10 solutions pour assurer votre avenir professionnel

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Plombé par la crise, le marché de l’emploi ne se redresse pas. Les jeunes, diplômés ou non, payent le prix fort. Ils sont près de 100.000 à chercher un emploi. Comment en trouver un?

1 Choisissez une filière en pénurie

Chaque année, c’est la même rengaine. Malgré un chômage des jeunes inquiétant, des entreprises pleurent pour engager certains profils. Les ingénieurs civils et industriels sont toujours aussi recherchés. Ils figurent en tête de la liste des fonctions critiques publiée par la Région bruxelloise.

Plus largement, c’est toute l’industrie technologique qui est en manque de main-d’oeuvre. Or, les jeunes s’inscrivent encore trop peu dans ces filières d’avenir. “L’enseignement supérieur diplôme 17 % de ses étudiants dans les filières technologiques. La moyenne européenne est de 20 %, l’Allemagne est à 27 %”, enrage Thierry Castagne, CEO d’Agoria. Selon lui, les possibilités sont immenses. Si l’automatisation menace certains métiers, l’innovation technologique va aussi créer des opportunités : “Toute nouvelle technologie s’accompagne de métiers d’installation, d’entretien, de maintenance, de réparation… Tous ces emplois sont des emplois locaux.” Figurent dans les métiers en pénurie les électromécaniciens, soudeurs, usineurs… Autant de métiers techniques de plus en plus pointus qui continueront à être demandés dans les prochaines années.

Toute la filière informatique souffre aussi d’une pénurie de main-d’oeuvre. Un comble : dans notre monde connecté, on cherche désespérément des programmeurs, des développeurs web, des analystes informatiques et des ingénieurs logiciels. Au point que certains préconisent des financements différenciés pour les filières supérieures, en fonction de la demande réelle de main-d’oeuvre, afin d’inciter les étudiants à choisir les métiers les plus porteurs. Mais on n’en est pas là : vous avez encore le choix. En connaissance de cause.

2 Ne vous battez pas contre les robots

Certains boulots sont plus susceptibles que d’autres de se faire chiper par les robots ou, de manière plus large, par une certaine forme d’automatisation des tâches (*). Evitez le métier de prothésiste dentaire, qui risque de ne pas survivre à l’avènement des imprimantes 3D. Préférez-y le métier de dentiste, un métier d’une haute technicité, qui implique aussi de pouvoir émettre un diagnostic, pas à la portée du premier robot venu.

Certains jobs manuels sont dans l’oeil du cyclone : bouchers, boulangers, chauffeurs de poids-lourds… sont robotisables à moyen terme. D’autres métiers, qui supposent des gestes “techniques” presque impossibles à imiter mécaniquement, sont moins menacés : chirurgien, coiffeur, musicien, chimiste, chorégraphe, électricien… De nombreux jobs sont aussi plus protégés parce qu’on peut difficilement envisager leur remplacement par un robot : puéricultrice, instituteur, assistant social, médecin… Les métiers de “conseil”, qui impliquent une certaine gestion de l’émotion humaine, semblent difficilement transférables à un robot : conseiller d’orientation, coach sportif, acteur, psychologue…

Evitez le boulot de courtier en assurances, agent immobilier, assistant juridique, voire traducteur : ils sont menacés par les programmes et les algorithmes de plus en plus performants. Optez plutôt pour les métiers plus difficiles à informatiser vu la complexité des sources d’information qu’ils doivent gérer : avocat, directeur des ressources humaines ou encore… CEO.

(*) Des chercheurs de l’Université d’Oxford ont dressé une liste complète des métiers, classés par risque d’automatisation, du moins menacé (diététicien) au presque condamné (télémarketer).

http://www.oxfordmartin.ox.ac.uk/downloads/academic/The-Future-of- Employment.pdf

3 Apprenez le code

Tout le monde n’est pas destiné à étudier l’informatique. Par contre, maîtriser son langage, le code, peut s’avérer particulièrement utile dans un monde connecté, où de plus en plus de données sont échangées numériquement. “Que l’on soit électricien, juriste ou infirmière, on est en contact avec l’informatique. Sur un CV, le code est devenu aussi important qu’une langue étrangère”, estime Martine Tempels. La patronne de la division business de Telenet est tellement convaincue de l’importance de l’apprentissage du code qu’elle a lancé en Belgique l’initiative CoderDojo. Ce programme gratuit, piloté par des coachs volontaires, a pour but d’initier les jeunes de sept à 17 ans au code informatique, au développement de sites web, de logiciels, d’applications mobiles, etc. Une trentaine de clubs CoderDojo, réunissant plus de 1.000 jeunes chaque mois, existent déjà en Belgique, essentiellement à Bruxelles et en Flandre. “Les jeunes y apprennent à être créatifs, à collaborer, à s’enrichir mutuellement”, explique Martine Tempels. D’après la haute responsable de Telenet, le langage informatique devrait figurer dans les programmes scolaires, dès l’enseignement primaire. La Grande- Bretagne vient de l’introduire dans le cursus des jeunes, dès l’âge de cinq ans. En Belgique, rien de tout ça pour l’instant. Raison de plus pour prendre les devants.

4 Prenez un virage à 180 degrés

Les carrières linéaires, c’est terminé. “Désormais, dans une carrière typique, on enchaîne les expériences multiples. On lance une start-up, on passe dans plusieurs grandes entreprises, dans des PME… Toutes ces expériences sont intéressantes et valorisées par les recruteurs”, indique Steve Goossens (Accenture). Vu les risques qui pèsent sur l’emploi, et même sur certains métiers, il importe plus que jamais d’être agile. Voire de se former en cours de route à une tout autre spécialité que celle que l’on avait intégrée initialement. Selon Bruno Colmant, cette nouvelle réalité devrait pousser l’enseignement supérieur à se repenser : “Les études sont trop longues par rapport à ce qu’elles offrent comme opportunités. Au lieu de faire une fois cinq ans d’études, on devrait peut-être faire trois fois deux ans, intercalés à divers moments de la carrière.”

5 Arrêtez vos études

Les études supérieures offrent-elles encore un job sur un plateau d’argent ? Hélas non. En tout cas plus systématiquement. Certains sont carrément convaincus que l’université est un frein au développement économique. C’est le cas de Peter Thiel. Le cofondateur de PayPal a créé une bourse réservée aux jeunes de moins de 20 ans qui ont un projet d’entreprise innovant. Les lauréats du Thiel Fellowship reçoivent une bourse de 100.000 dollars pour plancher sur leur idée pendant deux ans. Seule condition : ils doivent lâcher leurs études universitaires, considérées comme une distraction inutile. “Au lieu de simplement étudier, vous agissez”, argumente Peter Thiel sur son site internet. Depuis son lancement en 2011, le programme, ouvert à toutes les nationalités, a permis, d’après son initiateur, de générer de l’activité économique pour plus de 100 millions de dollars et de créer plusieurs centaines d’emplois.

6 Travaillez moins… pour gagner moins

Et si on passait à la semaine de trois jours ? C’est la proposition formulée par le milliardaire mexicain et magnat des télécoms Carlos Slim. Son idée : travailler trois jours de manière acharnée (11 heures !) et se reposer le reste de la semaine, sachant aussi que selon lui, nous travaillerons bientôt jusque 70 voire 75 ans. “Avec trois jours de travail par semaine, nous aurions davantage de temps pour nous détendre, et avoir une meilleure qualité de vie. Cela serait également une excellente façon de créer de nouvelles activités de divertissement et de loisirs”, analyse le patron d’América Móvil. Certains vont même plus loin, comme l’écrivain néerlandais Rutger Bregman. Dans son dernier livre De l’argent gratuit pour chacun, il propose de passer à la semaine de 15 heures, afin de dégager plus de temps pour des loisirs de qualité.

Serons-nous un jour contraints de passer par ce type de mesure radicale ? Si l’emploi disponible se raréfie sous les effets d’une croissance molle et de l’automatisation d’un nombre toujours plus important de métiers, il faudra peut-être songer à redistribuer plus équitablement le temps de travail au sein de la population active. Problème : qui dit réduction du temps de travail dit réduction du salaire. Devrons-nous demain nous résoudre à voir notre niveau de vie baisser ? “Aujourd’hui, ce sont les chômeurs qui perdent tout, pointe l’économiste Philippe Defeyt. Demain, il faudra accepter que tout le monde perde un peu.”

Si l’on opte pour une réduction du temps de travail, Philippe Defeyt défend le régime de l’allocation universelle : un revenu minimum pour tous visant à couvrir nos besoins essentiels, auquel peuvent s’adjoindre des revenus professionnels. Au final, l’équation globale reste la même : qui dit moins de travail, dit moins de revenus.

7 Créez le Google belge

Si l’emploi se fait rare, pourquoi ne pas le créer soi-même ? Aujourd’hui encore, trop peu d’entrepreneurs osent se lancer. Les derniers chiffres de créations d’entreprises relayés par Graydon le confirment : 37.000 start-up ont vu le jour en Belgique au premier semestre 2014, ce qui représente une chute de 2,91 % (-11,2 % en Wallonie, +0,31 % à Bruxelles, +2,14 % en Flandre).

La peur de l’échec paralyse-t-elle encore trop les entrepreneurs en herbe ? “C’est du pipeau. Nous avons tous les talents nécessaires en Belgique, des gens bien formés, ultra-compétents”, estime Sébastien Deletaille, CEO de la société Real Impact, qu’il a lancée il y a cinq ans (50 collaborateurs, 10 millions d’euros de chiffre d’affaires). Selon ce jeune entrepreneur, qui a fait le choix d’installer son entreprise à Bruxelles alors que son business est international, le problème réside ailleurs : “On valorise encore trop les carrières dans les grands groupes et les grandes entreprises. C’est une sorte d’idéal à côté duquel la carrière d’entrepreneur semble moins attractif.” Le CEO propose d’instaurer une sorte de numerus clausus d’entrepreneurs, que l’enseignement supérieur devrait produire chaque année. “Ce serait transformateur pour notre pays”, assure-t-il.

L’entrepreneuriat est en effet une excellente réponse au climat économique morose. Les jeunes et leurs talents pour l’innovation ont un rôle à jouer dans ce contexte. D’après une étude pilotée par Accenture, les jeunes entrepreneurs actifs dans l’économie digitale ont le potentiel pour créer 10 millions de jobs dans les prochaines années dans les pays du G20. En Belgique aussi, le potentiel existe, estime Steve Goossens, senior manager innovation & growth strategy chez Accenture : “Le marché de l’emploi se transforme, il devient plus difficile d’accès, mais il est aussi plus diversifié. Cela ouvre des opportunités nouvelles, qu’il faut saisir en créant des entreprises. Les centres de décision quittent progressivement la Belgique. Mais grâce à nos atouts (multilinguisme, flexibilité culturelle, haut niveau d’éducation, internationalisation…), nous pouvons créer le Google du futur en Belgique. Pour cela, nous avons besoin de jeunes entrepreneurs innovants.” A bon entendeur…

8 Prenez le large

Si le boulot manque en Belgique, pourquoi ne pas s’expatrier ? Si c’est en Europe, pas de problème a priori : la libre circulation des travailleurs est garantie, même si l’accès à certaines professions est parfois conditionné à certains diplômes ou formations. Le problème principal de l’Europe est que la crise frappe le continent dans son ensemble. Avec un taux de chômage des jeunes particulièrement dramatique dans le Sud : 57 % en Grèce, 53 % en Espagne, 49 % en Italie. S’expatrier en dehors de l’UE est une autre solution.

Mais elle ne s’offre pas forcément à tous les profils. Les diplômés de l’enseignement supérieur maîtrisant plusieurs langues sont les plus demandés. Malgré la crise qui frappe notre pays, Hugues du Roy de Blicquy, vice-président de l’Union francophone des Belges à l’étranger (UFBE), n’a pas constaté un exode massif de nos diplômés.

Le régime belge reste en effet très protecteur et plus rassurant qu’une expatriation, qui ne séduit que “les plus audacieux”, d’après le représentant de l’UFBE. D’autant que les possibilités réelles de décrocher un job dans les pays les plus demandés (Etats-Unis, Canada et Australie), ne sont pas infinies. Par exemple, pour obtenir un permis de résident permanent au Canada, il faut avoir un job fixe depuis un an au moins, dans une profession “admissible”. Bienvenue donc aux médecins, directeurs financiers, ingénieurs civils, techniciens en génie électronique, psychologues, traducteurs… Par contre, pas de place pour les juristes (sauf cadres supérieurs), instituteurs et autres journalistes. Et dès que le plafond annuel des 25.500 demandes est dépassé, le Canada vous fixe rendez-vous à l’année suivante.

Cela n’empêche pas qu’une expérience d’expat reste avantageuse pour les jeunes, rappelle Hugues du Roy de Blicquy (UFBE) : “Le système belge est un système gérontocratique, où l’on est payé en fonction de l’ancienneté. L’expatrié accédera plus rapidement à des responsabilités et, à travail égal, gagnera en moyenne mieux sa vie qu’en Belgique.”

9 Osez le mode free-lance

L’avenir réside-t-il dans la carrière de free-lance professionnel ? Certains le pensent. “A terme, nous vivrons dans une société composée d’un grand nombre de free-lances qui travaillent sur des projets. Plutôt que de travailler pour un employeur spécifique, ils passent d’une entreprise à l’autre tous les deux ou trois mois”, explique Sven Nouten, du Syndicat neutre pour indépendants (SNI). Le nombre de jeunes indépendants a déjà tendance à augmenter ces dernières années (+2,1 % en 2011, +3 % en 2012, +1,4 % en 2013). La Belgique compte aujourd’hui 103.000 indépendants âgés de 18 à 30 ans. Cette évolution — difficile encore de parler d’une tendance lourde — n’est-elle pas justement due aux difficultés rencontrées sur le marché du travail ? Ces jeunes se lancent-ils comme free-lance par défaut ? “C’est une minorité, assure Sven Nouten. Mais il faut lutter contre cette image de précarité qui est parfois attachée aux free-lances et rendre plus attractif leur statut social.”

10 Profitez de la décentralisation de l’économie

Les nouvelles technologies auront peut-être bientôt un impact totalement inattendu : la disparition des processus industriels de masse tels que nous les connaissons aujourd’hui. C’est la conviction de Christophe Hermanns (33 ans). Selon le fondateur de l’entreprise namuroise Vigo Universal, l’explosion et la démocratisation de l’impression 3D vont avoir pour effet de décentraliser la production. “Les objets en eux-mêmes vont perdre de leur valeur, parce qu’ils pourront être dupliqués à l’infini. La valeur se situera au niveau de leur conception”, explique Christophe Hermanns.

L’impact sur le marché du travail est potentiellement énorme. Si les chaînes de fabrication de meubles, de vaisselle, de pièces de voiture, d’outils, de jouets, etc. disparaissent, des millions d’emplois productifs sont en jeu. Par contre, les ingénieurs, les designers, les programmeurs informatiques… ont de beaux jours devant eux. Ce sont eux qui créeront les programmes et les fichiers informatiques qui permettront d’imprimer tous ces objets. “Nous devons évoluer vers des métiers plus en adéquation avec notre temps , pointe le fondateur de Vigo. La difficulté étant que la vitesse de cette évolution s’est accélérée de façon phénoménale. “L’évolution des industries a toujours forcé les hommes à se requalifier, avance Christophe Hermanns. Mais ce qui prenait auparavant deux ou trois générations se fera demain en moins d’une génération.”

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