Danny Reweghs
Le Japon, la grande surprise de 2023?
Si la tendance se poursuit, le yen pourrait continuer à regagner du terrain face au dollar et à l’euro. Il faudrait alors miser à la baisse sur les obligations (souveraines) japonaises, comme ce fut le cas il y a un an pour les obligations (souveraines) européennes et américaines.
Pays vaste et célèbre, le Japon n’a reçu que peu d’attention de la part du monde financier ces dernières années. Il est pourtant un précurseur à bien des égards: il est le premier Etat dont la population a commencé à décroître (2,5 millions d’habitants de moins aujourd’hui que lors du sommet de 2010), à avoir connu une déflation tenace et dont la Banque centrale (BoJ) a fixé son taux directeur à 0. En plus d’acheter des obligations, la BoJ a commencé à investir (indirectement) dans des actions et à contrôler la courbe des taux, en rendant le taux court légèrement négatif et en plafonnant à 0% celui à 10 ans. Son bilan “pèse” par conséquent 120% du produit intérieur brut du pays. Même lorsque la Federal Reserve et la Banque centrale européenne ont relevé leurs taux directeurs l’an dernier, la BoJ n’a pas bougé. Haruhiko Kuroda, son gouverneur, a ainsi laissé le yen s’écrouler face au dollar (de 110 à 150 yens pour 1 dollar en un an à peine). Du moins jusqu’au 20 décembre dernier, date à laquelle le taux à 10 ans a pu grimper jusqu’à 0,50%, faisant rebondir le yen. En cause: l’inflation, qui a atteint 4%, en partie justement du fait de la faiblesse de la devise. En outre, alors que les contrats à terme sur taux d’intérêt tenaient compte en décembre de taux longs de 0,5%, tout indique à présent que ceux-ci devraient approcher 1%: Haruhiko Kuroda se retirera en avril après 10 ans passés à la tête de la BoJ et il se pourrait bien que son successeur opte pour une politique de “normalisation”, que les marchés anticipent dès lors.
Warren Buffett et les “sogo shoshas”
Si la tendance se poursuit, le yen pourrait continuer à regagner du terrain face au dollar et à l’euro. Il faudrait alors miser à la baisse sur les obligations (souveraines) japonaises, comme ce fut le cas il y a un an pour les obligations (souveraines) européennes et américaines. Un phénomène qui pourrait mettre fin au carry trade, cette pratique très lucrative qui consiste à emprunter en yen pour investir en dollar et empocher le différentiel de taux et, généralement, de cours de change.
Ce basculement pourrait raviver l’intérêt international, actuellement insignifiant, envers la Bourse japonaise. Et donner raison à Warren Buffett, dont le véhicule Berkshire Hathaway a, dès l’automne 2020, investi pour 6,5 milliards de dollars dans cinq maisons de négoce (“sogo shoshas”). Des positions de plus de 5% chacune qui, d’après des documents datant de novembre dernier, ont dans l’intervalle été portées à 6-7%. Ce n’est évidemment pas un hasard: l’oracle d’Omaha est attiré par ces entreprises qui se négocient aujourd’hui encore à 5-7 fois à peine les bénéfices escomptés pour leur exercice décalé (jusqu’au 31/3) et sont cotées à leur valeur comptable, voire en dessous.
Stratégie
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