Les géants des équipements sportifs

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Si les clients achètent moins dans les magasins physiques, ils commandent davantage en ligne. Les experts s’attendent à ce que le commerce virtuel s’adjuge une part croissante du chiffre d’affaires du secteur dans les mois et les années qui viennent.

C’est le 12 juin qu’aurait dû être donné le coup d’envoi du championnat d’Europe de football, et au 24 juillet qu’était fixée l’ouverture des Jeux olympiques de Tokyo. Finalement donc, point d’été faste pour les géants du sport, tous les événements ayant été reportés à 2021. Les producteurs d’équipements attendent désormais avec impatience l’année prochaine, mais aussi 2022, qui sera marquée par les Jeux olympiques d’hiver et la Coupe du monde de football. Le manque à gagner provoqué par le Covid-19 est colossal, mais l’investisseur mise déjà sur le rattrapage que devraient autoriser les deux années qui viennent.

Under Armour: l’exception

Aucun géant du secteur n’est particulièrement généreux sur les dividendes mais chez Under Armour, la question n’est carrément jamais à l’ordre du jour. Evidemment, le premier trimestre n’a guère été brillant. Le confinement a coûté au groupe 23% de son chiffre d’affaires (CA). Aux Etats-Unis (65% du CA), les résultats ont été particulièrement médiocres: le CA réalisé là-bas a fléchi de près d’un tiers, ce qui s’est traduit par une perte de 589 millions de dollars (contre un bénéfice de 22,5 millions de dollars un an plus tôt).

L’on a appris fin 2019 qu’Under Armour était soupçonné de fraude comptable (il aurait falsifié à la hausse ses chiffres de vente). Ce n’est pas la première fois qu’il se retrouve dans l’oeil du cyclone. Sa collaboration avec le basketteur vedette Stephen Curry est à la fois une aubaine et une malédiction pour le groupe, dont l’homme est devenu l’enseigne vivante du département le plus important: celui des chaussures. Mais les ventes fluctuent au gré des succès et des défaites du champion en NBA et le cours de l’action suit généralement la même tendance. Par ailleurs, les convictions de Kevin Plank, le fondateur et dirigeant d’Under Armour, sont un peu trop proches de celles de Donald Trump; ses prises de position étant mal accueillies, il a annoncé, fin 2019, son intention de faire un pas de côté. Ça n’a pas toujours été le cas mais il existe aujourd’hui dans le secteur des actions plus intéressantes que celle d’Under Armour.

Adidas: le meilleur choix

Adidas, par exemple – il s’agit même du choix le plus intéressant à l’heure actuelle. Son CA (4,75 milliards d’euros) a chuté de 19% au premier trimestre et le repli, au deuxième, devrait être deux fois plus marqué. En Asie, les ventes ont reflué de près de 50%, pour reprendre toutefois timidement en mai. La situation a été difficile en Europe et en Amérique latine également, mais l’Amérique du Nord a surpris, dans le bon sens. Le CA total devrait s’être tassé de 40% au deuxième trimestre.

Cela dit, si les clients achètent moins dans les magasins physiques, ils commandent davantage en ligne. Et pas que chez Adidas. Les experts s’attendent à ce que le commerce virtuel s’adjuge une part croissante du CA dans les mois et les années qui viennent. Disposer d’un site web convivial et d’un marketing numérique intelligent est donc fondamental. La création et la maintenance d’un site performant coûtent certes très cher, mais nettement moins que l’exploitation d’un magasin physique et la rémunération d’une équipe de vente. Le virtuel n’est qu’une des multiples façons dont Adidas sabre dans les dépenses. Kasper Rorsted, le CEO du groupe, a par ailleurs conclu le rapport trimestriel sur une note positive: dans sa volonté de rester en forme, le consommateur fait toujours plus de sport. “Les résultats vont donc s’améliorer encore”, prédit-il.

A l’instar de ses concurrents, Adidas insiste de plus en plus sur la dimension écologique de ses produits. Il a donc récemment annoncé une collaboration avec Allbird, jeune société (2014) en compagnie de laquelle il compte développer la chaussure de sport à l’empreinte écologique la plus faible. Adidas, comme Nike, profite de la mode athleisure, qui consiste à porter en rue le vestiaire sportif, une tendance à laquelle le magazine économique Forbes prédit un bel avenir. Selon maintes études, les ventes de vêtements de sport auront longtemps encore le vent en poupe.

A la mi-mars, le cours de l’action Adidas était retombé au niveau affiché il y a trois ans (166 euros). Il a toutefois rebondi de 35% depuis et devrait, à mesure qu’approcheront les événements sportifs de 2021, se diriger vers ses sommets historiques, aux alentours de 300 euros. Ce qui serait une bonne nouvelle pour le holding belge GBL, dont Adidas est la principale participation.

Nike: le plus généreux

Le plus grand fabricant de chaussures et de vêtements de sport au monde commercialise des produits dans pratiquement toutes les grandes disciplines sous la marque Nike, mais aussi sous les enseignes Jordan, Converse et Hurley. Nike a achevé le premier trimestre sur un bénéfice de 0,70 dollar par action, alors que les prévisions faisaient état de 0,58 dollar. Son CA a augmenté de 10%, à 10,3 milliards de dollars, un résultat lui aussi supérieur au consensus. La fermeture temporaire de nombreux magasins en Chine, aux Etats-Unis et en Europe ne l’a évidemment pas épargné et son action a lourdement chuté au début de la crise. Mais elle se redresse résolument depuis, et n’est plus très loin de ses sommets historiques, à plus de 105 dollars. Nike est extrêmement bien implanté sur le marché asiatique (Chine et Vietnam) et très avancé en matière de numérisation, gage d’efficacité. Il verse près de la moitié de son bénéfice à ses actionnaires, ce qui fait de lui le groupe le plus généreux du secteur. Ses ventes en ligne sont bien supérieures à ce qu’elles étaient avant la pandémie; aux Etats-Unis, en particulier, ces transactions ont été multipliées par 2,5. Les vêtements outdoor et les chaussures se vendent mieux que jamais.

Puma: l’action la plus performante

Chez Puma, le commerce électronique représente moins de 10% des ventes. Avec un CA total proche des 5 milliards d’euros, Puma est bien plus petit qu’Adidas (20,5 milliards) et que Nike (38,5 milliards). Il n’est actif que dans un nombre limité de catégories (football, course à pied, basket-ball, golf et sports motorisés); il possède les marques Puma, Cobra Golf et stichd, moins connue chez nous.

Le CA du premier trimestre a mieux résisté que prévu. Il a progressé de 4% en Europe et de 3% en Amérique du Nord. Il a cédé 12% dans la région Asie-Pacifique, mais les chiffres sont, l’un dans l’autre, meilleurs qu’espéré. Le bénéfice a toutefois souffert de la hausse des dépenses d’exploitation et des coûts inhérents aux commerces électronique et de détail. Le bénéfice opérationnel s’est tassé de 50%, à 71,2 millions d’euros (142,5 millions l’an passé). A -62%, la chute du bénéfice net et du bénéfice par action est plus violente encore. Les mesures de réduction des dépenses n’ont eu qu’une influence limitée sur les chiffres du premier trimestre, mais la direction en espère davantage au deuxième. Prudent, le groupe ne versera pas de dividende cette année. Contrairement à 2020, l’exercice 2019 avait été brillant – le CA avait bondi de plus de 18% et le bénéfice brut, de 40%. Le cours était dès lors passé de 50 euros en début d’année à 70 euros fin décembre, ce qui avait fait du titre l’une des actions allemandes les plus performantes. Sur cinq ans, il caracole en tête des actions des fabricants d’équipements sportifs. Avec une participation de près de 29%, le holding Artemis (famille à laquelle appartiennent également Kering et Pinault) est le principal actionnaire de Puma.

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