Bruno Colmant

Prendre l’été pour réfléchir positivement à nos avenirs

Bruno Colmant Economiste. Professeur à la Vlerick School, l’ULB et l'UCL.

Les années vingt de notre siècle sont celles de ce qu’on appelle en chimie un précipité, c’est-à-dire un solide qui émerge d’un liquide.

Un précipité, dans l’urgence de celui qui court vers le précipice. Un précipité, comme celui qui dévore tout le futur pour jouir des derniers filaments d’une délectation immédiate et narcissique. Un précipité, comme celui qui est tout simplement pressé d’en finir avec lui-même.

Car tout se désagrège : l’environnement, la paix, la bulle de bien-être financière dans laquelle nous flottions. Les défis climatiques conduiront à des convulsions sociales. Nous nous précipitons, car nous ne comprenons pas la systématicité des problèmes.

Le paroxysme de la déflagration de nos sociétés se profile à l’horizon de quelques années. Seul un changement politique radical, que je qualifierais de bifurcation, dans les domaines environnementaux et sociaux, permettra de retrouver un avenir pour les générations qui nous suivent. Il nous appartient de restaurer la solidité de nos socles étatiques dans un modèle d’équilibre politique centré sur le culte de l’intérêt général, c’est-à-dire un contrat social de solidarité. Il faudra désormais parler d’économie politique au même titre que d’économie de marché.

Il faut réfléchir car face à l’obsolescence d’une discipline individuelle au service de l’intérêt général et des grands objectifs collectifs, le monde occidental traverse une crise morale. Le temps nous est donc compté pour réengager les citoyens dans un contrat social et environnemental solidaire, car ce qui est en jeu, c’est la paix et la bienveillance sociales, et bien sûr nos descendants. Nous ne parviendrons pas à vivre dans des mondes hermétiques. Il faut ouvrir le débat sociétal avec une vision profondément humaniste. Nos gouvernants doivent écouter les plaintes populaires et agir de manière apaisante plutôt que de s’étourdir dans des tourbillons médiatiques narcissiques et cacophoniques.

J’ai une conviction : loin des abandons consentis, l’État stratège doit être réhabilité. Un État supplétif des marchés financiers, c’est-à-dire dépouillé d’une approche partenariale, n’a aucun aboutissement, sinon la colère d’une population qui se sent démunie contre des chocs qui la dépasse. Il faut un multilatéralisme destiné à fonder un nouveau pacte mondial pour répartir autrement le pouvoir, les ressources et refonder le contrat social, à renforcer la participation des jeunes et prendre en compte les générations futures dans les décisions politiques et à fournir davantage d’investissements publics pour mieux gérer les chocs et crises mondiales.

Alors, un conseil : profitons de l’été pour apprendre, lire, réfléchir. Longtemps et intensément. Lisons les changements sociétaux et sociaux. Engageons-nous.

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