L’IA générative (GenAI) fascine et interpelle les dirigeants d’entreprise à travers toute la Belgique – et ce n’est pas un hasard. Ce qui n’était au départ qu’une recherche spéculative s’impose désormais au cœur du fonctionnement des entreprises, de leur relation client et de leurs processus décisionnels. Toutefois, comme beaucoup d’entreprises le découvrent, le vrai défi ne consiste pas à disposer d’un grand modèle de langage (LLM) dans son écosystème tech, mais à faire en sorte que la GenAI ait un ROI (Return on Investment) mesurable.
Justement, une évolution importante s’amorce : la génération augmentée de récupération (RAG), une approche transformatrice qui connecte les systèmes d’IA aux données uniques d’une organisation, leur permettant de générer des réponses à la fois plus précises et plus pertinentes dans leur contexte.
RAG : son rôle réel et son importance stratégique
Si les LLM ont démontré une remarquable fluidité dans la génération de texte, ils sont cependant limités par la nature statique de leurs données d’entraînement. Dans des secteurs en constante évolution, les réponses sont dès lors obsolètes ou trompeuses. Ces lacunes représentent un vrai risque pour les entreprises soumises à un cadre réglementaire strict.
C’est là que la RAG entre en jeu. Et pour ceux d’entre nous qui pilotent la transformation dans des environnements complexes et changeants, c’est l’innovation que nous attendions impatiemment.
La RAG met des données supplémentaires à la disposition des LLM, ce qui accroît leur efficacité et leur évolutivité sans avoir à réentraîner le modèle. Les entreprises peuvent ainsi faire évoluer leurs projets d’IA avec agilité, en fonction de leurs priorités. De plus, la capacité de la RAG à exploiter diverses sources de données externes lui permet de s’adapter à des besoins et usages multiples, élargissant le champ d’application du modèle vers de nouveaux cas d’utilisation.
Le résultat ? Des réponses qui ne sont pas seulement intelligentes, mais qui s’appuient également sur des données actuelles et vérifiables. Les performances du modèle sur les requêtes spécifiques à une entreprise s’en trouvent ainsi améliorées. Dans ces conditions, personne ne s’étonnera que le marché de la RAG devrait passer de 1,2 milliard de dollars en 2024 à plus de 67 milliards de dollars d’ici 2034, avec un taux de croissance annuel composé (TCAC) de près de 50 % (Precedence Research).
Une nouvelle frontière : la RAG agentique
Poussons l’idée un cran plus loin. Imaginez que votre assistant GenAI alimenté par la RAG puisse également planifier des tâches, prendre des décisions et agir en votre nom. À la différence des systèmes d’IA traditionnels qui dépendent fortement des instructions humaines ou des entrées structurées, l’IA agentique est un système logiciel qui utilise l’intelligence artificielle pour prendre des décisions et des mesures de manière autonome afin d’atteindre un ensemble d’objectifs définis par des humains jouant le rôle de coordinateurs ou de gestionnaires. Ce système peut organiser des emplois du temps, gérer des chaînes d’approvisionnement, répondre aux clients dans un langage naturel et même exécuter des tâches opérationnelles qui correspondent à un objectif précis, le tout sans intervention humaine.
Il faut savoir que les systèmes agentiques ne sont pas seulement réactifs : ils sont proactifs et collaboratifs, et fonctionnent de manière de plus en plus humaine. Cette évolution ouvre la voie à une plus grande agilité organisationnelle, à une prise de décision en temps réel et à des gains d’efficacité considérables. Elle fait aussi naître des questionnements éthiques et des changements culturels qui nécessitent une gouvernance éclairée.
Guide stratégique pour les dirigeants
Les entreprises de la région EMEA accélèrent leur adoption de l’IA générative, et la Belgique se démarque particulièrement. En 2024, 24,7 % des entreprises belges comptant au moins 10 employés ont déclaré utiliser des technologies d’IA, plaçant le pays dans le Top 3 de l’UE en matière d’adoption de l’IA, juste derrière le Danemark et la Suède (Eurostat). Cela représente une augmentation de 10,9 points de pourcentage par rapport à 2023, une des plus fortes hausses annuelles en Europe. Malgré cette croissance rapide, des défis de taille persistent. Quand bien même les entreprises belges testent des outils d’IA tels que l’exploration de textes, la reconnaissance vocale et la génération de langage naturel, leur capacité à déployer ces technologies à grande échelle reste limitée. Une étude de Dell révèle que 91 % des entreprises mondiales considèrent la préparation des données comme le principal obstacle au déploiement à grande échelle de l’IA, et 94 % estiment que leurs employés doivent développer leurs compétences pour exploiter le plein potentiel de l’IA.
Pour se préparer à cette transition et tirer parti de la RAG/RAG agentique, voici cinq mesures concrètes que les dirigeants peuvent prendre :
1. Bâtissez un socle de données et d’infrastructure adéquat
La performance des systèmes RAG, en particulier des RAG agentiques, est totalement dépendante des données qui les alimentent. Trop d’entreprises ont des systèmes de données fragmentés et une mauvaise gouvernance des données. Il est essentiel d’investir dans des architectures de données cloud native, des pipelines de données en temps réel et des protocoles de gouvernance standardisés. L’intégration de la génération de données synthétiques et de mécanismes d’entraînement IA respectant la confidentialité contribuera également à accélérer la mise à l’échelle tout en restant conforme aux réglementations régionales telles que le RGPD.
2. Établissez maintenant une gouvernance de l’IA
Les systèmes RAG agentiques fonctionnent avec des niveaux d’autonomie plus élevés, ce qui soulève des questions en matière de responsabilité. Il est donc essentiel d’instaurer des cadres de gouvernance solides pour l’IA, qui doivent inclure des directives éthiques, une supervision humaine, des pistes d’audit et des tests basés sur des scénarios. La transparence est également essentielle pour les entreprises, en particulier vis-à-vis des obligations du RGPD et des nouvelles directives énoncées dans le règlement européen sur l’IA (EU AI Act), afin que les activités restent conformes et sécurisées.
3. Préparez le personnel
L’avenir du travail ne se joue pas entre humain et machine – il se construit sur leur collaboration. Donnez à vos équipes la formation, les outils et la confiance dont elles ont besoin pour travailler avec les systèmes d’IA. Vous aurez besoin de traducteurs IA, de prompt engineers et, surtout, de personnes capables d’identifier les opportunités et d’agir en conséquence.
Une compétence clé dans cette transition est la maîtrise de l’IA : savoir quand, où et comment utiliser les outils d’IA de manière sûre et responsable. Selon l’étude Innovation Catalyst de Dell, 45 % des entreprises belges considèrent déjà la maîtrise de l’IA comme une compétence essentielle pour leur personnel, ce qui témoigne d’une prise de conscience croissante.
Le rapport Future of Work de LinkedIn révèle que la demande en compétences en IA et en apprentissage automatique dans l’EMEA a augmenté de plus de 40 % en 2023, et ce mouvement ne fera que s’accélérer. Les entreprises qui investissent dans la formation seront celles qui prospéreront.
4. Menez des projets pilotes ciblés
Vous ne devez pas déployer la RAG agentique dans toute l’entreprise dès le départ. Adoptez une approche « test & learn » : lancez des projets pilotes maîtrisés avec des KPI précis alignés sur les priorités de l’entreprise, ajustez rapidement selon les résultats, et généralisez ce qui fonctionne – documents d’onboarding, FAQ clients, ou requêtes relatives aux politiques internes. Créez une dynamique avec des réussites significatives.
5. Ancrez l’IA dans la valeur métier
Une stratégie d’IA n’a de sens que si elle sert les objectifs business. Qu’il s’agisse d’accélérer la prise de décision, d’améliorer l’expérience client ou de gagner en efficacité, l’adoption de la GenAI doit avoir des résultats mesurables. Par exemple, un détaillant allemand utilise la RAG pour alimenter des assistants achat qui vérifient les stocks en temps réel et proposent des suggestions de produits personnalisées. La conclusion s’impose d’elle-même : l’efficacité de ces technologies réside dans leur capacité à résoudre des défis professionnels concrets.
L’heure est venue d’évoluer
Pour les dirigeants, le message est clair : ne vous arrêtez pas aux LLM. Propulsez votre organisation dans une nouvelle ère de l’IA d’entreprise – une intelligence qui s’enracine dans vos enjeux, sert vos ambitions et mérite votre confiance. L’IA générative arrive à maturité et redéfinit les règles du jeu. Fini le temps des modèles pour les modèles, place aux résultats business concrets : automatisation ciblée, décisions accélérées, insights approfondis. L’opportunité : bâtir une organisation non seulement plus performante, mais aussi plus intelligente, flexible et parée pour l’avenir.
Koen Segers, Managing Director – BeLux, Dell Technologies