Une caisse trouée
40,22 EUR – 1B Digne d’achat
Au 2e trimestre dernier, Total a affecté 5,2 milliards EUR à de nouvelles propriétés, installations et machines. Mais la société a également revendu pour 1,3 milliard EUR d’actifs. En définitive, la facture totale des investissements se chiffre donc à 3,9 milliards EUR, ce qui n’est pas peu de choses, d’autant que les cash-flows de l’activité opérationnelle (EBITDA) ont stagné à 3,7 milliards EUR. Autrement dit, au 2e trimestre – tout comme sur l’ensemble du 1er semestre d’ailleurs – le groupe est confronté à des cash-flows négatifs. Ceci implique que le groupe doit financer le paiement des intérêts à ses créanciers et le versement de dividendes à ses actionnaires par de nouveaux emprunts ou en sollicitant à nouveau sa trésorerie. Total entend cependant également créer des cash-flows libres en vendant des actifs et en réduisant ses investissements. La direction a confirmé qu’elle souhaitait écouler, entre 2012 et 2014, pour 15 à 20 milliards EUR d’actifs, et a fait entendre que son budget d’investissements atteindrait un maximum cette année. Le rapport plus équilibré entre cash-flows opérationnels entrants et cash-flows sortants devrait soutenir le dividende. Ces dernières années, les investisseurs ont développé une allergie aux cash-flows ” faussés ” des grandes sociétés pétrolières occidentales. Total & co doivent investir de plus en plus pour trouver de moins en moins de réserves pétrolières et produire de moins en moins de pétrole. Les cours pétroliers de 100 USD le baril et plus n’aident pas les actionnaires de ces majors pétrolières à avancer si les coûts d’exploration et de production sont aussi élevés. L’argent qui entre par une porte ressort aussitôt par une autre. Ce ne sont donc pas les revenus en baisse, comme après le krach du pétrole en 2008-2009, mais la hausse des investissements qui dessert les actionnaires. Ce qui s’explique par le fait que les compagnies doivent rechercher des ressources sur des terrains de plus en plus difficilement accessibles, comme dans les sables bitumineux ou en mer profonde. Pour regagner la confiance des investisseurs, les compagnies pétrolières devront présenter une hausse de leur production ou parvenir à maintenir la production actuellement à partir d’un budget d’investissements inférieur. Parmi les compagnies pétrolières occidentales, Total est celle qui est la mieux placée pour concrétiser cet objectif. Total investit depuis déjà quelques années de manière assez agressive dans un accroissement de son potentiel de production mais une série de contrecoups ont jusqu’ici empêché cette stratégie de porter ses fruits. Le choix de miser sur une hausse des cours pétroliers s’avère être le bon. Alors que d’autres matières premières ont vu leurs cours s’effondrer ces derniers mois, le cours du pétrole se maintient, et a même repris de la hauteur ces dernières semaines. Cela dit, Total devra encore démontrer le bienfondé de ses choix stratégiques par des résultats concrets. Au 2e trimestre, son revenu net ajusté a encore reculé de 3% par rapport à la même période l’an dernier, conséquence d’un cours pétrolier moyen légèrement moins élevé au printemps de cette année. La production des combustibles fossiles s’est toutefois accrue de 1% au 2e trimestre grâce au lancement de nouveaux projets et au redémarrage du champ Elgin en Mer du Nord. Pour le second semestre de cette année, Total attend beaucoup de la mise en activité du projet Kashagan au Kazakhstan et de l’expansion de la capacité de production au Nigeria. Jusqu’à nouvel ordre, Total s’en tient à son objectif de commercialiser d’ici 2017 environ 3 millions de barils d’équivalents pétrole par jour, ce qui suppose une croissance des volumes de 4% par an.
Dans le sillage de la hausse du cours du pétrole, Total est parvenu à prendre un peu de hauteur ces dernières semaines. Sa valorisation n’en demeure pas moins intéressante, avec un rapport C/B de 8 et un rapport valeur d’entreprise (EV)/cash-flow opérationnel (EBITDA) de moins de 4. Le potentiel de croissance ne se paie donc toujours pas. L’action demeure cependant ” digne d’achat ” (rating 1B).