Le point sur les devises (II)

Poursuivant la série entamée la semaine dernière, nous passons en revue cinq autres devises clés, à l’aube du second semestre de 2022. Voici le deuxième volet, lui-même articulé sur trois jours (premier jour), consacré aux principales devises régulièrement évoquées sous cette rubrique.

Couronne norvégienne

Fin juin, la banque centrale norvégienne a relevé son taux directeur de 0,75 à 1,25%, et annoncé qu’elle ne s’arrêterait pas là: un nouveau tour de vis de 0,25% devrait suivre fin août, une décision apparemment inévitable face à l’inflation qui continue de flamber. A l’image de Christine Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Ida Wolden Bache, à la tête de la Norges Bank, a choisi la voie de la modération. Pour la première fois depuis 2011, la BCE va procéder à un relèvement de taux, mais de 0,25% “seulement” (0,5%, si la pression inflationniste reste trop forte). Ida Wolden Bache a pour sa part déclaré que malgré le resserrement, les taux restent bas et la politique monétaire demeure conciliante. Jerome Powell, le président de la banque centrale américaine (Fed), a au contraire réaffirmé lors du récent sommet au Portugal qu’il valait mieux appuyer trop que trop peu sur le frein.

Pour autant, la couronne norvégienne (NOK) ne deviendra pas plus onéreuse. Les Norvégiens paient même pour un euro 2% de plus qu’il y a un an, et 10% de plus qu’il y a cinq ans. Mais les revenus colossaux du pétrole et du gaz assurent la robustesse de l’économie. Ceci dit, les experts commencent à douter de l’influence sur le gouvernement d’un lobby environnemental qui relègue l’économie au second plan. Il est dès lors légitime de s’interroger sur la place de la NOK dans les portefeuilles obligataires.

Couronne suédoise

La couronne suédoise (SEK) est encore plus mal lotie que sa voisine norvégienne: sa valeur a diminué de 6% par rapport à l’euro en un an. Sur le long terme, c’est pire encore. Si les Suédois déboursaient 8,3 SEK pour un euro il y a 10 ans à peine, ils doivent aujourd’hui se délester de 10% de plus (10,7 SEK). L’économie a signé un mauvais premier trimestre en 2022, puisque son PIB a reculé de 0,4%. L’inflation, à 7,5%, ronge le pouvoir d’achat des Suédois.

La Riksbank, la banque centrale, souhaitait initialement maintenir son taux directeur à zéro jusqu’en 2024, mais elle a été contrainte de revenir sur sa décision; elle a donc fait passer le taux en territoire positif (+0,25%) pour la première fois depuis 2014; avant de procéder à un nouveau relèvement, de 0,50%, le 30 juin. Le taux directeur de la plus ancienne banque centrale au monde s’établit donc désormais à 0,75%. Le ministre des Finances, Mikael Damberg, a abaissé les prévisions de croissance du pays à 1,9% pour 2022 (contre plus du double il y a quelques mois encore); il a aussi revu à la baisse celles de 2023. La situation évolue rapidement.

Ces rapports inquiétants nous incitent à la méfiance. Le différentiel de taux avec les prêts en euro est trop faible pour courir le risque de change qu’engendre un emprunt en SEK.

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