Carte blanche

Les ETF : une bonne alternative aux comptes épargne ?

La semaine passée a vu les associations de consommateurs et nos dirigeants politiques monter au créneau pour demander aux banques du pays d’augmenter les maigres taux qu’elles proposent aux épargnants sur leur compte épargne. Cet appel du pied n’a pas encore été entendu par les banques. Face à cette situation, que peut faire l’investisseur ?

Le retour de l’inflation

Pour infléchir l’inflation galopante, la Banque Centrale Européenne (BCE) a fortement augmenté le taux de dépôt qu’elle offre aux banques commerciales traditionnelles que nous utilisons tous. En moins d’un an ce taux est passé de -0,5% à 3,25%.

La logique simplifiée est la suivante: lorsque la BCE augmente son taux, tous les autres taux d’emprunt montent mécaniquement ; notamment les taux demandés par les banques commerciales pour octroyer des prêts aux particuliers et aux entreprises. L’argent coûte plus cher à emprunter.

En conséquence, les gens et les entreprises consomment moins car ils ont tendance à retarder leurs prêts, leurs investissements et leurs dépenses. La demande de biens et services diminue, les prix n’augmentent plus et l’inflation diminue.

Rémunération basse de l’épargne: une injustice ?

Augmenter le taux de dépôt est l’arme ultime des banques centrales pour diminuer l’inflation. En général, à la suite d’une telle hausse, les banques commerciales augmentent les taux de rémunération qu’elles offrent à leurs clients sur les comptes épargne.

Elles le font par mécanisme de concurrence: la banque qui offre le plus haut taux rognera certes une partie de sa marge, mais attirera potentiellement plus d’épargnants pour compenser. Et elle compense quoi qu’il en soit par les taux des crédits à la consommation, hypothécaires ou autres qu’elle augmente par ailleurs.

Seulement voilà, les taux sur les comptes épargne végètent à 0,2%-0,5% auprès de toutes les grandes banques du pays. Voilà qui leur laisse une marge confortable, quand on sait que le taux demandé par exemple pour un crédit hypothécaire fixe à 20 ans flirte aujourd’hui avec les 4%.

La question-clé: que peut faire l’investisseur ?

Les épargnants crient à l’injustice dans un contexte où l’inflation frôle les 6%. Les banques se défendent en évoquant un rattrapage après plusieurs années où elles ont été légalement forcées d’offrir au moins du 0,11% sur les carnets de dépôts, alors que les taux à la BCE étaient négatifs.

Les taux des banques finiront probablement par remonter, c’est juste une question de temps. Mais jamais suffisamment pour battre l’inflation: au mieux, un compte épargne la neutralise.

La question devient alors: « Quelles sont les alternatives disponibles aujourd’hui pouvant m’offrir un plus grand rendement ? »

Ce que veut l’investisseur

Les investisseurs veulent tous les avantages du compte épargne: sans risque, capital garanti, et disponibilité immédiate de l’argent au besoin. En plus, ils en attendent un gros taux d’intérêt. En somme, un rendement important, sans prendre le moindre risque.

Mais ce désir bien compréhensible est contraire aux lois du marché: si on veut plus de rendement, il faut prendre plus de risque. Ce principe est aussi immuable que la loi de la gravité.

Il existe néanmoins des solutions d’investissement qui permettent de maximiser le rendement pour un niveau de risque accepté: les ETF ou « Exchange Traded Funds ».

Les ETF à la rescousse

Un ETF, aussi appelé tracker ou fonds indiciel, est un panier diversifié d’actions ou d’obligations qui suit un indice boursier, et offre donc la performance de cet indice.

Ainsi, il existe un ETF qui suit le BEL20 en achetant les parts des 20 plus grosses société belges cotées en bourse. Il existe aussi un ETF qui achète toutes les sociétés cotées du monde et livre donc la performance des bourses mondiales dans leur ensemble.

Un ETF partage plusieurs avantages avec un compte épargne : il est généralement très liquide et peu cher. Il est certes plus risqué, mais ce risque est modulable de façon assez fine et permet surtout d’envisager plus de rendement sur le long terme.

ETF obligataires

Par exemple, il existe des ETF qui rassemblent des obligations d’États européens (Belgique, Allemagne, France, Italie, Pays-Bas, etc.) d’une maturité de 1 à 3 ans et qui offrent au moment d’écrire ces lignes (mai 2023) un rendement intrinsèque de l’ordre de 3,35%.

C’est plus que ce qu’offre un compte épargne. Même s’il y a un risque de ne pas réaliser ce rendement, ce risque est limité du fait de la qualité des émetteurs (États de la zone euro), de la duration (courte) et de la diversification (plusieurs pays).

ETF actions

Malheureusement ces ETF obligataires ne corrigent toujours pas l’inflation et ne permettent pas de voir son pouvoir d’achat et son patrimoine réellement grandir. Pour cela, il faut prendre un peu plus de risque, par exemple avec un ETF qui contient un panier diversifié d’actions du monde.

Au cours des cinq dernières années, les actions mondiales ont connu trois crises majeures ayant entrainé des baisses temporaires du marché global: les tensions commerciales sino-américaines (-11%), le covid (-20%) et le retour de l’inflation exacerbé par la guerre en Ukraine (-20%).

Ces baisses sont la matérialisation du risque. Mais à chaque fois, les actions se sont reprises pour monter encore plus haut. A un point tel que lorsque l’on fait le bilan, elles ont réalisé un rendement annuel moyen de 7,4%, soit un rendement total cumulé de 43% sur 5 ans, malgré les crises.

En conclusion: n’attendez pas la remontée de taux

Ce niveau de rendement est supérieur à celui d’un compte épargne et permet d’envisager de battre l’inflation. Pour faire croitre un patrimoine sur le long terme, il n’est pas rationnel de compter uniquement sur son carnet d’épargne: il faut se résoudre à d’autres stratégies.

Se constituer un portefeuille d’ETF peut avoir du sens. Certes, l’investisseur consentira à un peu plus de risque sur le court terme, mais c’est là la rançon du rendement sur le long terme.

Une opinion de Matthieu Remy, CEO d’Easyvest, Harvard MBA, Ingénieur Civil.

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