Croissance, taux d’emploi et de chômage, déficit public… du bon et du très mauvais dans le bilan chiffré des gouvernements (infographies)

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Baptiste Lambert

À quelques jours des élections, nous faisons le bilan des gouvernements fédéral, wallon et bruxellois, au niveau comptable. Car les chiffres, dit-on, ne mentent jamais. Croissance, taux d’emploi, taux de chômage et déficit public… quelles sont les performances des gouvernements depuis 2019 ? Ils ont dû jongler entre des périodes de crise profonde et des périodes de reprise économique.

Le taux d’emploi

Commençons par le bon, avec le taux d’emploi qui s’est amélioré au niveau belge, bruxellois et wallon, tout en restant éloigné de l’objectif fixé à 80%.

En Belgique, le taux d’emploi des 20 à 64 ans était de 70,5% en 2019 et s’établissait à 72,1% en 2023. C’est plus timide en Wallonie, où il est passé de 64,6% en 2019 à 65,5% en 2023. La progression la plus importante est à Bruxelles, dont le taux d’emploi a progressé de 61,7% à 66,5%.

Certains économistes, comme le spécialiste du travail, Stijn Baert (UGent), critiquent la progression de ce taux d’emploi, et surtout, l’influence des gouvernements sur celui-ci. D’aucuns estiment que la réforme du travail au niveau fédéral – le fameux Jobs deal – n’a pas été la révolution attendue. La Belgique a plutôt profité, hors crises, de la bonne conjoncture économique. À cet égard, l’économiste rappelle que la Belgique fait moins bien que la moyenne européenne, dont le taux d’emploi a progressé de 3,2% entre 2020 et 2023, à 75,3%. Une autre critique vise l’effet mécanique qui profite au taux d’emploi. Un nombre important de baby-boomers prennent le chemin de la retraite, ce qui, mécaniquement, fait bondir, le taux d’emploi.

Le ministre de l’Économie, Pierre-Yves Dermagne (PS), aime toutefois rappeler que plus de 5.000.000 de Belges travaillent, un chiffre jamais atteint. Par année, selon la BNB, la Belgique a créé 77.000 emplois en 2019, 3.000 en 2020, 94.000 en 2021, 104 en 2022, 42.000 en 2023, dans un contexte de crise énergétique. Mais pour ce dernier chiffre, il y a un sérieux bémol : 62% relevaient du secteur public au sens large. En 2024, au premier trimestre, 9.200 postes ont été créés.

Le taux de chômage

Pour enlever l’effet mécanique des âges sur le taux d’emploi, concentrons-nous sur le taux de chômage. Si les chiffres de 2013 ne sont plus qu’un mauvais souvenir, l’amélioration de la courbe du chômage est relative dans le sud du pays. Bruxelles est passé de 12,7% à 10,7%, mais La situation wallonne s’est par contre dégradée, de 7,2% en 2019 à 8,2% en 2023. En outre, la Wallonie et Bruxelles ont un gros problème de chômeurs de longue durée. Statu quo pour la Flandre, en situation de plein emploi, à 3,3%.

En chiffres absolus, la Belgique comptait, fin 2023, 518.237 demandeurs d’emploi, dont 295.953 chômeurs indemnisés. En janvier 2020, la Belgique en comptait 330.555.

Taux d’inactivité

Le taux d’inactivité en Belgique reste préoccupant. C’est intéressant, car il prend en compte une partie des étudiants, les bénéficiaires d’un revenu d’insertion ou d’une assurance maladie et les pré-retraités. Or, on sait que le nombre de malades de longue est près de deux fois supérieurs au nombre de chômeurs indemnisés. Au niveau belge, on est passé de 25,6% à 23,9%. Pas terrible du tout.

Croissance

Le taux de croissance, dans les circonstances de ces dernières années, est à prendre avec des pincettes. Mais globalement, elle a été plus soutenue en Belgique que dans la zone euro. Elle était de 2,2% en 2019, -5,3% en 2020, 6,9% en 2021, de 3% en 2022 et de 1,5% en 2023, selon la BNB et l’institut des comptes nationaux. En 2024, le Bureau du plan (BFP) table sur une croissance de 1,4%.

Le BFP estime que la Wallonie et Bruxelles ont moins bien résisté aux crises que la Flandre, qui a pu s’aider de son secteur marchand, beaucoup plus développé. Et les perspectives jusqu’à 2028 ne sont pas en faveur des francophones, avec une croissance de 1,1% par an à Bruxelles et de 1,3% en Wallonie, contre 1,6% en Flandre.

Selon l’Iweps, toutefois, la croissance a été plus forte qu’attendue en Wallonie l’année dernière, à 1,7%, mais l’écart se creuse avec la Flandre et la zone euro sur la longueur, à l’exception du Brabant wallon.

Les finances publiques

Last but not least, le bilan des finances publiques. Et comme tout le monde le sait, il est lourd. Le maintien à flot de la Belgique, de la Wallonie et de Bruxelles durant les crises, a coûté beaucoup d’argent. Les indexations automatiques des salaires des fonctionnaires et des allocations, également. Le coût du vieillissement et la charge sur la dette ont fait et feront le reste à l’avenir.

Si le déficit et la dette belge ont été légèrement revus et corrigés en 2023, respectivement à 4,4% et à 105,2% du PIB, les prochaines années s’annoncent rudes : le Bureau du plan voit le déficit se creuser à 5,6% en 2029 et la dette à 116,8% du PIB, à politique inchangée. Pour revenir dans les clous européens, l’effort tournerait autour de 30 milliards d’euros, sur 4 ou 7 ans, à condition, dans ce deuxième cas, de faire des réformes structurelles.

La dette de la Région wallonne et celle de la Région de Bruxelles-Capitale étaient plus de deux fois supérieures aux recettes en 2023. L’année dernière, la dette des régions et communautés pesait 101,3 milliards d’euros, sur les 500 milliards d’euros de dette, au total. Selon la Commission externe de la dette, à l’horizon 2030, la dette wallonne risque d’approcher les 280% des recettes de la Région wallonne. À Bruxelles, le ratio dette / recettes s’envolerait à 286 % en 2028, à politique inchangée, précise le CERPE.

C’est le gros point noir de cette législature, avec des circonstances atténuantes comme la crise sanitaire, la crise de l’énergie et les inondations. Mais il aura manqué de réformes structurelles pour entamer une révolution économique.

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