Le pétrole au plus haut, les actions au plus bas
Les cours des actions du secteur n’ont, en particulier depuis l’été 2017, pas suivi l’ascension du cours de l’or noir. Tel est le premier de nos arguments en faveur d’un investissement dans les pétrolières.
Le cours du pétrole atteint presque chaque jour de nouveaux sommets. Entre l’automne 2014 et le début de 2016, le baril de Brent avait plongé de 115 à 28 dollars. Le phénomène était essentiellement dû à une crise de l’offre, intimement liée à l’accélération de l’extraction en eaux profondes et dans les sables bitumineux et, plus encore, à l’essor spectaculaire du pétrole de schiste aux Etats-Unis.
Auparavant, en cas d’offre excédentaire, l’Arabie Saoudite aurait réduit sa production. Cette fois, elle a gardé les robinets ouverts pour, notamment, entraver la progression du pétrole de schiste. Elle ne voulait de surcroît pas offrir sur un plateau d’argent un cours élevé à l’Iran, son éternel rival, qui, après l’accord sur le nucléaire, avait été autorisé à reprendre ses exportations vers l’Occident.
Retour à 100 dollars ?
En novembre 2016 néanmoins, l’OPEP a, pour la première fois depuis des décennies, décidé de diminuer sa production quotidienne de 1,2 million de barils. Onze pays non-membres, dont la Russie, lui ont emboîté le pas (-500.000 barils chacun). C’est à la suite de cet accord ” historique ” que le Brent est passé de 45 dollars à 85 environ aujourd’hui. Pour la première fois depuis longtemps, des traders et autres spécialistes évoquent un possible retour du cours à 100 dollars.
Car si les limitations de production ont été, depuis, partiellement levées, cela ne devrait pas suffire à compenser la chute imminente des exportations iraniennes. Les Etats-Unis ont décrété un boycott à partir de novembre et tous les pays qui voudront continuer à commercer avec eux seront priés d’en faire autant. En septembre, l’Iran a écoulé 260.000 barils par jour de moins en moyenne (-13%) qu’en août. L’Irak a nettement accru sa production ces derniers mois, mais le pays est loin de pouvoir compenser la chute côté iranien. L’Arabie Saoudite et la Russie le pourraient, mais elles n’ont aucune envie de se précipiter: la première veut en effet introduire en Bourse Aramco, sa compagnie publique, au cours le plus élevé possible et l’économie de la seconde s’accommoderait bien d’un pétrole cher.
De nombreux arguments
Les actions du secteur n’ont, en particulier depuis l’été 2017, pas suivi l’ascension du cours de l’or noir. Ce constat s’applique aux majors classiques et, plus encore, aux prestataires de services. Tel est donc le premier de nos six arguments en faveur d’un investissement dans les pétrolières.
1. Les cours des actions n’imitent pas le cours du pétrole: c’est rare, mais le net redressement du cours du pétrole ces 30 derniers mois et, surtout, son accélération récente, ne se sont traduits que par une très modeste hausse des actions des compagnies classiques et des prestataires de services. C’est ce que démontre par exemple l’évolution du Stoxx600 Oil&Gas Index par rapport à celle du cours du pétrole exprimée en euro. Depuis le début de l’année, l’indice accuse un retard de 14% sur le prix de l’or noir. L’écart atteint même 16% en glissement annuel. Les valeurs pétrolières devraient pourtant se montrer bien plus performantes, en raison de l’effet de levier exercé sur les bénéfices des compagnies. L’examen des performances des entreprises de services aboutit à un constat plus frappant encore: sur ces 12 derniers mois, VanEck Vectors Oil Services, le tracker spécialisé le plus suivi, a cédé 45% au baril de Brent; depuis le début de 2018, l’écart a atteint 28% (0, contre 28%). Si l’on remonte deux ans en arrière, l’on constate qu’il culmine même à 76% (-13, contre 63%). Le marché agit en d’autres termes comme si le pétrole s’échangeait toujours aux alentours de 60 dollars.
2. Les compagnies surveillent toujours leurs coûts: économies de coûts, désinvestissements, recentrage sur le coeur d’activité… ont à ce point accru les cash-flows disponibles qu’un Brent à 52 dollars peut désormais générer suffisamment de liquidités pour couvrir les dividendes; l’an dernier, il fallait pour cela que le baril s’échange à 59 dollars.
3. Les investissements devraient augmenter en 2020: l’accélération des cash-flows accroît la probabilité que l’on assiste, pour la première fois depuis 2013, à une augmentation planétaire des investissements dans tous les domaines de l’industrie (offshore, onshore, etc.) en 2020. Les investisseurs commenceront à anticiper ce redressement l’an prochain.
4. Le rendement des dividendes est élevé: dans un environnement de taux bas, les valeurs pétrolières disposent d’un atout important: le rendement de leurs dividendes. Le secteur affiche actuellement un rendement supérieur de 1,1% à la moyenne boursière – grâce, surtout, aux majors.
5. Le secteur de l’énergie est traditionnellement performant en fin de cycle: les valeurs du secteur de l’énergie ont surperformé le marché en 1998-2000 et en 2006-2008; en d’autres termes, il est souvent (très) rentable de détenir des actions liées à l’énergie en fin de cycle boursier.
6. Les valorisations se basent sur un cours du pétrole compris entre 60 et 65 dollars: il n’est nul besoin que le cours de l’or noir augmente encore pour pronostiquer une augmentation des cours des valeurs pétrolières. Même si le premier se stabilisait ou retombait à 70 dollars ces six à douze prochains mois, il serait logique que les cours des actions remontent, car les valorisations actuelles correspondent toujours à un prix de 60-65 dollars le baril.
Opportunités pour 2019-2020
Autant d’arguments, donc, en faveur d’une accélération des investissements dans le secteur, ces prochaines années. L’éventail de produits disponibles est très large. Il est possible d’investir dans des géants comme Royal Dutch Shell ou Total, intéressants en raison du rendement élevé de leur dividende, notamment. Mais ce sont les actions du secteur des services, restées très en retrait, qui recèlent le potentiel le plus marqué. Schlumberger et TechnipFMC (défensives) sont nos préférées – elles figurent d’ailleurs dans le portefeuille modèle. L’investisseur qui préfère ne pas acheter d’actions individuelles notera que les trackers sur les prestataires de services pétroliers, comme VanEck Vectors Oil Services, tous basés aux Etats-Unis, ne peuvent plus être commercialisés en Belgique.
Stratégie
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