Danny Reweghs
Une Bourse japonaise bon marché, mais mal-aimée
A contre-courant de la tendance, Warren Buffett a dernièrement investi au Japon, dont l’économie est pourtant asthénique. Mais la faible valorisation des titres et le soutien de la banque centrale rendent ces actions intéressantes à des fins de diversification.
La Bourse japonaise s’est retrouvée sous les feux de la rampe début septembre, lorsqu’il est apparu que le légendaire Warren Buffett avait investi 6,5 milliards de dollars dans cinq sociétés de trading japonaises via son véhicule d’investissement Berkshire Hathaway. Si le Japon est toujours la troisième économie mondiale, elle ne brille plus depuis un certain temps déjà – nombre d’économistes la jugent même “comateuse”, car elle peine à générer de la croissance et connaît régulièrement des phases de récession. De plus, le pays souffre d’une déflation chronique: cette baisse du niveau moyen des prix est désastreuse pour la consommation intérieure, les nouveaux achats étant reportés car les consommateurs anticipent une baisse des prix.
Le grand coupable, bien sûr, est le vieillissement de la population japonaise. Aujourd’hui, les plus de 65 ans représentent 28% de la population; les femmes japonaises vivent 87 ans en moyenne. Le pays du soleil levant compte aujourd’hui 70.000 centenaires, un record mondial. Il ne reste que deux actifs pour chaque retraité – un désastre pour l’économie. Le taux de natalité est faible: environ 1,5 enfant par femme, alors qu’il en faut 2,1 pour maintenir la population au même niveau. En outre, 14% des femmes japonaises de 50 ans ne sont pas mariées, alors que le célibat assumé n’a guère sa place dans la société japonaise. Le pays comptait 128,5 millions d’habitants en 2010, mais 126,5 millions en 2020; en 2050, la population japonaise devrait avoir fondu à 109 millions d’habitants. Le coût des soins de santé et des soins aux personnes âgées a déjà doublé entre 1990 et 2020, de 11 à 22% du produit intérieur brut.
Le problème du vieillissement de la population est renforcé par l’immobilisme politique. Le populaire Premier ministre Shinzo Abe a démissionné il y a peu pour des raisons de santé. Son successeur, Yoshihide Suga, s’est empressé de déclarer qu’il poursuivrait sa politique, les Abenomics, qui font la part belle aux incitations fiscales et monétaires, mais sans réformes sociales approfondies.
Extrêmement bon marché
Les investisseurs étrangers ont perdu confiance dans la Bourse japonaise et cédé 43 milliards de dollars d’actions japonaises l’année dernière. Les indices n’en ont pas vraiment souffert, car depuis plusieurs années maintenant, la Banque du Japon achète aussi des actions et est déjà, indirectement, le principal actionnaire de nombreuses entreprises.
Le choix de Warren Buffett n’est bien sûr pas dû au hasard, vu la faible valorisation des titres japonais par rapport aux américains, avec par exemple un rapport moyen cours/valeur comptable de 1,2 seulement, contre près de 3 pour le S&P 500. Ajoutons-y le soutien de la Banque du Japon, et la prise d’une petite position en actions japonaises à titre de diversification se justifie. Le tracker peut être une piste intéressante.
Stratégie
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