noires – l’enregistreur vocal du cockpit et l’enregistreur de données de vol – ont été retrouvées dimanche. Les protocoles internationaux stipulent que l’enquête principale est dirigée par le pays où l’accident a eu lieu, en l’occurrence la Corée du Sud. Les États-Unis, via le NTSB, la FAA et Boeing, participent à l’enquête, l’appareil ayant été conçu et certifié aux États-Unis.

Même modèle, nouvel incident

Ce lundi matin, un autre Boeing 737-800 de Jeju Air a rencontré un problème lié au train d’atterrissage, déjà mis en cause dimanche. “Le commandant de bord a communiqué avec le contrôle au sol et, après avoir pris des mesures supplémentaires, le train d’atterrissage s’est remis à fonctionner normalement. Cependant, il a été décidé de retourner à l’aéroport” de Gimpo (nord-ouest) peu après le décollage, a relaté à la presse Song Kyung-hoon, un responsable de la compagnie.

Des drames très rares

Le secteur du transport aérien sud-coréen est considéré comme globalement fiable par les experts, de tels drames étant très rares. L’accident le plus meurtrier à avoir eu lieu en Corée du Sud était jusqu’à dimanche le crash sur une colline près de l’aéroport de Busan-Gimhae d’un Boeing 767 d’Air China en provenance de Pékin, qui avait fait 129 morts le 15 avril 2002, rappelle l’AFP.

Le drame a eu un impact immédiat sur les marchés financiers – les actions de Boeing ont chuté de 4 % avant de limiter la casse. Cet accident met en lumière la vulnérabilité d’un secteur sous pression, où chaque incident majeur peut ébranler la confiance des passagers et des investisseurs. La compagnie aérienne sud-coréenne Jeju Air a annoncé lundi subir des annulations en série suite à cette castastrophe.

Boeing : une décennie marquée par les turbulences

Le géant américain de l’aéronautique, Boeing, traverse une période de turbulences depuis plusieurs années, ponctuée par des scandales, des accidents mortels, et des défis industriels.

Les crashs du 737 Max : une crise sans précédent

En 2018 et 2019, deux accidents impliquant le 737 Max – Lion Air en Indonésie et Ethiopian Airlines – ont causé la mort de 346 personnes. Ces tragédies ont mis en lumière un défaut de conception lié au système anti-décrochage (MCAS) et ont conduit à une immobilisation mondiale de l’appareil pendant près de deux ans. Boeing a dû revoir le design de l’avion et affronter une perte de confiance massive, tant de la part des compagnies aériennes que du grand public.

Ces derniers mois, Boeing a connu d’autres déboires technique. Entre autres, le 5 janvier 2024, un incident notable impliquant la perte d’une porte en plein vol s’est produit sur un Boeing 737 MAX 9 d’Alaska Airlines. Lors d’un vol près de Portland, Oregon, une porte s’est détachée de l’appareil en plein vol. L’avion a pu atterrir en urgence sans causer de blessures graves aux passagers ou à l’équipage.

Retards et problèmes techniques sur d’autres modèles

Le programme du 787 Dreamliner, autre pilier de la flotte de Boeing, a également rencontré des difficultés. Des problèmes de fabrication, notamment liés à la structure des fuselages, ont entraîné des retards de livraison importants et une perte de revenus. Ces retards ont coïncidé avec une concurrence accrue d’Airbus, qui s’est imposé avec son A350 et son A321XLR.

La crise sanitaire : un coup dur pour l’aérien

Avec la pandémie de Covid-19, Boeing, déjà fragilisé, a vu ses commandes chuter drastiquement. Le transport aérien étant quasiment à l’arrêt, de nombreuses compagnies ont annulé ou différé leurs commandes, affectant gravement les flux de trésorerie de l’entreprise.

Problèmes de gestion et restructurations

La direction de Boeing a été critiquée pour sa gestion des crises, notamment en privilégiant les économies sur la sécurité. Ces critiques ont entraîné des changements à la tête de l’entreprise, mais les efforts pour redorer l’image de la marque restent insuffisants aux yeux de nombreux observateurs.

Enquête et impact financier

Boeing a dû régler plusieurs milliards de dollars en indemnisations et amendes, notamment dans le cadre d’un accord avec le département de la Justice américain. Les actions de l’entreprise ont plongé, effaçant des années de valorisation boursière.

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