L’arrivée cynique et extrême de la N-VA en Wallonie, un facteur de blocage

Bart De Wever, Drieu Godefridi et Theo Francken. BELGA PHOTO HATIM KAGHAT
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Bart De Wever lance ses troupes en Wallonie en critiquant le MR de vive façon. Et en optant pour un profil très à droite. Un cadeau empoisonné au PS qui pourrait tout bloquer en juin prochain.

La Belgique risque d’être durablement bloquée au lendemain des élections du 9 juin prochain. S’il en fallait encore une preuve, elle est venue de la N-VA, qui détient en grandes parties les clés du scrutin si elle parvient à sauver les dégâts en Flandre face à un Vlaams Belang qui domine les sondages.

Mercredi, son président, Bart De Wever, a donc confirmé son intention de présenter des listes en Wallonie. Dans le Brabant wallon, l’intellectuel Drieu Godefridi emmènera les troupes nationalistes flamandes. Comme un pied de nez au MR, dont il fut un temps partisan. Mais aussi un signal très étrange, tant sur le profil du parti que sur ses intentions.

Un profil très extrême

Drieu Godefridi est, tout d’abord, un personnage controversé, ayant multiplié les positions “à la droite de la droite”, ultra-libéral et anti-wokiste, partisan d’Eric Zemmour en France, collaborateur à Valeurs actuelles ou à Causeur. Surtout, il était en rupture de ban avec un MR qui le jugeait trop sulfureux.

Sur le plan communautaire, il n’hésitait pas à dénoncer les errements d’une N-VA n’ayant rien obtenu de son programme. Page tournée, visiblement: Bart De Wever voit en lui l’incarnation de son projet en Wallonie. Cela témoigne d’une N-VA effectivement… très à droite, alors que la Vlaams Belang envoie des signaux du pied au nord du pays.

Au passage, le président de la N-VA y va à la sulfateuse contre les libéraux francophones, désormais des rivaux sur le plan électoral: “Le MR n’est pas une alternative à la Vivaldi. Ils ont tout laissé passer. C’est une partie intégrante du système socialiste.” De bonne guerre, mais tout de même…

Réplique de Georges-Louis Bouchez: “Bart De Wever a perdu la boussole“. Il rappelle au passage que le candidat choisi “recherche de la publicité personnelle après avoir échoué au MR”. A tout le moins, le cynisme de la N-VA a de quoi laisser perplexe.

Un cadeau empoisonné au PS

Le politologue Dave Sinardet analyse dans Le Soir qu’il s’agit là d’un “cadeau au PS de Paul Magnette” et un “coup dur pour le MR“. Alors que les libéraux viennent eux aussi de présenter leurs listes en Brabant wallon avec la certitude de garder leur nombre de sièges, voilà qui pourrait changer la donne et coûter quelques pourcents au MR dans un match très serré face au PS… et au PTB.

Mais il s’agirait bien d‘un cadeau empoisonné pour Paul Magnette. Une des options les plus souvent évoquées pour gouverner la Belgique après le 9 juin serait une alliance centrée autour d’un duo PS – N-VA avec Vooruit come entremetteur. Magnette était déjà réticent, mais comment le PS pourrait-il désormais former une majorité avec un parti qui, en Wallonie, vise la droite de la droite?

L’autre alternative serait une Vivaldi bis, mais la voilà peut-être déforcée si le MR est effectivement fragilisé – ce qui reste à prouver… Sur le plan arithmétique, surtout en Flandre, cela semble en outre compliqué de songer à une telle Vivaldi renouvelée, à moins de mettre tous les partis démocratiques ensemble. Pas de quoi donner un nouvel élan au pays.

Le pari de Bart De Wever, avec cette provocation cynique, ne serait-il pas de bloquer la Belgique ou de viser, quoi qu’il en dise, le coup de force avec le Vlaams Belang? Son slogan de campagne n’est autre que de “sauver la prospérité de la Flandre”, mais ce n’est pas avec cette entrée dans la campagne wallonne qu’il risque d’y arriver.

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