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‘Les victimes de l’Etat providence seront toujours ceux qui font vivre le pays’

Les partis de la majorité disent s’attaquer à trois obstacles successifs en matière fiscale. Mais en réalité, il s’agit de conserver un système d’Etat dépensier et ultra-taxateur, sans en modifier la substance ni même en corriger les défauts.

Il y a d’abord eu le contrôle budgétaire pour résorber un des habituels “trous” dans les finances publiques. Une bonne partie de ce “trou” résulte de mauvais calculs effectués en matière de pensions. On peut s’étonner que, dans un monde politique où la moindre petite phrase peut coûter une carrière, personne ne paraisse sérieusement inquiété pour une bévue d’une telle dimension. Quoi qu’il en soit, il s’est agi, comme de coutume et contrairement à ce que le gouvernement affirme, d’augmenter encore quelques recettes et, non pas de réduire, mais d’augmenter un peu moins que prévu les dépenses.

Nous avons déjà relevé, dans nos chroniques, que le budget 2015 prévoyait une augmentation d’impôts de 3,8 milliards et des dépenses de 5 milliards, et donc qu’il n’existe aucune politique gouvernementale de contraction effective des unes et des autres. La politique des gouvernements précédents – consistant à toujours augmenter les dépenses, tenues pour des droits acquis pour leurs bénéficiaires, et à toujours majorer les impôts – est maintenue.

On annonce ensuite depuis des mois un tax shift qui, par définition, n’implique, lui non plus, aucune réduction, ni des dépenses, ni des recettes, mais un léger glissement d’une charge pesant essentiellement sur les revenus du travail, vers la consommation, l’énergie, voire l’épargne. En réalité, il y a peu de chances que ce mouvement, assez dérisoire puisqu’il devrait vraisemblablement porter sur moins de 1 % de la charge fiscale, permette une réduction des impôts sur le travail qui soit inférieure à l’augmentation des impôts qu’en catimini le gouvernement prévoit dans le budget. Dans un tel cadre budgétaire, le fameux tax shift consiste donc en une simple réorientation d’une partie des augmentations d’impôts, et non en une réduction quelconque de la charge pesant sur tous les travailleurs.

Enfin, on annonce une “grande” réforme fiscale mais, à nouveau, le gouvernement se refuse à toucher aux dépenses publiques. Tout ce qu’il a présenté jusqu’ici comme une “diminution” de celles-ci, en suivant la même technique que son prédécesseur, n’est, en tout cas globalement, qu’une réduction du rythme d’augmentation de ces dépenses. La vérité est que celles-ci ne diminuent jamais, et qu’il en sera de même dans le cadre de la réforme fiscale annoncée.

Les victimes de l’Etat providence se retrouveront toujours parmi les mêmes groupes: ceux qui font vivre le pays

On a affaire à un gouvernement qui (comme les autres) refuse de voir qu’il y a deux colonnes dans un budget (les recettes et les dépenses) et qui s’incline devant les exigences de ceux qui, bénéficiant des prébendes de l’Etat, exigent qu’il s’agisse de droits acquis pour toujours.

Telle est la réalité concrète qui se cache derrière les déclarations du Premier ministre lorsqu’il affirme vouloir “maintenir notre modèle social” : en clair, il veut maintenir la politique social-démocrate d’Etat providence, qui implique des dépenses publiques atteignant la moitié du PIB et des recettes presque correspondantes.

On ne pourra jamais parler sérieusement de “réforme fiscale” tant qu’on ne remettra pas en cause ce prétendu “modèle”. Si l’on ne touche pas aux dépenses, il s’agira simplement d’une “réformette”, consistant à déplacer quelque peu la charge qui pèse sur tous ceux qui produisent de la richesse. Ce n’est pas là un changement de politique. Il s’agit simplement d’une adaptation de la fiscalité au type de clientèle des partis au pouvoir. Les victimes du système de l’Etat providence se retrouveront toujours, par nécessité, parmi les mêmes groupes, soit ceux qui font vivre le pays, mais à l’intérieur de ces groupes, on choisira certaines catégories qui recevront un petit allègement de charges, au détriment d’autres – vraisemblablement les épargnants et peut-être, à nouveau, les automobilistes – qui paieront encore plus.

Il s’agit donc de conserver un système d’Etat dépensier et ultra-taxateur, sans en modifier la substance ni même en corriger les défauts. Cela s’appelle du conservatisme.

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