Imparfaite, l’épreuve du permis de conduire?

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Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste

Écarts importants dans les taux de réussite, questionnaires différents, manque de précision… L’analyse des données communiquées par les trois Régions du pays met en avant quelques « défauts » de procédure dans l’évaluation des candidats au permis de conduire. Finalement, la régionalisation de la compétence a-t-elle été une bonne idée?

Sur papier, les différents tests auxquels sont confrontés les candidats pour l’obtention de leur permis de conduire sont a priori les mêmes, quelle que soit la Région. L’épreuve théorique se déroule au centre d’examen, où les candidats sont invités à répondre à 50 questions à choix multiples sur un ordinateur. Leur objectif: obtenir un minimum de 41/50, sous peine d’être recalés. Pour l’examen pratique, les candidats sont amenés à conduire sur la voie publique, en temps réel. Ils doivent suivre les indications de l’examinateur et effectuer plusieurs manœuvres au cours de l’épreuve qui permettront de juger de leur capacité de conduite. Pour le test de perception des risques, épreuve récente, on leur demande de visionner cinq vidéos afin d’évaluer leur capacité à distinguer les risques potentiels sur ou aux abords de la route.

Dans la pratique, d’une Région à l’autre, les candidats n’ont pas les mêmes questionnaires et ne sont pas évalués de la même manière…

Permis de conduire: des défauts à corriger

Voici quelques « défauts » de procédure que nous avons repérés au cours de notre enquête et qu’il faudrait améliorer:

  • Une compétence régionale pour un document nationale: « La formation à la conduite et l’examen pour l’obtention du permis de conduire sont des compétences régionales », nous indique le site officiel des autorités fédérales belges. Pour autant, la délivrance des permis de conduire et des duplicatas relève, elle, du fédéral. Une incohérence, car cela sous-entend que tous les Belges obtiennent le même document officiel sans avoir suivi la même formation.
  • Des tests pas tout à fait semblables: Les examens ne sont pas tout à fait identiques d’une Région à l’autre, et parfois même au sein d’une même Région (en Wallonie, deux questionnaires différents pour l’examen théorique). Le test de perception des risques, notamment, diffère dans le sud et le nord du pays. En Wallonie, il est demandé aux élèves de cliquer sur des éléments qui leur paraissent à risque, quant à Bruxelles et en Flandre, on leur pose une série de questions sur ce qu’ils ont perçu. Quant aux pratiques, les manœuvres demandées ne sont pas tout à fait identiques non plus : à Bruxelles, par exemple, tous les candidats devront réaliser un demi-tour dans une rue étroite ainsi qu’un créneau alors qu’en Wallonie, c’est plus aléatoire. Les candidats devront réaliser un créneau et une des manœuvres suivantes, tirée au sort: un stationnement perpendiculaire, un demi-tour ou une marche arrière en ligne droite.
  • Des prestataires privés à la tête des centres d’examen: quand un examen devient source de revenus pour des sociétés privées, cela pose la question de l’objectivité de la procédure et de l’intégrité de certains centres. À cela s’ajoute la question du prix de l’examen, qui diffère d’une Région à l’autre…
  • Un manque de données: tout au long de nos recherches, le principal obstacle auquel nous avons  été confrontés est le manque de données qui permettraient de vérifier le bon travail des centres d’examens.
  • Un problème de précision et de détails: quand la Wallonie nous informe qu’elle ne possède pas de données précises avant 2020, cela pose question. Pourquoi supprimer des données qui permettent d’analyser l’efficacité des examens, l’impact d’une mesure sur les taux de réussite…? Que les autorités ne puissent pas expliquer une variation étrange et soudaine des données (taux de réussite homme/femme s’inversent brusquement pour le théorique à Bruxelles) pose question…
  • Un souci d’uniformité: la Wallonie nous donne des taux par centre, mais ne remonte pas avant 2020. La Flandre nous donne des taux par société/prestataire, et remonte jusqu’en 2016. Et enfin, Bruxelles ne nous donne que les taux globaux pour l’ensemble de la Région, mais remonte jusqu’en 2014. La collecte de données varie tellement qu’il est difficile de comparer objectivement les taux de réussite de chaque Région.
  • Des difficultés pour contester un échec: en cas d’échec du permis pratique, il n’est pas toujours évident de contester la décision de l’examinateur. En Wallonie par exemple, la procédure n’est faisable qu’à partir du second échec. Qu’il le veuille ou non, l’élève devra donc bel et bien repasser son examen au moins une fois. Pour contester, il faut envoyer une lettre recommandée et s’acquitter d’un certain montant afin d’activer la procédure de recours. Une procédure qui peut prendre plusieurs semaines… In fine, très peu de candidats contestent la décision d’un examinateur.
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