Douze conseils à l’investisseur en biotechs
On n’investit pas au hasard dans une entreprise de biotechnologie. Il convient d’ailleurs d’en choisir plusieurs, après avoir observé une série d’éléments, dont voici les principaux.
Les investisseurs particuliers évitent souvent le secteur. Pourtant, certaines valeurs belges en son sein affichent un rendement très, très attrayant sur les trois dernières années. Et alors qu’au 1er janvier 2009, les entreprises de biotechnologie et de diagnostic (belges, parce qu’il y en a d’autres) se négociant sur Euronext Bruxelles pesaient 653 millions d’euros, aujourd’hui, ce marché vaut 14,6 milliards d’euros. Certes, cette évolution est le fruit de nombreux échecs et de rares succès. Il en résulte d’énormes écarts de performance, et seulement trois des quinze actions belges du secteur s’échangent aujourd’hui au-dessus de leur prix d’introduction. Un investissement dans les biotechs exige par conséquent une approche spécifique. Pour maximiser vos chances de succès, voici un petit guide.
1. Diversifier
Nous ne le soulignerons jamais assez: ne pas mettre tous ses oeufs dans un même panier, en Bourse. Et il est encore plus crucial de suivre cette règle dans le secteur biotech. Nombre de nos abonnés ne sont investis que dans une ou deux valeurs et nous interrogent lorsqu’ils ont fait une mauvaise pioche. Nous vous conseillons d’opter pour cinq actions différentes au moins… et d’être patient, car même les entreprises les plus performantes du moment peuvent voir leur cours céder du terrain provisoirement.
2. Privilégier le long terme
Le développement d’un médicament prend au moins 10 ans. Par conséquent, nous fixons pour l’heure toujours notre horizon d’investissement autour de 2025. Cela ne signifie bien entendu pas que votre investissement ne pourra pas vous rapporter quelque chose dans l’intervalle, mais durant le long processus qui précède l’éventuelle commercialisation d’un produit, les cours fluctuent beaucoup. Souvenez-vous d’Ablynx. Après moult corrections déjà, les résultats décevants d’une étude de phase II consacrée à un candidat médicament contre le rhumatisme avaient fait dévisser le titre à 8,5 euros à l’automne 2016. De très nombreux investisseurs particuliers l’ont alors vendue. Quatorze mois plus tard, Sanofi rachetait l’entreprise à 45 euros par action.
3. Exploiter la volatilité
Nous le disions, les actions du secteur sont connues pour leur extrême volatilité – régulièrement, des fluctuations de plusieurs dizaines de pour cent. Il est donc utile de travailler avec des doubles, voire des triples positions dans une action, afin de pouvoir réagir aux mouvements intermédiaires. Il est en outre important d’oser acheter après de fortes baisses. En portefeuille modèle, nous avons par exemple abaissé notre cours d’achat moyen pour Bone Therapeutics de 60% ces dernières années.
4. Eviter les prises de bénéfices précipitées
S’il est nécessaire de réduire légèrement une position après une forte hausse de cours – comme nous l’avons fait avec argenx et Mithra Pharmaceuticals -, il est tout aussi important de ne pas vendre à la hâte. Véritables success stories, argenx et Galapagos ont vu leur cours se multiplier par 10, 20, voire 30. Ce qu’il convient (d’essayer) d’éviter, c’est de se délester (beaucoup) trop tôt des actions performantes et de ne conserver que les (inévitables) déceptions.
5. Considérer les liquidités
Lorsqu’elle ne détient pas encore de médicament approuvé par les autorités sanitaires, une biotech ne réalise pas de revenus récurrents et se voit donc contrainte de lever régulièrement des fonds pour financer les étapes suivantes du développement de son pipeline. Tout l’art consiste, pour elle, à organiser son refinancement avant que le marché n’exerce de pression sur son action. L’autonomie financière de nombreuses entreprises du secteur est souvent de courte durée. Préférez dès lors les biotechs qui disposent d’une trésorerie suffisante pour couvrir leurs besoins pendant un an ou deux.
6. Tenir compte des partenariats
En concluant un partenariat avec un grand groupe pharmaceutique, une biotech renfloue ses caisses. C’est très important par ailleurs : le partenaire souligne ainsi sa confiance dans la technologie de l’entreprise biotech. Un partenariat réduisant donc le risque, l’enthousiasme du marché se fait rarement attendre. Songez à Bone Therapeutics qui, en 2017, après avoir annoncé qu’elle collaborerait avec Asahi Kasei, a vu son cours bondir comme jamais depuis son introduction en Bourse.
7. Ne pas généraliser: un pipeline n’est pas l’autre
Les actions de biotechs réagissent à la publication de résultats d’études (pré)cliniques en fonction de plusieurs critères. La valeur d’une biotech repose essentiellement sur son pipeline – moins il comprend de candidats médicaments, plus la capitalisation boursière de l’entreprise est faible et partant, plus l’action sera sensible aux résultats des études. Le cours y sera d’ailleurs d’autant plus sensible que le développement avancera – ainsi la phase II d’une étude est-elle un point d’inflexion très important. Aussi, le potentiel commercial d’un produit et le nombre de pathologies ciblées avec une même molécule sont déterminants.
8. Suivre le calendrier
Une biotech qui publie peu d’informations voit généralement baisser le cours de son action. Il est utile de jeter un oeil sur son calendrier (et celui de ses rivales) et de ne pas le perdre de vue, puisque chaque annonce/attente fera fluctuer le cours (voire aussi celui des concurrentes) – chaque année, en janvier, nous résumons les annonces attendues de celles que nous détenons en portefeuille modèle.
9. Examiner l’actionnariat
L’entrée d’éminents investisseurs (tels Aat van Herk ou Rudi Mariën, pour ne citer qu’eux) dans le capital d’une biotech suggère que les décisions d’investissement ne seront pas prises à la légère et peut donner un coup de fouet à son action.
10. Apprécier une cotation aux Etats-Unis
Pour autant que l’opération ait été bien préparée et le moment, bien choisi, une cotation aux Etats-Unis peut être très rémunératrice. Nous sommes convaincus que Galapagos et argenx afficheraient une capitalisation boursière beaucoup plus faible sans leur cotation aux Etats-Unis.
11. S’intéresser à la stratégie commerciale
ThromboGenics nous a appris qu’un produit qui a passé tous les stades du développement et été approuvé ne se vend pas nécessairement bien. La commercialisation est une autre phase cruciale. Son succès dépendra notamment de la concurrence, de la rémunération des médecins, de la taille et de l’efficacité de l’équipe commerciale. La stratégie en la matière mérite toute votre attention.
12. Ne pas faire l’impasse sur la gouvernance
La qualité de l’équipe dirigeante est essentielle. De la capacité de l’entreprise à faire les bons choix en matière de recherches, de collaborations, de financement, etc., dépend aussi, bien entendu, et beaucoup, le succès d’une entreprise biotech. Si, cette année, nous avons étendu notre position dans MDxHealth, c’est parce que le management a changé. Et ce n’est pas un hasard si les deux biotechs belges ayant connu le parcours le plus spectaculaire à ce jour, argenx et Galapagos, sont dirigées depuis leur création par les deux CEO à nos yeux les plus compétents du paysage biotechnologique belge.
Stratégie
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