Coluche, la bêtise des eurodéputés et l’invasion automobile chinoise

Coluche
Coluche. © Getty Images
Amid Faljaoui

L’un de mes amis, homme d’affaires spécialisé dans la biométrie, a coutume de me dire que le plus grand philosophe selon lui, c’est Coluche – je souriais sans le contrarier, mais depuis ce mercredi, je pense qu’il a raison.

C’est en effet Coluche qui avait dit sous forme de boutade : « les technocrates, si on leur donnait le Sahara, dans 5 ans, faudrait qu’ils achètent du sable ailleurs ». Comme il avait raison. Souvenez-vous, je l’ai évoqué ici à plusieurs reprises : en votant l’interdiction de la vente de voitures thermiques pour 2035, sans laisser aucune chance à d’autres formes de motorisation moins polluantes, les députés européens ont déroulé le tapis rouge aux constructeurs automobiles chinois.

Le patron de Stellantis l’a dit et répété : l’Europe est le seul continent au monde à avoir voté ce genre de loi et à avoir accepté de voir une industrie vieille de plus d’un siècle disparaitre sous les coups de butoir chinois alors que nous avions une avance sur le monde. L’Europe de l’avis unanime des constructeurs autos a décidé de se suicider sur le plan industriel alors qu’elle sait que les voitures chinoises électriques sont moins chères et que la Chine fabrique la majeure partie des batteries électriques au niveau mondial. Cette menace a pris forme de manière très concrète au salon de l’automobile de Munich de ce mois de septembre. Plus des 40% des entreprises représentées à ce salon étaient chinoises. Si on regarde les chiffres, ce n’est guère réjouissant. Sur le segment électrique, la part des marques chinoises est passée à 10% en juillet dernier en Europe. La menace est hyper dangereuse pour les marques moyen de gamme en Europe comme Stellantis ou Volkswagen. Pour une simple raison : les Chinois ont déjà détrôné VW dans leur propre pays : pour la première fois de l’histoire, c’est une marque chinoise (BYD, en l’occurrence) qui devient la première marque la plus vendue en Chine en passant devant l’allemand Volkswagen.

Et l’Europe est le prochain terrain de bataille des marques chinoises. D’abord, parce que les Américains moins naïfs que nous leur ont barré le chemin du marché américain. Ensuite, en attaquant de plein front l’Europe, ces marques chinoises peuvent amortir des modèles déjà conçus pour le marché chinois. Ils peuvent le faire, car les marges sont plus fortes en Europe qu’en Chine. En plus, les analystes de la banque suisse UBS ont littéralement désossé une voiture électrique chinoise et ont pu voir de leurs propres yeux que les constructeurs chinois avaient un avantage de coût de l’ordre de… 25%.

En clair, comme l’avait annoncé en vain le patron de Stellantis, l’Europe s’est donnée à la Chine sur un coup de tête des eurodéputés sensibles à juste titre au discours écologique, mais sans en étudier les contours, les conséquences et les alternatives possibles. Décision funeste. Sauf que depuis ce mercredi. L’Europe s’est enfin réveillée et, sous l’impulsion de la présidente de la Commission européenne, elle a enfin – alléluia – décidé d’ouvrir une enquête sur les subventions accordées par les autorités chinoises à leurs constructeurs de voitures électriques. Ce qui est, évidemment, une forme de concurrence déloyale.

Mieux vaut tard que jamais, mais mon Dieu, pourquoi se réveiller ce mercredi alors que les spécialistes prédisaient ce séisme dès le départ ? Peut-être que Ursula von der Leyen est tombé sur la blague de Coluche sur les fonctionnaires et le sable du Sahara ? Quant au pauvre Carlos Tavares, le patron de Stellantis, il pourra toujours se consoler en se souvenant du vieil adage qui dit que c’est avoir tort que d’avoir raison trop tôt. J’ajouterai que c’est le défaut des lois votées uniquement sur le coup de l’émotion. Lorsque la raison cède le pas à l’émotion, le désastre n’est jamais loin. Et ça, ce n’est pas un proverbe, c’est juste la réalité crue.

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