Le consumérisme démocratique

Campagne électorale.
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Les élus multiplient les plaintes au sujet des exigences et du rejet des citoyens. C’est inquiétant. Mais c’est aussi un retour de leur vision mercantile du vote des électeurs…

La politique est un grand marché démocratique, dans lequel les partis tentent de séduire les électeurs pour obtenir leur vote et conquérir le plus de parts possibles. Comme une entreprise le ferait pour un produit. En se servant autant que possible des moyens financiers obtenus par ce biais.

C’est cyniquement dit, mais c’est globalement comme cela que le choses se sont développées avec la professionnalisation du métier de “représentant du peuple”. Oh, bien sûr, il reste de l’idéal et une volonté de servir le citoyen. Mais ces dernières années, ce cynisme s’est illustré au fil de nombreux scandales, de Publifin au parlement wallon en passant par le Samusocial, les pensions à la Chambre…

Forcément, en retour, cela provoque du rejet.

La plainte des élus locaux

Aujourd’hui, ce sont les élus locauxet régionaux qui expriment leur désarroi. Sur le mode, là encore, du consumérisme. “Si vous ne répondez pas dans l’heure, vous vous en foutez du citoyen, vous êtes comme les autres, vous êtes là pour en mettre plein les poches et pour faire carrière“, regrette Jean-Michel Javaux (Ecolo), bourgmestre d’Amay, sur la RTBF. Qui insiste: Ces quatre dernières années, la motivation et les rapports entre citoyens et politique se sont dégradés : c’est pour cela qu’on tire la sonnette d’alarme”.

L’écologiste fait référence à une étude menée par l’institut Dedicated pour l’Union des villes et communes de Wallonie qui met en garde: 22% des élus pensent ne pas se représenter aux prochaines élections communels d’octobre 2024 et 17% hésitent. “Si cette tendance devait se confirmer, la démocratie local en Wallonie serait réellement en grand danger“, souligne Maxime Daye (MR), président de l’Union, au Soir.

En Région bruxelloise également, le député Juan Benjumea (Groen) se lamente: “On est comme le service clientèle de la population, qui se fait insulter et marcher dessus.” Lui aussi ne devrait plus se représenter en 2024. Attention, danger: en toile de fond, il y a encore et toujours ces populismes qui grondent.

L’inutilité citoyenne

Une réponse au désarroi démocratique consisterait à intégrer davantage les citoyens dans le processus de décision. Des expériences pilotes existent en la matère, mais ce laboratoire démocratique montre ses limites. Une étude publiée par Jean-Benoît Pilet (ULB) et Dave Sinardet (VUB), dont les résultats sont dévoilés dans Le Soir, illustre combien nos législations autorisent du bout des lèvres ce genre d’intiiatives, sans leur donner de pouvoir décisionnaire.

Et quand des groupes de citoyens fourmillent d’idées, à l’instar de nombreuses intiatives comme le G1000, cela reste salué… pour le principe. “J’ai le sentiment qu’on est là en présence de sortes de groupes de pression, un peu comme le sont les syndicats, davantage que de groupes produisant des conclusions qui sont ensuite reprises par les acteurs politiques”, souligne Jean-Benoît Pilet.

On ne peut s’empêcher de penser, aussi, à la Convention citoyenne pour le climat, en France, dont les résultats ont été largement ignorés, ce qui a mené à une radicalisation sous forme de désobéisssance civile. A l’instar de ce cynisme politique qui induit les gens à voter pour des extrêmes en forme de désaveu. Même s’il s’agit là d’une très mauvaise idée.

Le consumérisme, à l’excès, gaspille les resssources de la planète démocratique. Et les comportements déviants, forcément, ont des conséquences…

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