L’exploitation par des firmes européennes de routiers de pays tiers dénoncée au Parlement européen

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Cela fait un mois maintenant qu’une soixantaine de chauffeurs routiers originaires de Géorgie et d’Ouzbékistan font grève sur une aire d’autoroute au sud de Francfort (Allemagne), pour protester contre leur exploitation par une firme polonaise. Le sujet est arrivé cette semaine en plénière du Parlement européen.

“On assiste à des entreprises voyous, qui agissent apparemment en toute impunité”, a dénoncé l’eurodéputé Benoît Lutgen, qui est allé soutenir les grévistes en début de semaine.

“C’est catastrophique, sur le plan social, et même humain, pour ces travailleurs. Mais au-delà, cela induit le message que, finalement, on peut faire ce que l’on veut, sans conséquence. Cela pourrait tenter des entreprises belges, et fragiliser la protection de leurs travailleurs”.

Conditions de travail “inhumaines”

Les 63 poids lourds sont immobilisés sur l’aire de l’autoroute A5 de Gräfenhausen, au sud de Francfort, et reçoivent depuis le début de leur action le soutien des syndicats, des unions professionnelles de routiers et de nombre de politiques.

Ils dénoncent leurs conditions de travail “inhumaines” et le fait de n’avoir pas été payés par leur employeur polonais depuis des semaines, lui qui les considéreraient faussement comme des indépendants alors qu’ils travaillent exclusivement pour lui.

L’entrepreneur s’est rendu sur l’aire de repos il y a une dizaine de jours avec des agents de sécurité et a tenté de récupérer les véhicules, mais la police allemande est intervenue et l’homme ainsi que 18 agents de sécurité ont été temporairement arrêtés. Les enquêtes à leur encontre sont toujours en cours.

Le nombre total de conducteurs a quintuplé

“En moins de dix ans, le nombre total de conducteurs venant d’un pays non européen a quintuplé, pour atteindre plus de 275.000 en 2021”, selon M. Lutgen (PPE, Engagés), membre de la commission Transport au Parlement européen. “Ce chiffre pose inévitablement la question des conditions de travail de ces personnes, et par ricochet, des prix pratiqués par leur entreprise. Les entreprises qui, elles, respectent le cadre, font régulièrement savoir qu’elles se sentent en danger – économique – face à de telles pratiques.”

 Le commissaire européen à l’emploi et aux droits sociaux, Nicolas Schmit, a apporté son soutien aux grévistes et rappelé aux États membres leur devoir de contrôler le respect des directives européennes existantes et de mettre en œuvre les mesures du paquet Mobilité, qui prévoit des règles claires sur le détachement des conducteurs, une meilleure application pour lutter contre les pratiques illégales et de meilleures règles concernant les temps de repos des conducteurs.

“Toutes ces mesures s’appliquent aussi à tous les conducteurs de pays tiers qui travaillent au sein de l’UE et sont recrutés par des opérateurs de l’UE, car il n’y a pas deux catégories de travailleurs dans l’UE”, a-t-il dit.

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