Carte blanche

La night life bruxelloise : un pôle touristique, culturel et économique marginalisé

Faisons de la nuit bruxelloise une ambassadrice de la capitale de l’Europe. Il est temps de franchir une nouvelle étape et de reconnaitre l’économie nocturne comme un facteur développement important pour le rayonnement de Bruxelles. Nul besoin de réprimer la nuit, apprivoisons-la.

La nuit a longtemps été plongée dans la terreur, elle faisait peur, les villageois s’endorment, un espace-temps de non-droit s’ouvre et les loups se réveillent. Un Cliché qui a exclu la planification de la nuit dans le développement urbain des villes.  

Mais depuis l’invention l’éclairage nocturne, les citoyens se sont réappropriés la nuit, des villes comme Berlin ou Barcelone sont qualifiées du surnom de « des villes qui ne dorment jamais », accueillantes et ouvertes sur le monde. Quand le week-end approche, elles représentent avec d’autres les destinations privilégiées du tourisme intra-européens. 

 Il convient de considérer la nuit dans son approche multidimensionnelle, dans les cités attractives du monde, la nuit se pense et se planifie comme la vie en journée. L’économie de la nuit est déjà un indicateur important pour mesurer la vitalité économique d’une ville.

A titre d’exemple, en dehors l’Europe, les cas de la Chine ou le Canada :

Une récente étude commandée par le ministère du Commerce a révélé que dans les grandes métropoles chinoises 60% des actes de consommation ont lieu dans la nuit, et les ventes réalisées entre 18 et 22 heures par les grands magasins dépassent 50% de leur chiffre d’affaires journalier.

Ce constat a conduit les autorités responsables du tourisme et de la culture à travailler en étroite collaboration et à identifier des zones nationales existantes ou à construire, sur lesquelles les localités pourraient concentrer des activités nocturnes réunissant la culture, le tourisme et Horeca.

Quant à l’économie d’Ottawa pour l’année 2019 totalisait 5,5 milliards de dollars en dépenses diurnes et en comparaison son flux de dépenses nocturne représentait pas moins de 1,5 milliard soit environ 30 % de l’activité des dépenses en journée.

À la suite de quoi, les responsables politiques de la région ont approuvé un plan d’action économique de la nuit pour promouvoir et développer des expériences et activités de la vie nocturne entre 18 et 6 heures. Ils lanceront en 2024 un bureau du commissaire de la vie nocturne que l’on peut assimiler à un échevinat ou une mairie de la nuit.

Toutes ces démarches ont lieu sans faire fi des autres acteurs, des résidents, des visiteurs et des entreprises dans chaque quartier, leur participation et encouragée et stimulée.  Les autorités de la ville ont la conviction que la mise en place d’un environnement nocturne dynamique, diversifié et encadré, entraînera la création d’emplois, permettra d’attirer les talents et les investissements et favorisera la croissance économique tout en renforçant l’image de marque de la ville.

La vie nocturne a quelque chose de transgressif, certains essaient de la stopper ou de l’encadrer rigoureusement d’autres la géolocalisent et l’encouragent pour qu’elle participe pleinement au développement de l’identité de la ville.

Il fut un temps plus glorieux ou la nuit bruxelloise était plébiscitée par les noctambules, mais désormais on peine à concurrence les autres capitales européennes. Comme le souligne l’ASBL 24hBrussels, il existe cette impression que la ville n’est pensée que pour le jour, la gestion de la nuit se limiterait aux problèmes de nuisance et au rapport de bon voisinage.  

Or la stratégie fertile à adopter tient compte au changement de mentalité à opérer, il n’est pas simplement question de tolérer la nuit, mais de la considérer pleinement comme un facteur d’attractivité, un rempart supplémentaire à la paupérisation de notre ville.

Le regard et l’intérêt des autorités politiques doivent maturer quant à cette situation. Il s’agit d’abandonner la vision dépassée de la vie nocturne. Au-delà du prisme seulement des désagréments et des nuisances potentielles, il existe tout un monde qui comprend l’offre culturelle, gastronomique, commerciale, festive, source de rencontres et de créativité. Qu’il soit question d’aménager les soirées des locaux ou d’attirer un tourisme intra belge ou un tourisme de par-delà les frontières, les clubs, les sites culturels, les salles de concerts et de spectacles, sont des localisations pour faire l’expérience de la vitalité, la convivialité et le caractère d’une ville, ce sont là des paramètres importants qui marquent un visiteur et rendent son séjour mémorable.

La night life bruxelloise doit traduire son statut de capitale de l’Europe. Il faut impérativement cartographier les besoins et le potentiel la vie nocturne à Bruxelles. 

 À combien estime -t- on le chiffre d’affaires de la nuit ? Combien d’emplois directs et indirects ? Peut-on envisager des modifications favorables à l’économie de la vie nocturne en matière de mobilité, de règlements et services de la Ville.  

Imaginez un Bruxelles avec des statistiques et données existantes autour de la vie nocturne, la ville de Bordeaux s’est lancée avec précieux exercice dont on pourrait s’inspirer. En considérant la nuit et le travail de nuit comme un vecteur important du développement du territoire, les autorités ont analysé l’impact direct et indirect des activités de la nuit.

Imaginez un Bruxelles avec un réseau de transport en commun disponible pour vitaliser la nuit comme cela a pu être fait à Berlin avec une offre multimodale riche et variée. Les bus roulent jusqu’à 1h et laissent place ensuite aux bus de nuit sur les lignes plus fréquentées. Le tram est fonctionnel 24/24.

Imaginez un Bruxelles ou le patrimoine immobilier de l’Etat serait valorisé de façon insolite par les entrepreneurs de la nuit comme cela se fait déjà actuellement à Barcelone.

Imaginez un Bruxelles ou on protège les établissements de la nuit et on rétablit la confiance des investisseurs du secteur.

Les villes qui nous concurrencent, comme Berlin, Amsterdam, Paris, Barcelone, pour ne citer qu’elles, sont plus offensives sur le thème de la nuit. Ne soyons pas trop hagards, ne nous laissons pas déborder et façonnons la vie nocturne bruxelloise.

Par Sarah Megherbi, Présidente commission brussels by night des Jeunes MR et Kevin KARENA, Président des Jeunes MR Bruxelles-Périphérie

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