Facture impayée… Quels sont les droits et obligations du consommateur?

FACTURE IMPAYÉE: ‘‘La loi interdit de se livrer à des pratiques trompeuses ou agressives.’’ © Getty Images

Les créanciers dont une facture est en souffrance peuvent, pour en réclamer le paiement, faire appel à une société de recouvrement, à un avocat ou à un huissier de justice. Non sans s’en tenir aux règles imposées par la loi. Quels sont les droits et les obligations du consommateur ?

Il arrive qu’une facture s’égare et finisse par être oubliée. Naguère, ce genre d’étourderie pouvait entraîner des frais de mise en demeure, dont le montant grimpait vite. Depuis le 1er septembre 2023, ce n’est plus le cas. Si le contrat a été conclu à partir de cette date, le premier rappel de paiement d’une facture impayée doit être envoyé sans frais supplémentaires. Pour les contrats antérieurs au 1er septembre 2023, les nouvelles règles s’appliquent depuis le 1er décembre 2023.

Si le contrat porte sur la fourniture régulière de biens ou de services (sur un abonnement annuel à un magazine dont le paiement est mensuel, par exemple), le nombre de rappels gratuits est de trois par an. Si une quatrième facture est impayée au cours de la même année, le créancier est en droit de porter en compte, à partir du rappel correspondant, des frais dont le montant ne peut dépasser 7,50 euros, majorés des frais postaux.

Le premier rappel doit contenir les informations suivantes : le nom et le numéro d’entreprise de la société qui réclame le paiement, la description du produit ou du service qui a donné naissance à la dette, la date à laquelle la créance devient exigible, le montant dû en principal, le délai de 14 jours dont le client dispose pour s’acquitter de la facture sans frais, et les frais auxquels il s’expose s’il s’en ­abstient.

‘‘Personne ne peut obliger le consommateur à payer tant qu’il n’y a pas été condamné par le tribunal” – Karen Ghysels.

Demande de précisions

‘‘Le consommateur a le droit de réclamer des précisions au créancier, souligne Karen Ghysels, directrice du Centre européen des consommateurs Belgique (CEC). Comme des documents justificatifs, des informations sur les modalités de contestation du ­rappel, ainsi que les facilités de paiement éventuellement disponibles.’’

Si le client n’a pas réagi au premier rappel, le créancier peut, à l’issue du délai de 14 jours, lui en adresser un deuxième, pour lequel il peut facturer jusqu’à 7,50 euros, augmentés des frais d’envoi.

Indemnité et intérêts de retard

Quatorze jours après l’envoi du premier rappel, le créancier peut donc, sous certaines conditions, facturer une indemnité et des intérêts de retard – rien d’autre. Il faut aussi pour cela que cette possibilité soit mentionnée dans le contrat ou dans les conditions générales. Le montant doit en outre être proportionnel au préjudice subi par l’entreprise. Il est par ailleurs plafonné : les intérêts de retard ne peuvent excéder le taux d’intérêt de référence, majoré de 8 points de pourcentage. Le taux d’intérêt est actuellement limité à 12,5 %.

L’indemnité forfaitaire doit être détaillée, et proportionnelle au montant de la facture. Un tribunal pourra toujours décider que même s’il respecte les maxima imposés par la loi, le montant des dommages est disproportionné par rapport à une estimation raisonnable du préjudice subi par l’entreprise, et qu’il est de ce fait illégal.

Tiers

Le recours à une société de recouvrement, à un avocat ou à un huissier de justice est réglementé par la loi. ‘‘Tout n’est pas permis, acquiesce Karen Ghysels. Et surtout : le mandataire ne peut forcer personne à payer quoi que ce soit dans le cadre d’un recou­vrement amiable. Pour éviter toute ambiguïté, le législateur impose que la lettre du huissier indique clairement qu’elle n’a pas trait à une saisie ou à une citation à comparaître.’’

Il arrive qu’une entreprise confie à une société étrangère le soin de recouvrer ses créances. ‘‘C’est permis, confirme Karen Ghysels, mais toute société de recouvrement belge ou étrangère active en ­Belgique est tenue de s’enregistrer auprès du SPF Economie. Il existe une liste officielle des acteurs reconnus dans notre pays. Les demandes de paiement émanant de sociétés non agréées n’ont aucune valeur.’’

L’obligation d’enregistrement ne concerne pas les huissiers de justice et les avocats, qui n’en sont pas moins tenus de se conformer à la loi. Celle-ci interdit entre autres de se livrer à des pratiques trompeuses ou agressives, comme, détaille CEC Belgique, celles qui consistent à donner l’impression que la demande émane d’une autorité judiciaire ; à formuler des menaces juridiques inexactes ou à fournir des informations erronées sur les conséquences du défaut de paiement ; à mentionner sur l’enveloppe que son contenu concerne une récupération de créance ; à réclamer des montants non prévus ou non autorisés par la loi ; ou encore à continuer à envoyer des rappels après réception d’une contestation motivée et écrite.

Contestation

Si le consommateur n’est pas d’accord avec le montant réclamé, par exemple parce qu’il n’est pas satisfait du service ou du produit reçu, ou parce que la facture est prescrite, il peut le contester au moyen d’un écrit adressé –de préférence, par recommandé– au débiteur ou au mandataire.

‘‘Personne ne peut obliger le consommateur à payer tant qu’il n’y a pas été condamné par le tribunal, rappelle Karen Ghysels. Dès que la société de recouvrement ou l’huissier reçoit le courrier de contestation motivé, la procédure de recouvrement amiable s’interrompt. Il appartient alors au créancier de porter l’affaire devant la justice.’’

Plainte

Plusieurs organismes sont aptes à recevoir les plaintes : le Service de médiation pour le consommateur, si la réclamation concerne une société de recouvrement belge ; l’Ombudsman des huissiers de justice, si elle a trait à un huissier belge ; le Service Ombudsman des avocats, si elle porte sur un avocat belge ; et enfin, le Centre européen des consommateurs, si elle vise un commerçant sis dans un autre pays de l’Union européenne, qui a mandaté une société de recouvrement ou un huissier de justice.

Le consommateur qui ne souhaite pas déposer de plainte mais qui veut signaler une pratique commerciale trompeuse ou agressive peut s’adresser au Point de contact de l’Inspection économique, à la Chambre nationale des huissiers de justice ou à l’Ordre des avocats concerné.

Régimes spécifiques applicables aux factures d’électricité, 
de télécommunications et d’eau

Certains contrats font l’objet de règles spécifiques, qui diffèrent des dispositions générales en vigueur.
• Electricité : les Régions tant flamande que wallonne et bruxelloise ont une procédure qui leur est propre en cas de retard de paiement. Cette procédure l’emporte sur les règles générales.
• Télécoms : depuis le 1er juillet 2018, le premier rappel est gratuit et les suivants ne peuvent être facturés plus de 10 euros.
• Eau : la Région flamande et la Région wallonne prévoient une procédure spécifique lorsqu’une facture d’eau est impayée.

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