Après la transition énergétique, la transition militaire ?

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Amid Faljaoui

On anticipait une croissance verte, mais au final, nous sommes confrontés à une croissance brune teintée de rouge. Un scénario assez surprenant auquel personne n’avait vraiment prêté attention.

Comme toujours, les tendances réelles surprennent même les meilleurs prévisionnistes. Après la période du COVID, les médias et les politiciens nous ont bombardés de discours sur le plan de relance vert de l’Europe, annonçant des sommes astronomiques et promettant une indépendance vis-à-vis de la Chine tout en verdissement accéléré du continent.

Cependant, avec du recul, on se rend compte que cette transition verte se réalise moins rapidement que prévu, et parfois au détriment de notre propre industrie. Nous constatons cela avec l’afflux de voitures électriques chinoises sur nos marchés, inondant nos concessions et nos ports fluviaux devenues d’immenses parkings pour ces véhicules. Les délais d’écoulement sont tels qu’à leur vente, ces voitures auront déjà un à deux ans, subissant une dépréciation qui pourrait les rendre moins chères que les voitures thermiques européennes, créant ainsi une concurrence déloyale.

Revenons maintenant à cette croissance brune, teintée de rouge. Il s’agit de la croissance résultant du réarmement de l’Europe et du reste du monde. Sous l’impulsion de Donald Trump, mais également de Joe Biden, l’Europe est sommée d’augmenter son budget de défense à hauteur de 2 % du PIB. Cependant, des pays comme la Belgique et la France ne respectent pas ce minimum requis. Le résultat est une course aux armements mondiale sans précédent, avec un montant global de 2400 milliards de dollars en 2023, la plus forte augmentation depuis 15 ans. Et tout cela, grâce en grande partie à Vladimir Poutine, véritable champion des dépenses militaires à l’échelle mondiale.

Financer l’effort de guerre en Europe

Même la Banque européenne d’investissement, jusqu’ici considérée comme la banque du climat pour l’Europe, est désormais sollicitée pour assouplir ses critères afin de financer l’effort de guerre en Europe. Cela ouvre également la voie aux banques commerciales privées pour accroître leurs prêts au secteur de la défense, autrefois très restrictif en raison des normes environnementales, sociales et de gouvernance (ESG).

L’ironie de cette situation tragique est que ce réarmement aura un impact positif sur notre croissance économique, mais à court terme, cette croissance, au lieu d’être vertueuse et verte, sera également teintée de rouge. Les citoyens attendaient une transition énergétique, mais se retrouvent également confrontés à une transition militaire. C’est un double défi auquel personne n’avait réellement pensé et qui nécessitera des financements considérables. Mais peut-on vraiment blâmer les décideurs alors que la menace semble si proche, à seulement 2000 kilomètres de nos frontières ?

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