L’économie russe commence à souffrir vraiment

Kremlin Russie
Drapeau russe sur le Kremlin. © Getty Immages
Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

L’OCDE, le “club des pays riches”, a présenté ce mercredi à Paris ses dernières prévisions de croissance. La croissance reprend, mais la route est encore longue.

Pour l’OCDE, la croissance mondiale serait de 2,7% cette année et 2,9% l’an prochain. Une croissance essentiellement tirée par l’Asie, souligne l’économiste en chef de l’institution, Clare Lombardelli, avec par exemple cette année une hausse de l’activité de 6% en Inde, de 5,4% en Chine, de 4,7% en Indonésie.

Pour la zone euro, l’OCDE prévoit 0,9% cette année et 1,5% l’an prochain. Notre pays est dans la moyenne européenne, avec 0,9% de croissance prévue cette année et 1,4% l’an prochain.

Le soufflé russe retombe

Mais en marge de ces grands équilibres, une estimation retient l’attention : celle de l’économie russe. À la fin de l’an dernier, les prévisions étaient encore très étonnantes pour la Russie : le FMI prévoyait une croissance de 0,3% cette année et de 2,3% l’an prochain.  Six mois plus tard, et les sanctions sur le prix du pétrole étant désormais entrées en vigueur, l’image de la résilience russe s’étiole : l’OCDE table désormais sur une récession de 1,5% cette année et de 0,4% l’an prochain. « En février 2023, moins de 1 % des importations allemandes d’énergie provenaient encore de Russie », note l’OCDE. Cela ne signifie pas que les exportations d’énergies fossiles russes ont cessé. La Chine importe par exemple davantage de gaz et de pétrole russe. Et l’Inde, surtout, a bénéficié du changement dans le paysage énergétique : les importations indiennes en provenance de Russie sont passées de 9.9 milliards de dollars sur l’exercice 2021-22 à 46,2 milliards en 2022-23. Mais ces importations du pétrole brut russe (Oural) se font à prix réduit.

Optimisme prudent

Au-delà de cette parenthèse russe, les prévisions de l’OCDE sont sans grandes surprises.

“Cette prévision de reprise, bien que pratiquement inchangée par rapport à nos projections  de mars, maintient les perspectives légèrement plus optimistes qui avaient été prédites alors et que nous voyons maintenant se concrétiser”, observe le secrétaire général de l’OCDE Mathias Cormann.

L’économie mondiale a amorcé un tournant, mais la route est encore longue pour parvenir à une croissance forte et durable, ajoute l’OCDE. Alors, oui, note Clare Lombardelli, plusieurs des facteurs qui bridaient l’économie mondiale commencent à s’estomper. L’économiste pointe le recul des prix de l’énergie, le recul de l’inflation globale, la vigueur du marché de l’emploi, l’atténuation des perturbations de l’offre, la réouverture de l’économie chinoise et la relative résilience des finances des ménages.  Mais la guerre en Ukraine et le risque géopolitique sont plus présents que jamais. Et les chiffres de croissance encore très faibles montrent qu’il reste encore du chemin à faire.

Message aux politiques

Dans ce contexte, Mathias Cormann et Clare Lombardelli invitent les gouvernements des pays développés à ne pas entraver les efforts des banques centrales pour juguler l’inflation, et à donc mieux cibler les soutiens à l’économie.

“Les responsables politiques doivent ramener durablement l’inflation à l’objectif fixé et mettre fin au large soutien budgétaire en ciblant mieux les mesures fiscales. Tout en continuant à répondre aux défis économiques immédiats, il reste important de donner la priorité aux réformes structurelles pour stimuler la productivité, notamment en favorisant la concurrence, en relançant l’investissement, en augmentant la participation des femmes à la population active et en atténuant les contraintes de l’offre, tout en assurant les transformations vertes et numériques de nos économies, affirme Mathias Cormann

Et Clare Lombardelli rappelle aussi le dernier message de l’Agence internationale de l’Énergie, qui estime que si l’efficacité énergétique mondiale a progressé de 2,2 % en 2022, soit deux fois plus que la moyenne des cinq dernières années, si nous voulons atteindre le net zéro à l’objectif 2030 (but fixé par l’AIE), il va falloir tripler les investissements dans l’efficacité énergétique.

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