Coûts, PEB astreignant, fin des primes… À quoi s’attendre sur le marché de l’immobilier en 2023?

Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste

Le marché de l’immobilier a été mouvementé l’année dernière en raison de la crise. Mais qu’en est-il de 2023? Fiscalité, coûts, réforme notariale… Le secteur annonce d’ores et déjà de nombreux changements importants. De quoi remettre une brique dans le ventre des Belges?

L’immobilier est sans doute le secteur qui a le moins bien performé en 2022. Avec une augmentation des prix de 5,6%, combinée à une conjoncture difficile et la hausse des taux d’emprunt et des prix des matériaux, les Belges ont repoussé leur désir d’achat et de construction. En 2023, l’inflation se poursuit et quelques changements ont déjà été annoncés. Mais permettront-ils de remettre la machine en route?

Les changements déjà connus…

  • Réforme notariale: 1000 euros de réduction à l’achat d’un bien immobilier

Premier changement, et pas des moindres: le secteur du notariat a bénéficié d’une révision en profondeur, afin notamment d’encourager la modernisation du métier. Mais concrètement, qu’est-ce que cela change pour le candidat-acheteur? L’une des clauses de la réforme est une adaptation des tarifs qui entraînera une baisse des coûts pour 98% des achats de logements en 2023.

Ainsi, les frais de notaire lors de l’achat d’un logement sont désormais fixés à 750 euros et 550 euros respectivement pour l’acte d’achat et l’acte de crédit, alors qu’ils atteignaient facilement 2000 euros au total. Pour l’acte de crédit, une réduction forfaitaire de 20% est mise en place sur les frais pour tous les écrits.

Pour un logement médian de 232.500 euros, cela représente une baisse d’environ 1100 euros des frais de notaire.

  • Hausse du précompte immobilier

Le coefficient d’indexation du revenu cadastral 2023 fait grimper le précompte immobilier de 9,6%.

Le précompte immobilier est un impôt régional que vous devez payer chaque année sur les biens immobiliers. Le calcul du précompte immobilier s’effectue sur la base du revenu cadastral (RC). Or, ce RC est indexé chaque année sur base de l’indice des prix à la consommation. En 2022, il avait augmenté de 2,44% mais suite à l’inflation, il explosera de près de 10% cette année.

Et pour certains, la note sera encore plus salée. Certaines communes ont en effet annoncé qu’elles reverraient à la hausse, dans leur budget 2023, leurs centimes additionnels au précompte immobilier. C’est le cas, entre autres, d’Ixelles, de Watermael-Boitsfort, de Gand ou encore de Forest. Si une partie du précompte immobilier revient aux Régions, une autre est prélevée par les Provinces, et la dernière, et non des moindres, revient en effet aux communes, qui s’attribuent la part du lion.

  • Le certificat PEB pèse davantage dans la balance

Afin de lutter contre les passoires énergétiques, le gouvernement flamand impose désormais une obligation de rénovation des vieux bâtiments. Ainsi, toute personne devenant propriétaire d’un immeuble résidentiel énergivore (label PEB E ou F) devra entreprendre des travaux afin d’améliorer la performance énergétique dudit bien. Il devra ainsi faire en sorte d’obtenir au minimum le niveau de performance énergétique D, et ce dans un délai de cinq ans après l’achat. Cela concerne aussi bien les maisons unifamiliales que les appartements, les studios et les chambres.

À Bruxelles, les autorités ont eux aussi décidé d’accorder de l’importance à ce certificat. Mais autorisent néanmoins un délai supplémentaire pour réaliser de quelconques travaux. En 2025, tous les logements sans exception devront avoir un certificat PEB. Ce certificat obligatoire dressera, outre le score énergétique, une liste de cinq travaux prioritaires à effectuer pour améliorer ledit score. La Région souhaite que toutes les habitations ait atteint un score C d’ici à 2050. Pour ce faire, ces travaux devront être entamés au plus tard à partir de 2030.

  • Fin des primes pour le gaz et le mazout

Depuis le 1er janvier 2023, les primes bruxelloises pour les chaudières au gaz ont été supprimées au profit des primes pour les pompes à chaleur et pour le raccordement à un réseau de chaleur. Il n’y a donc plus de primes pour les chaudières à Bruxelles en 2023.

  • Abattement: nouvelles règles fiscales à Bruxelles et en Wallonie

L’abattement fiscal destiné à faciliter l’acquisition d’un logement familial sera augmenté, sous certaines conditions. Cet abattement fiscal permet au contribuable de réduire la base imposable, c’est-à-dire le montant sur lequel l’impôt est calculé.

À partir du 1er avril, en Région de Bruxelles-Capitale, un acquéreur pourra bénéficier d’un abattement d’un montant de 200.000 euros (autrefois 175.000) si la base imposable du logement ne dépasse pas 600.000 euros. Jusqu’à présent, ce dernier montant s’élevait à 500.000 euros.

Même principe pour les terrains à bâtir. À partir du 1er avril 2023, l’acquéreur pourra bénéficier d’un abattement de 100.000 euros, contre 87.500 euros actuellement, pour une base imposable maximale de 300.000 euros. L’acquéreur pourra également bénéficier d’un abattement supplémentaire s’il procède à des travaux visant à améliorer la prestation énergétique de l’immeuble acquis.

Le gouvernement wallon a quant à lui décidé de doubler l’abattement à 40.000 euros pour autant que le prix du bien immobilier ne dépasse pas 350.000 euros et ce dès l’été 2023. L’abattement envisagé serait dégressif entre 350.000 et 500.000 euros. Au-delà de 500.000 euros, l’abattement serait limité à 20.000 euros.

Mesure similaire pour les terrains à bâtir. L’abattement serait de 40.000 euros pour les terrains de moins de 175.000 euros.

  • Une allocation-loyer de 125 euros pour les candidats-locataires en Wallonie

Une allocation-loyer est entrée en vigueur en Wallonie le 1er janvier dernier. Elle permet aux ménages à revenus précaires, inscrits sur liste d’attente pour l’obtention d’un logement social depuis plus de 18 mois et contraints de louer un bien sur le marché privé, d’obtenir une allocation de 125 euros.

Ce montant sera majoré de 20 euros par enfant à charge, doublé pour les enfants/personnes à charge se trouvant en situation de handicap, avec un maximum de 185 euros par mois.

  • Hausse du tarif social pour l’électricité et le gaz

Le tarif social pour l’électricité et le gaz a augmenté respectivement de 7,8% et 9,7%, selon les données du régulateur fédéral de l’énergie (Creg).

Le tarif social monohoraire pour l’électricité atteindra, au premier trimestre de 2023, 28,579 cents le KWh (26,510 cents au quatrième trimestre 2022), TVA comprise. Pour le gaz, le montant sera de 3,729 cents le KWh (3,400 cents), TVA comprise. Environ 2 millions de personnes ont droit à ce tarif réduit et identique chez tous les fournisseurs d’énergie.

  • La Région bruxelloise réduit son soutien au photovoltaïque

En Région bruxelloise, un système de soutien au photovoltaïque via des certificats verts permet un retour sur investissement en sept ans à ceux qui installent des panneaux. Ce régime est ajusté chaque année en fonction de l’évolution du coût des énergies renouvelables.

En 2023, l’aide accordée aux propriétaires de panneaux photovoltaïques a diminué. “Après analyse et prise en compte de la forte hausse du prix de l’électricité, qui entraîne de facto une rentabilité plus importante, Brugel estime qu’une réduction du niveau de soutien de 19% à 30% est adéquate, selon les catégories de puissance”, avait recommandé le régulateur du marché bruxellois de l’énergie

…et les tendances qui se dessinent

  • Un marché des matériaux qui reste incertain

Tantôt on dit qu’ils baissent, tantôt on annonce qu’ils augmentent… Les prix des matériaux de construction fluctuent ces derniers mois sans toutefois parvenir à se stabiliser. Selon le secteur de la construction, les hausses de prix les plus hautes seraient désormais derrière nous, et pourtant, une nouvelle vague de hausses de prix dans le secteur de la construction est en cours.

Peut-on s’attendre à quelques éclaircies dans les mois à venir? Rien n’est certain… Les fournisseurs de matériaux de construction ont annoncé les nouveaux tarifs pour 2023. Depuis le 1er janvier, on observe ainsi des hausses de prix allant de 10% pour le ciment à 20% pour les produits en béton. Seuls les matériaux non liés à la hausse des prix de l’énergie, tels que le bois (-18 %) et les produits en aluminium (-10 %), ont baissé cette année.

Bref, pour l’instant, tout laisse à penser que l’évolution des prix restera volatil durant les premiers mois de l’année 2023.

  • Des taux d’intérêt très élevés pour les emprunts

Le taux d’intérêt belge à dix ans a encore augmenté, fin 2022, à 3,19%. Or, des taux d’intérêt à long terme plus élevés rendent les emprunts plus chers, en particulier les prêts immobiliers. Le taux moyen pour un prêt de 20 ans est ainsi passé de 1,4 % début 2022 à 3,4 % début 2023. Koen De Leus, chef économiste de BNP Paribas Fortis, s’attend également à un accès plus difficile aux emprunts hypothécaires.

  • Mais une légère baisse des prix de l’immobilier

Néanmoins, malgré les prix des matériaux et de l’énergie qui restent élevés, une baisse des prix de l’immobilier est attendue dans les prochains mois. La banque BNP Paribas Fortis s’attend à un recul des prix d’environ 3% en 2023. Pour ING, ce serait plutôt de l’ordre de 0,5%, avec une baisse plus importante pour les logements énergivores.

  • Une ruée vers les logements moins énergivores

L’énergie coûte de l’argent, un constat qui est sur toutes les lèvres depuis un an… et qui pourrait bien dicter le marché de l’immobilier en 2023. Disparition des primes pour le gaz à Bruxelles, travaux obligatoires en Flandre pour améliorer le PEB… On pourrait bien assister à une véritable ruée vers les logements moins énergivores et les énergies renouvelables. “Dans quelques mois, nous assisterons à une transition des installations au gaz vers les pompes à chaleur”, explique Johan Krijgsman, CEO d’ERA. “Géothermie, panneaux solaires, pompes à eau, etc. Des nouvelles sources d’énergie font chuter les installations gazières de leur piédestal. Dès 2026, aucun raccordement au gaz naturel ne sera plus possible dans les nouveaux projets de construction. Les acheteurs rechercheront principalement ces logements éconergétiques. Nous pouvons donc affirmer avec certitude que l’efficacité énergétique fera une percée définitive sur le marché immobilier en 2023. Le score EPC d’une habitation est désormais plus important que jamais lors d’une vente ou d’un achat.”

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