L’eau, le nouvel or bleu
Nonante-sept pour cent de l’eau qui recouvre la planète est salée et des 3% restants, 1% à peine est propre à la consommation humaine. L’eau est donc bien une matière première rare et, dès lors, précieuse. Elle devient même de plus en plus introuvable.
L’eau passe encore très inaperçue dans le domaine du développement durable. Mais cela pourrait changer bien vite, car sa disponibilité et sa qualité vont devenir des enjeux cruciaux. L'”empreinte hydrique” est peu à peu prise en compte dans le calcul de la note de développement durable accordée aux entreprises; la faiblesse de cette empreinte pourrait bien devenir aussi importante que celle de l’empreinte carbone.
Rendement supérieur
Si le thème de l’eau commence à gagner en importance, il n’est pas complètement neuf. Cela fait plus de 15 ans en effet que des produits d’investissement dédiés sont disponibles. Les actions mondiales affichent un rendement de 7,37% l’an en moyenne sur les 15 dernières années. Un indice comme le S&P Global Water enregistre un rendement (certes, pas toujours linéaire) de plus de 11%.
En soi, l’eau n’est pas rare: elle recouvre 70% de la superficie de la planète. Mais 97% de cette eau est salée et des 3% restants, 1% à peine est propre à la consommation humaine. L’eau est donc bien une matière première rare et, dès lors, précieuse. Elle devient même de plus en plus introuvable: sa consommation ne cesse d’augmenter alors que la quantité disponible diminue sous l’effet de la pollution des lacs et des rivières et du changement climatique. Les Américains consomment 200 bouteilles d’eau par an – c’est deux fois plus qu’il y a 10 ans. Selon les experts, la demande va enregistrer une croissance explosive ces prochaines années. L’eau est donc bien en passe de devenir le nouvel or bleu. Alors qu’il n’a gagné qu’un peu plus de 5% ces cinq dernières années, le S&P Global Water devrait enregistrer une nette accélération à l’avenir. Les entreprises spécialisées recèlent donc d’intéressantes opportunités de croissance.
“Trackers” et fonds
Des centaines de sociétés cotées sont actives dans le secteur. Celles spécialisées dans le captage affichent depuis quelques années des performances en moyenne supérieures aux résultats du S&P 500. Il est par ailleurs possible d’acquérir des trackers qui répliquent certains indices. Le Dow Jones US Water Index se compose d’actions de 29 entreprises qui opèrent dans le secteur. L’ISE-B & S Water Index vise les spécialistes des solutions de distribution et de filtration, notamment. Les trackers du Bloomberg World Water Index et du MSCI World Water Index suivent des sociétés actives dans le monde entier, pas seulement aux Etats-Unis.
Des fonds sont disponibles également. Pionnier des investissements thématiques, Pictet-Water a progressé de 298,1% depuis son lancement, en 2000, alors que le rendement du benchmark s’établit à 104%. BNP Paribas a confié la gestion de son fonds Parvest Aqua à Impax, gestionnaire spécialisé dans l’investissement durable. Les entreprises sont sélectionnées en fonction de leurs performances en matière de développement durable et de la qualité de leur structure financière et/ou du potentiel de croissance de leur bénéfice. Le fonds de RobecoSAM se concentre sur les entreprises exposées à raison de 20% au moins au thème de l’eau. Avec son Funds Aqua Classic, BNP Paribas propose énormément de fonds spécialisés. KBC (Eco Water) n’est évidemment pas en reste.
L’investisseur en quête d’actions individuelles retiendra que le secteur est très vaste et que toutes les niches ne sont actuellement pas également prometteuses. Trois segments nous paraissent particulièrement importants.
Infrastructure hydraulique
L’infrastructure hydraulique fait intervenir producteurs d’équipements (pompes, vannes, contrôle des débits, etc.), bureaux d’ingénierie et de conseil et fabricants de matériel d’irrigation. Les entreprises de distribution réglementées, autorisées à répercuter leurs dépenses augmentées d’une marge bénéficiaire, sont un investissement sûr.
Entreprise innovante qui investit davantage que ses concurrentes, Xylem est bien positionnée pour profiter d’une myriade de projets entamés dans le secteur des eaux usées. Sa vaste gamme de produits d’épuration lui permet de surfer sur cette niche en pleine croissance.
Geberit produit et fournit conduites et raccords, systèmes sanitaires et bien d’autres choses encore pour les marchés de la construction commerciale et résidentielle. Sa stratégie repose sur quatre piliers: la technologie sanitaire, l’innovation, l’expansion géographique sélective et l’optimisation de ses processus opérationnels. L’entreprise, dont les produits sont distribués en gros, forme ou fait former chaque année plus de 100.000 plombiers et décisionnaires. Sa capacité d’innovation, ses produits et sa politique de développement durable ont été plusieurs fois récompensés. Il s’agit d’un groupe solide, au bilan équilibré et à la marge d’Ebitda (cash-flows opérationnels/chiffre d’affaires) élevée.
Captage et distribution
Parmi les activités de distribution d’eau et de traitement des eaux usées, citons le captage et la distribution, l’épuration, le traitement et le recyclage des eaux usées, des eaux de puits, d’égouttage et pluviales, ainsi que la gestion et la construction de digues et d’infrastructures diverses.
Le groupe Suez appelle les responsables politiques à investir davantage dans les infrastructures. Il estime les subventions supplémentaires nécessaires d’ici à 2025 à 3,3 milliards d’euros par an pour l’eau, 1,75 milliard d’euros pour le traitement des déchets et 450 millions pour l’air (27,5 milliards d’euros sur cinq ans, soit 0,1% environ du PIB annuel de la France). Numéro 1 mondial dans la gestion de l’eau, des déchets et des matériaux, Suez a réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 18 milliards d’euros, pour un bénéfice de 350 millions d’euros.
Active dans plusieurs Etats des Etats-Unis ainsi qu’en Ontario, au Canada, American Water Works est surtout spécialisée dans l’administration d’entreprises réglementées qui fournissent des services de gestion de l’eau et des déchets à une clientèle particulière, commerciale et industrielle. Elle est la plus grande entreprise liée à l’eau cotée en Bourse, où son action enregistre d’excellentes performances depuis dix ans. Son chiffre d’affaires a augmenté de 3% l’an en moyenne (grâce, principalement, à des acquisitions) ces cinq dernières années. Son bénéfice par action a progressé de 16,5%. Nous avons là une entreprise solide, aux fondamentaux robustes, qui mérite une place dans tout portefeuille d’investissement.
Technologies de traitement
On entend principalement par technologies de traitement les systèmes de récupération, de filtration et d’épuration des eaux, de traitement des boues, de décontamination, d’ozonisation, de chloration, de dessalement, de traitement des dépôts de calcaire et autres contrôles bactériologiques encore.
Energy Recovery fournit des solutions énergétiques au sens large. Leader sur le marché des appareils de récupération d’énergie, elle met en oeuvre des solutions modulaires très efficaces de récupération de l’énergie perdue lors du dessalement de l’eau de mer, une activité dont l’importance ne cesse par ailleurs de croître.
La finlandaise Kemira a été fondée en 1920 sous le nom de Valtion Rikkihappoja Superfosfaattitehtaat Oy (entreprise d’Etat pour la production d’acide sulfurique et de superphosphates), peu fait pour soutenir les velléités d’internationalisation, ce qui lui a valu d’être rebaptisée en 1968. C’est donc une entreprise initialement chimique qui utilise ses produits pour l’épuration des eaux, notamment. A un rapport cours/bénéfice de 15, son action est une des moins onéreuses du secteur.
Stratégie
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