Comment profiter de la vigueur du billet vert en Bourse

© BELGAIMAGE/Philippe Huguen

En chute libre depuis le printemps dernier, l’euro est revenu à son niveau d’introduction en 1999 par rapport au dollar (1,17) avant même que la BCE n’annonce officiellement son programme d’assouplissement quantitatif. En Bourse, certains secteurs et sociétés apparaissent tout particulièrement bien positionnées pour en profiter.

Le fret maritime

Exmar, Euronav et CMB ne subissent qu’un “effet de conversion” selon les analystes de KBC Securities. Les trois spécialistes du fret maritime réalisent leurs revenus, subissent (l’essentiel de) leurs coûts et publient leurs comptes en dollars. Le principal impact tient donc à la valorisation du titre coté en euros alors que les profits sont en dollars. Dans le cas de CMB ou Euronav, l’impact est mineur, ces deux sociétés étant actives sur des marchés qu’elles espèrent en redressement et ont (sans doute) bouclé 2014 sur une perte nette. Exmar est pour sa part davantage un groupe de projets, surtout depuis qu’il a placé sa flotte de gaziers LPG dans une co-entreprise avec Teekay, lui permettant notamment de concentrer davantage sur le développement d’une plateforme de liquéfaction de gaz flottante. L’impact sur la valorisation est donc réel mais minimisé par la volatilité des résultats.

Les matières premières

Parmi les secteurs censés profiter de l’appréciation du dollar vis-à-vis de l’euro, on retrouve les producteurs de matières premières – les ventes de pétrole, de cuivre ou de blé notamment étant systématiquement réalisées en dollars. Inutile toutefois de vous précipiter sur BHP Billiton. Le premier groupe minier mondial publie ses résultats en dollars et est coté en livres sterling, autre monnaie en verve par rapport à l’euro. Total apparaît ainsi plus indiqué en raison de sa cotation en euros. Le pétrolier souffre toutefois du plongeon de plus de moitié du prix du baril. Le raisonnement est identique pour Vale, deuxième groupe minier mondial. En termes d’activité, l’effet de change est extrêmement attractif entre des coûts en grande partie en réaux brésiliens, à la dérive sur les marchés des changes, et des revenus en dollars. Le prix du minerai de fer, qui représente 85 % des bénéfices du géant brésilien, a toutefois plongé de 47 % en 2014. Pour le secteur des matières premières dans ensemble, l’impact des taux de change apparaît donc très secondaire à quelques exceptions près (voir Nyrstar).

Secteur pharmaceutique

Les Etats-Unis restent de loin le premier marché pharmaceutique avec un tiers des ventes mondiales qui totalisent plus de 1.000 milliards de dollars. Chaque Américain consomme ainsi en moyenne plus de 1.000 dollars de médicaments par an, le double des pays européens. Cet écart s’explique notamment par des prix plus élevés. Selon IMS Heath, les anticancéreux coûteraient entre 20 % et 40 % plus cher outre-Atlantique, permettant aux sociétés pharmaceutiques de dégager des marges supérieures. Roche réalise environ 40 % de ses ventes aux Etats-Unis et devrait donc profiter de l’appréciation du billet vert par effet de conversion. A noter que le franc suisse s’est montré très stable ces dernières années, mais la Banque centrale suisse vient d’annoncer la fin de sa politique de maintien à au moins 1,20 du taux de change euro/franc suisse. Novartis est dans la moyenne mondiale à 33 % inférieur à Sanofi.

Actions européennes Ahold

Le distributeur néerlandais réalise 60 % de son activité aux Etats-Unis. L’effet se limite toutefois à la conversion des résultats, un impact encore réduit par la contraction de prêts en dollars ainsi que par des instruments de couverture. Au total, Ahold évalue qu’une évolution de 10 % du taux de change euro/dollar a un impact de 32 millions, soit 3,4 %, sur son bénéfice avant impôts.

Airbus

Le groupe européen a longtemps souffert du grand écart entre revenus en dollars et coûts en euros. Il a donc pris pour habitude de couvrir son exposition par des approvisionnements en dollars des instruments financiers. Les niveaux de couverture actuels sont évidemment bien plus attractifs mais ne se refléteront dans les résultats du groupe qu’à partir de 2017.

Daimler

Le groupe allemand réalise un quart de ses ventes aux Etats-Unis. Selon le Wall Street Journal, Daimler importe 35 % des véhicules vendus outre-Atlantique, lui offrant un important levier pour profiter du dollar fort.

Fiat Chrysler

Depuis la prise de contrôle totale de Chrysler, le groupe automobile italien réalise la majorité de ses ventes et de ses bénéfices aux Etats-Unis. Le groupe a développé une politique active de couverture mais à relativement brève échéance (12 mois). Il devrait donc profiter de l’appréciation du billet vert dès 2015.

Fugro

Le groupe parapétrolier précise que ses revenus en devises sont généralement couverts par des coûts dans la même monnaie et dépend donc essentiellement d’un effet de conversion. Le bénéfice varie ainsi de 3,4 millions (ou 1,5 %) pour une évolution de 10 % du taux de change euro/dollar.

Sanofi

Le géant pharmaceutique français affirme réaliser plus d’un tiers de ses ventes en dollars américains, une part supérieure à ses coûts. Sanofi estime ainsi qu’une variation de 1 % du taux de change européen a un impact de 0,5 % sur le bénéfice net ajusté.

Wolters Kluwer

Parmi les leaders mondiaux de l’édition professionnelle, le groupe néerlandais réalise la majorité de son activité en Amérique du Nord. Une variation de 1 % du taux de change euro/dollar a un impact de 3 millions, soit quasiment 1 %, sur son résultat net.

Actions belges AB InBev

Le premier brasseur mondial réalise 35 % de son chiffre d’affaires et 44 % de son bénéfice opérationnel en Amérique du Nord mais affiche une couverture naturelle (coûts, dettes) forte. AB InBev publiant ses résultats en dollars, le taux de change a un impact sur la valorisation du titre.

UCB

Le groupe biopharmaceutique réalise plus de 40 % de son chiffre d’affaires en Amérique. UCB a toutefois pris pour habitude de développer une importante couverture, naturelle par les coûts et via des instruments financiers. L’impact sur le bénéfice d’une variation de 10 % de l’euro/dollar est ainsi limité à 3 millions, soit 1,5 %.

Fagron

L’ex-Arseus a réalisé plusieurs acquisitions aux Etats-Unis ces dernières années. La part de l’Amérique du Nord dans les ventes ne cesse ainsi de grimper et atteignait 31 % au 3e trimestre 2014. L’exposition réelle du leader européen des ingrédients pour préparations magistrales est ainsi sans doute supérieure à celle évaluée dans son rapport 2013 : progression de 2,35 millions (ou 4,4 %) du bénéfice imposable en cas de repli de 10 % de l’euro/dollar.

Hamon

Les analystes de KBC Securities évaluent que le spécialiste des tours de refroidissement obtient un tiers de son chiffre d’affaires d’Amérique du Nord. Hamon évalue l’impact d’une évolution de 10 % du taux de change de l’euro sur son résultat opérationnel à 495.000 euros (soit 5 %).

Agfa-Gevaert

Le groupe d’imagerie réalise une part importante de ses ventes en dollars (et devises liées) mais profite également d’une couverture naturelle au travers notamment de ses achats de matières premières comme l’argent. Agfa-Gevaert estime en définitive qu’une variation de 10 % de l’euro/dollar a un impact de 5,7 millions ou 6,2 % sur ses profits.

Tessenderlo

Les analystes de KBC Securities épinglent que Kerley, filiale américaine du groupe, représente environ 20 % de son chiffre d’affaires et surtout, près de la moitié de son excédent brut d’exploitation. Tessenderlo évalue ainsi qu’une appréciation de 10 % du dollar dope son bénéfice net de 4,7 millions, non négligeable pour une société ayant enregistré un profit de 27,7 millions au premier semestre 2014.

Melexis

Le dollar est la principale devise du spécialiste des semi-conducteurs pour le secteur automobile avec 54 % des ventes et 49 % des coûts. Combiné à l’effet de conversion, cela laisse une sensibilité du résultat imposable estimée à 3,5 millions, ou 5 %, pour une variation de 0,10 du taux de change euro/dollar.

Delhaize

Le distributeur au lion est historiquement très actif aux Etats-Unis où il réalise près de deux tiers de son chiffre d’affaires. Les coûts et les dettes y afférents sont toutefois également libellés en dollars, laissant une exposition nette des bénéfices évaluée à 1 million (ou 0,6 %) pour une évolution de 0,01 de la parité euro/dollar.

Barco

Le groupe réalise près d’un tiers de ses ventes en Amérique du Nord. Sa couverture naturelle par les coûts est estimée à 65 %, laissant une sensible exposition à l’euro/dollar. Une évolution de 10 % du taux de change a ainsi un impact sur le profit opérationnel de 18 millions, soit 23 %.

Nyrstar

Le spécialiste du zinc est sans doute le plus exposé au dollar. Une évolution de un centime (0,01) du taux de change euro/dollar a impact estimé à 18 millions sur son excédent brut d’exploitation (EBE), soit 9,7 % suivant les résultats 2013. Son EBE pourrait donc potentiellement quasiment tripler grâce à la chute de l’euro par rapport au dollar depuis la fin 2013.

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