Valeurs bancaires: des opportunités près de chez nous

Les actions bancaires européennes s’échangent à des niveaux de valorisation (très) faibles, mais qui pourraient devenir encore plus séduisants. Nous ne nous empresserions dès lors pas de les acquérir.

Depuis 2007, nous ne sommes guère friands de valeurs financières. Certes, la conjoncture a pourtant parfois semblé propice à un investissement dans les actions bancaires européennes, ces dernières années. Comme au début de 2018, quand il avait été question d’une croissance synchrone (sur le plan géographique) de l’économie mondiale. Mais en raison de l’incertitude politique dans certains pays, dont l’Italie, il y a peu de raisons d’investir dans le secteur bancaire européen. Heureusement, plus près de chez nous, il demeure possible de réaliser des profits.

Sérieux retard

Une décennie s’est déjà écoulée depuis le début de la crise financière et pourtant, les actionnaires du secteur financier européen n’ont toujours pas vraiment de quoi se réjouir. Sur les 10 dernières années, un investissement dans l’indice Stoxx 600 Banks, qui regroupe les principales actions bancaires européennes cotées, a en effet produit un return, ou rendement total (évolution du cours + dividendes), de 6% à peine (0,6% l’an, en moyenne), essentiellement parce que ces actions coûtent en moyenne 24% de moins qu’en 2008. A titre de comparaison, l’indice Stoxx 600 affiche un return de 151% (9,7% par an, en moyenne) depuis septembre 2008. Le différentiel de rendement entre les deux indices est énorme (145%)! De 47%, il est encore net, mais moindre, sur les cinq dernières années: le return des valeurs bancaires européennes est tout simplement négatif (-15%, qu’explique le recul de 30% en moyenne des cours des valeurs du Stoxx 600 Banks), tandis qu’il s’établit à 32% pour les valeurs du Stoxx 600. Même constat sur les 12 derniers mois : l’écart se monte à -17,5% (return de -18,5% pour l’indice exposé au secteur bancaire européen, contre -1% pour le Stoxx 600). Avec l’industrie automobile, le secteur bancaire compte parmi les moins performants d’Europe.

Des valorisations attrayantes

L’Europe ne s’est hélas pas consacrée sans réserve à assainir les bilans des banques. Elle compte encore beaucoup d’établissements disposant de trop peu de liquidités et ne survivant qu’en s’endettant – des “banques zombies”. L’Italie, surtout, abrite des banques terriblement sous-capitalisées.

Le taux négatif imposé par la Banque centrale européenne (BCE) pour endiguer la vague récessionniste et déflationniste a eu pour effet, notamment, de réduire la capacité de gain des banques. Or, les nombreuses réglementations et taxes adoptées depuis la crise minaient déjà leur rentabilité. La politique d’assouplissement quantitatif que la BCE a adoptée en janvier 2015 n’y a rien arrangé; elle a de surcroît accéléré la baisse des cours des valeurs du secteur. Le sentiment très négatif du marché à l’égard de ce dernier n’a bien entendu pas contribué à accroître les valorisations: il faut débourser en moyenne, pour les (47) valeurs du Stoxx 600 Banks, seulement 0,7 fois leur valeur comptable (contre 1,7 fois, en moyenne, pour les actions de l’indice Stoxx 600) et 9 fois le bénéfice visé en 2019 (mais 14 fois, pour le Stoxx 600), alors que le rendement moyen du dividende est de 5,4% brut (3,8%, pour l’indice Stoxx 600). Les actions du secteur n’avaient encore jamais été évaluées aussi faiblement par rapport à la moyenne du marché. Les valeurs boursières sont sous-évaluées par rapport à la valeur de l’actif des sociétés également (moins de 18%; contre près de 27% en 2007).

Qui, au milieu de la décennie passée, aurait pu imaginer que les titres bancaires compteraient parmi les laissés pour compte, en 2020? Ces dernières années, les résultats des banques sont nettement moins volatils – les bénéfices gagnent en prévisibilité. Pour autant, les valorisations ne s’apprécient pas. Le contraste avec le secteur bancaire américain est frappant. Outre-Atlantique, en effet, les actions ont retrouvé leur moyenne historique.

Pas de ruée

En dépit de leur faible valorisation, les investisseurs ne se ruent pas sur ces valeurs (européennes). C’est qu’il y a encore beaucoup d’ombres au tableau. Les banques italiennes tirent vers le bas la moyenne européenne. Depuis la crise financière, les banques européennes sont moins rentables structurellement. Les marges bénéficiaires se contractent. Or, les coûts structurels sont (trop) élevés. Enfin, la concurrence s’intensifie: les géants technologiques (GAFA : Google, Amazon, Facebook, Apple) deviennent aussi des banques.

En Europe, il n’y a pas que les banques italiennes qui sont malades. L’allemande Deutsche Bank (DB), qui a été impliquée dans nombre de scandales, est à la peine elle aussi. Son cours a cédé 82% en 10 ans. La banque a usé une poignée de CEO et multiplié les réorientations stratégiques au cours de la décennie, mais n’est toujours pas rentable structurellement. Il va sans dire que le titre DB est un investissement très risqué. Le bilan de la banque paraît toujours fragile, son exposition aux produits dérivés est excessive. Conscient de l’ampleur du risque (de défaut), le gouvernement allemand a tenté d’imposer la fusion de DB avec une autre banque privée allemande, la Commerzbank – malade elle aussi; son titre a perdu 78% de sa valeur, sur les 10 dernières années. Mais les négociations entre les deux établissements n’ont pas abouti. Le système bancaire allemand n’a, lui non plus, pas encore résolu ses problèmes.

Exceptions

En Belgique et aux Pays-Bas, il est encore possible de réaliser des profits. KBC, par exemple, est parvenu à renouer avec la rentabilité. Le bancassureur a porté ses ratios largement au-dessus de la moyenne. Ses résultats sont de surcroît stables. Son action est du reste la plus performante de l’indice Stoxx 600 Banks sur les 10 dernières années. Elle affiche un return de +327%, nettement supérieur à la moyenne des valeurs bancaires européennes (-24%).

Il est dommage pour le secteur belge que l’introduction en Bourse de Belfius prévue l’an dernier ait été ajournée. Belfius se serait profilée comme une valeur de rendement.

Pour investir dans le secteur bancaire européen, nous conseillons les titres d’institutions proches de chez nous, qui publient des résultats plus stables (KBC, ABN AMRO, BNP Paribas et ING). Le malaise ambiant sur les marchés d’actions pourrait ramener leurs valorisations à des niveaux encore plus attrayants au cours des mois à venir. Ceux qui préfèrent aux titres individuels un investissement diversifié dans le secteur européen, pour miser sur le redressement espéré, peuvent opter pour le tracker iShares Stoxx 600 Banks (13,27 euros; cotation à Francfort; plus-haut et plus-bas atteints ces douze derniers mois: 17,86 et 12,67 euros; code ISIN: DE000A0F5UJ7), qui réplique l’évolution de l’indice Stoxx 600 Banks.

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